« Que ta nourriture soit ta médecine ». C’est in fine le message principal que veut faire passer Lee Fulkerson dans son documentaire La santé dans l’assiette sorti en octobre 2013. Cette pensée, originellement formulée par Hippocrate, a pourtant près de 2400 ans !
Dans cette enquête percutante, le réalisateur, Lee Fulkerson, suit le parcours de deux principaux interlocuteurs. Bien connus dans le milieu scientifique américain, il s’agit du professeur Colin Campbell, biochimiste nutritionnel à l’Université Cornell, et le docteur Caldwell Esselstyn, ancien chirurgien cardiaque à la Cleveland Clinic. Ces deux spécialistes ont passé des années à faire des recherches similaires en parallèle avant de se rencontrer en 1990. Et d’en tirer une conclusion commune : notre santé dépend incontestablement de notre alimentation.
Tous les témoins que Lee Fulkerson filme (patients, chercheurs, nutritionnistes, médecins) clament qu’une alimentation saine rime avec une alimentation à base de produits non transformés d’origine végétale. Une affirmation assez troublante quand on a été éduqué avec la certitude que le régime idéal comporte un éventail diversifié de viande, produits laitiers, fruits, légumes et céréales. Pourtant, les chiffres et résultats des recherches évoqués dans La santé dans l’assiette convergent tous vers une même affirmation : les viandes et produits laitiers sont responsables de la plupart des maladies d’aujourd’hui.
Le Pr Campbell démontre, quant à lui, que la viande animale est susceptible d’augmenter d’une manière critique le risque de cancer. Il utilise l’image d’un interrupteur : manger de la viande l’activerait, ne pas en manger réduirait considérablement le risque de cancer. Quant aux produits laitiers, ils seraient en grande partie responsables de nombreux problèmes cardiaques ou de l’affaiblissement de nos os. Les deux scientifiques en concluent alors que cancers, diabète et hypertension pourraient être largement réduits, voire évités, rien qu’en éliminant les produits d’origine animale de nos assiettes.
En 1985, le Dr Esselstyn mobilise pour ses travaux des patients en fin de vie (cancers, maladies cardio-vasculaires, etc). Il souhaite améliorer leur état de santé en changeant leur mode d’alimentation. Après sa rencontre avec le professeur Campbell, il supprime les produits d’origine animale de leur régime. 25 ans plus tard, quatorze des dix-huit patients condamnés sont encore en vie… Un constat qui donnerait envie de manger des plantes jusqu’à ses derniers jours !
À y regarder de plus près, dans le monde occidental, seul Popeye nous a vanté les mérites des épinards. Les autorités sanitaires elles-mêmes ont toujours encouragé la consommation de produits d’origine animale au moins autant que ceux d’origine végétale. Pourquoi ? Aussi bien en raison de la foi dans les bienfaits d’une nourriture diversifiée – laquelle s’est révélée plutôt favorable après-guerre – que sous la pression des lobbys agroalimentaires, notamment laitiers (lait de vache et produits transformés). Plusieurs études scientifiques confirment que les protéines, calcium et autres nutriments dont le corps a besoin seraient présents en quantité largement suffisante dans les végétaux. D’autres trouvent un équilibre dans une prise régulière et en petite quantité de produits lactés de chèvre, mais non de vache. À l’approche des fêtes de fin d’année comme après, notamment dans un pays gastronomique comme la France, c’est un pari pour les cuisiniers de donner aux céréales et légumes leur place sur les meilleures tables…
Si le documentaire traite essentiellement des questions nutritionnelles aux États-Unis et d’un point assez étasunien, ne nous croyons pas épargnés. La bande-annonce française de La santé dans l’assiette s’adapte au public hexagonal en soulignant : l’obésité a augmenté de 75 % ces 15 dernières années ; les maladies cardiovasculaires sont la 2e cause de mortalité en France ; plus de 15 000 pontages coronariens sont réalisés chaque année et les diabètes, cancers et autres « maladies de société » sont en constante progression. Quoi qu’il en soit, en matière de nourriture, il en va comme le vin : à composer et consommer avec modération. Qui cuisine piano va sano…
Lee Fulkerson : La santé dans l’assiette, 6 octobre 2013 (1h32min) Double DVD avec extras sur la gastronomie Française : 25 euros