Le spectacle Justice·s de Vincent Collet sera présenté pour la première fois à La Passerelle (Saint-Brieuc) les 7 et 8 novembre 2023 puis à L’Aire libre (Saint-Jacques-de-la-Lande) du 22 au 24 novembre dans le cadre du festival TNB. C’est le troisième volet du cycle Pouvoir/ou pas, dans lequel quatre comédiens, s’affairant sur scène, discutent de notions liées au pouvoir. Au prisme de leur vécu, la conversation permet de rapprocher ce qui peut paraître lointain pour l’individu, de se réapproprier des concepts fondateurs de notre identité.
Vincent Collet, comédien et metteur en scène, nous accorde un moment de discussion tôt le matin, avant une journée de répétition à L’Aire libre. Membre du Joli Collectif, qui assure la direction artistique du lieu, il est à la fois programmateur et artiste programmé, à l’instar d’Enora Boëlle.
Cette particularité, selon Vincent Collet, « influe surtout sur l’esprit de la maison ». « Quand on est en création, on n’est plus derrière notre bureau, on est en train de douter, de se mettre en jeu sur le plateau. Les relations sont différentes avec l’équipe ou les compagnies accueillies ». Mais, quelque part, cette particularité impacte aussi la programmation : « on a peut-être moins une aversion du risque parce qu’on est sensibles à certains processus, à certains doutes ou certaines envies artistiques », avance Vincent. « 95 % de notre programmation consiste en des invitations extérieures. Par ailleurs, notre travail de création se poursuit et on trouve à l’Aire libre la possibilité de répéter et de présenter nos projets. C’est important que le public nous connaisse aussi sous cet angle-là parce que c’est à la fois notre sensibilité, les enjeux esthétiques qui nous intéressent, et c’est l’occasion de nous rencontrer sur ce qui nous anime », explique le metteur en scène.
Ce qui anime Vincent Collet depuis quatre ans, c’est son spectacle Justice·s. C’est le troisième volet d’un cycle entrepris depuis 2016, Pouvoir/ou pas. Celui-ci interroge la notion de pouvoir en reprenant la séparation entre pouvoir législatif, exécutif et judiciaire établie par Montesquieu. Rassurez-vous, ce n’est pas pour autant un cours de droit. « Ce qui fait que c’est théâtral et humain, c’est qu’il y a une tension entre le pouvoir en tant qu’institution et le verbe “pouvoir”, la capacité personnelle. Il y a toujours l’envie de ramener les questions à soi, de les rapprocher de nous pour pouvoir les mettre à notre mesure ou pour pouvoir soi-même imaginer des choses qui sont trop grandes pour nous », précise Vincent Collet.
Pendant les trois spectacles, cette action de questionnement-réappropriation passe par la discussion sur scène des comédiens. « On y retrouve le même groupe de quatre personnes et personnages. Il y a donc des comportements récurrents, un mode d’écriture et un humour qui revient dans les trois spectacles. C’est un groupe habité de questions qu’il tente de résoudre ensemble », annonce Vincent Collet. « Chacune de ces questions, on se les pose comme dans une conversation où chacun rebondit avec son propre prisme, ses références. Les choses se tissent, se construisent, s’affirment ou se contredisent parce que les uns et les autres abordent ce sujet avec leur propre sensibilité. Cette tentative de compréhension donne un éclairage sur ce qu’est le pouvoir législatif (dans le premier spectacle, Aveugles, avec des gens qui se posent la question de la nécessité de règles communes pour avancer), exécutif (Antigone, où on se demande comment ça se passe quand un groupe doit décider dans les coulisses et que ça impacte toute une cité) et judiciaire avec Justice·s. »
Ainsi, dans Justice·s, les quatre comédiens et comédiennes, dont Vincent Collet, se retrouvent sur scène « avec quelque chose à faire ». Hormis eux et un tas de planches, le plateau est vide au départ. Ensemble, ils se mettent à construire un décor et réalisent au fur et à mesure qu’ils sont taraudés par les mêmes questions. « Ce sont aussi des gens qui ont un imaginaire débordant et qui se laissent embarquer dans une histoire qu’ils créent au fur et à mesure. Le spectacle interroge l’imaginaire et notre capacité à se projeter collectivement. Donc on ne sait pas très bien si ce sont des gens qui sont en train de faire des travaux ou quatre personnages enfermés dans une boîte qui inventent leur propre réalité », ajoute Vincent. La pièce, écrite à quatre, articule une activité passée, le vécu de chacun, les échos personnels, « des matériaux vivants », et une activité actuelle, sur scène. « Il y a quelque chose d’actif au plateau, dans les corps, l’activité de groupe. Mais il y a aussi l’idée que la conversation est peut-être l’activité humaine où on est le plus conscient à soi-même. »
La première question qui taraude les personnages de Justice·s, et Vincent Collet le premier, est « pourquoi la justice me semble-elle quelque chose de si éloigné alors que la question de ce qui est juste ou non est une boussole qui nous guide au quotidien, un aiguillon intérieur sur lequel on se construit ? ». Cette question, à travers les allers-retours entre discussion et sensibilité personnelle, permet de redécouvrir les différentes conceptions de la justice, ses différents aspects, ses différentes existences. « En défrichant la notion, elle se rapproche de nous, elle devient de plus en plus importante ou intéressante. La pièce est une tentative de rapprochement avec la justice, pour mieux saisir le rapport entre l’individu et le collectif », résume Vincent Collet.
Pour prolonger cette appréhension plurielle de la justice·s, une installation vidéo immersive est proposée à l’issue du spectacle : Le Grand Tour. Elle se compose de six films documentaires réalisés par Vincent Collet dans différents pays. Entre la Bretagne, Genève, Bruxelles, Québec, la Nouvelle-Calédonie et Athènes, il y interroge des habitants sur la notion de justice. Il ne nous en dit pas plus pour le moment. « J’ai envie de voir ce que ça va provoquer chez les gens après le spectacle. »
Distribution
Conception, mise en scène : Vincent Collet
Co-auteur.ice.s : Marie-Lis Cabrières, Vincent Collet, Fanny Fezans et Vincent Voisin
Interprétation : Pierre-Olivier Boulant, Marie-Lis Cabrières, Vincent Collet, Fanny Fezans, Lucille Iosub et Vincent Voisin
Collaborations artistiques : Pierre Déaux, Marion Le Guerroué
Scénographie : Marine Brosse
Régie générale : Lucille Iosub
Son : Pierre-Olivier Boulant
Lumière : Louna Guillot
À lire également sur Unidivers :