Du kan ha diskan qui groove, de la gavotte qui bastonne c’est ça Krismenn et Alem, ça, mais pas seulement. Ces deux gaillards pur beurre font depuis quelque temps déjà preuve d’un talent indéniable et d’une maturité réjouissante dans le mélange des genres et la conflagration sonique de l’ancien et du moderne. Pas étonnant qu’ils aient été sélectionnés par l’antenne bretonne des iNOUïS du Printemps de Bourges.
Depuis 1985, Le Printemps de Bourges s’est doté d’un dispositif national et original de repérage et de sélection de jeunes artistes en rock, chanson, électro et hip-hop : Les iNOUïS du Printemps de Bourges Crédit Mutuel. Ce réseau unique s’appuie sur 29 antennes territoriales et francophones qui, toute l’année, explorent leur territoire pour dénicher les perles rares. En Bretagne le CRIJ Bretagne et L’Antipode en sont les piliers. Cette année, c’est sur le terrain à peine défriché du hip-hop vraiment régional que nous avons des gagnants :
Alem et Krismenn le kan ha beatbox c’est eux ! Exigeants et pertinents ils seront les bouches vibrantes et pertinentes de la Bretagne le 14 avril sur la scène hip-hop de l’édition 2016 des iNOUïs du Printemps de Bourges.
Après les expérimentations, pas toujours heureuses, mais défricheuses (et souvent inventives) de Denez Prigent à la fin des années 90 ces deux là assurent et assument une alchimie fonctionnelle entre archaïsme et modernité. Rien d’étonnant à ce que Krismenn ait suivi le parcours et l’enseignement d’Erik Marchand. Ce dernier, l’un des meilleurs (et des plus créatifs) chanteurs bretonnants contemporains n’est pas breton. Débarqué de la capitale, fasciné non par le renouveau, mais par la tradition authentique perpétuée dans le très isolé Centre-Bretagne (kreiz Breizh), Erik Marchand s’était résolu à suivre une ascèse exigeante auprès des plus vigoureux chanteurs traditionnels avant de pouvoir développer et amplifier son approche et son style.
Krismenn, avec bonheur et sans aveugle suivisme, s’est mis à son école. Avec le talentueux Alem, vice-champion du monde de human beatbox en 2012, Krismenn donne aujourd’hui aux traditionnels chants à danser de Basse-Bretagne une cinglante modernité. Ces deux-là révèlent l’acuité et la pérennité d’un genre archaïque trop souvent encore relégué dans les catégories folklore et divertissement alors que depuis des siècles pourtant gwerziou et kannou sont des modes littéraires et musicaux de transmission du réel social et contemporain.
Remarqués par l’acuité et la vigueur de leur style inventif Krismenn et Alem seront donc les dignes représentants musicaux entés et remuants d’une Bretagne entière et singulière au cœur d’un festival centré et francophone… Pourrions-nous vraiment ne pas les soutenir ?