Avec la rubrique psychédélice, Unidivers.fr part à la rencontre de personnalités qui nous interrogent, voire nous inspirent… Nous pénétrons la cuisine de leur âme tandis qu’ils nous narrent un événement de leur vie en relation avec la… chère : boisson, légume, viande, fruit, plat, repas, saveur, odeur… Nos invités partagent un moment de leur intimité avant d’illustrer l’impact du souvenir par une image ou une musique.
Aujourd’hui, Unidivers accueille une pétillante journaliste culinaire bretonne à l’accent chantant le Brésil et au sourire irradiant de chaleur humaine. Nul doute que Juliana Allin possède tous les ingrédients pour mitonner un entretien savoureux. Attablées en terrasse devant un thé de Ceylan, l’humidité ambiante écartée par un timide rayon de soleil met en condition pour se livrer.
« Ma fille Blaise est née le 12.12.2012. Amusante date… Pourtant, ce n’était pas parti pour… À la fin de mon accouchement, j’ai été victime d’un problème médical. Blaise a alors été confiée à son père. Ce qui a ajouté à ma déception : les médecins m’avaient informée un peu plus tôt que je ne serais pas en mesure de l’allaiter.
Tandis que je regardais mon bébé en train de boire son premier biberon aux dans les bras de son papa, l’odeur du lait maternel de la prime enfance est…re-montée à ma conscience. Cette bouffée dont le goût varie selon les aliments mangés par la maman. Cette émanation est venue faire le lien entre Blaise, son père, et ma famille au Brésil.
Contre toutes attentes, cet instant qui était promis à rester une profonde frustration – l’incapacité de tenir mon enfant dans mes bras et savoir que jamais je ne l’allaiterai – s’est transformé en moment de bonheur. Poésie miraculeuse de jouir de ce premier lien charnel entre ce petit être et son père dans les bras duquel elle tétait. Offrir à Blaise par ce premier biberon l’assurance d’une vie choyée où la nourriture est symbole de joie, de curiosité, de partage et d’ouverture d’esprit. Un instant à trois où la vie nous a réservé la surprise de nous offrir l’impossible.
À ce moment d’extase joyeuse, j’ai senti mon corps… bouger. Une montée… j’ai eu une montée de lait ! Et j’ai pu offrir à ma fille quelques tétées. Les seules tétées que je lui aurai données. Un don de vie sous forme de récompense imprévue.
Aujourd’hui, Blaise a 15 mois. Elle a un contact privilégié avec la nourriture, elle est curieuse des goûts, des odeurs, des saveurs. Manger est un bonheur pour elle. Tout ce lait maternel qui s’est réduit à quelques gouttes, Blaise a comme intégré tout cette dimension de l’amour de la nourriture et de la cuisine qui est l’un des piliers de ma vie. »
Propos recueillis par Véronique Laroche