Le Grand Boum, festival de chœurs d’adolescents organisé par l’Opéra de Rennes et la Maîtrise de Bretagne, s’est déroulé le weekend du 2 au 4 juin 2023. Pendant 3 jours, divers groupes se sont succédé à l’opéra et place de la Mairie, livrant des prestations plus époustouflantes les unes que les autres.
Pendant trois jours, les 2, 3 et 4 juin 2023, les amateurs de chant choral en ont eu pour leur argent, façon de parler, puisque les spectacles étaient gratuits, mais le niveau de qualité de la proposition a véritablement bluffé tous ceux qui avaient répondu à l’invitation de l‘Opéra de Rennes et de la Maîtrise de Bretagne.
C’est un peu en « off » que Frame, proposé par Mysterious opus CIE, met en scène un important groupe d’enfants de classes de sixième issus des établissements scolaires Les Chalais, La Binquenais et Clotilde Vautier. Aidés par le chœur Appogio et musicalement accompagnés par le remarquable quatuor de saxophones « Élément », ils vont chercher l’inspiration dans des thèmes qui les touchent et nous proposent des airs familiers issus de Harry Potter, ou du Seigneur des anneaux. De toute évidence intimidés par les ors et les velours du lieu et malgré le soutien du chœur Appogio, les gorges sont un peu serrées, mais sous la direction ferme et bienveillante de la jeune cheffe Éléonore Le Lamer, peu à peu les craintes se dissipent et c’est avec une évocation de la princesse Mononoké que cet ensemble nous entraîne dans son imaginaire et nous séduit. À défaut d’être le groupe le plus étincelant de ce festival, il sera, à cela aucun doute, le plus émouvant et ses membres et ses professeurs pourront se dire légitimement « nous l’avons fait ».
C’est encore Éléonore Le Lamer qui entame les festivités le samedi à 13h30 en présentant le spectacle Tablées d’Alain Michard et la compagnie LOUMA. La troupe déambule autour d’une dizaine de tables réparties sur la place, des conversations se forment, des voix s’entremêlent pour former une pâte sonore qui va en s’amplifiant. C’est compter sans la destination du lieu, surtout en face de l’opéra où la Mairie voit se succéder plusieurs mariages, lesquels avec un féroce enthousiasme viennent à grands coups de tambours quelque peu occulter la représentation. Les aléas du direct sans doute !
C’est avec plaisir que nous retrouvons à 14h30 et intra-muros, la Maîtrise de Bretagne dirigée par Maud Hamon-Loisance et accompagnée au piano par Heun Ye Song. Un air de fête est un spectacle joyeux et haut en couleur. Le répertoire puise dans l’important vivier des chansons traditionnelles et le théâtre vient se mêler à la fête en illustrant certains chants de petites scènes amusantes mises en forme par Jean-Michel Fournereau. C’est plutôt sympathique et la « polka de la tortue » emportera un franc succès.
Pas le temps de se reposer que le CJ2, chœur de jeunes au carré reprend possession de la scène. Constitué à l’occasion du festival par des ados aux cursus très différents, se mêlent en son sein des élèves du collège Clotilde Vautier en apprentissage du chant grâce à des classes à horaires aménagés, des chanteurs plus confirmés issus du chœur des jeunes du conservatoire et tout cela sous la houlette de leurs professeurs de musique. Ils nous proposeront un spectacle intitulé fort justement Sing and smile conçu par Julie Marchal, Gaëlle Lasalle et Mathilde Vincent. Chantez et souriez… on ne pouvait pas trouver de titre plus en harmonie avec l’énergie et l’enthousiasme des presque 70 choristes présents sur scène. Ils seront ovationnés par un public conquis à juste titre par une telle démonstration de spontanéité.
Dans un genre très différent et plutôt à contre-courant, c’est le groupe Silk, uniquement composé de jeunes filles qui nous étonnera par l’interprétation de grands succès pop-rock, largement revisités à ne pas dire copieusement réécrits pour lors interprétés au piano par Gaëtan Chapon. Qu’importe, il n’y a pas d’anathème et les chansons du groupe Queen qu’elles nous proposent séduisent autant qu’elles étonnent, les Beatles et Kate Bush se joignent à la fête et apportent une coloration différente. Tout est un peu hors normes, à l’image de Françoise Tettamenti, sorte de Cruella bienveillante à la toison rouge vif, assumant avec un caractère bien trempé, un anticonformisme sans complexe et joyeux.
Le dernier de la journée et pas le moindre, c’est à 18h30 que nous accueillons le groupe Catalan VEUS de la ville de Granolers. Il sera comme une cerise sur le gâteau. Ce groupe issu d’un mouvement populaire qui vit en Espagne la création de nombreuses chorales à la fin du 19e siècle, est dirigé depuis 1996 par Josep Vilar y Soler. Lors d’une discussion assez franche, nous n’avions pas hésité à exprimer certains doutes sur ces perpétuels déplacements et autres pantomimes auxquelles se livrent maintenant de nombreuses chorales. Qu’elles soient d’enfants ou pas. Non que l’aspect dynamique soit gênant, mais il est à craindre que la qualité vocale ou celle de la musique ne s’y retrouve pas toujours. La conclusion est claire, il n’y a pas de place si ce n’est pour la perfection… or chacun sait qu’elle n’est pas de ce monde. Rien pourtant n’empêche de s’en approcher et c’est ce que Josep Vilar y Jover a réussi à nous démontrer avec ce remarquable groupe d’adolescents de 11 à 17 ans. Juste incroyable…. Un festival de précision, de coordination, une audace réjouissante, une créativité qui ne s’impose pas de limite, mais toujours derrière, la rigueur et en filigrane le travail. Ah qu’il est doux en de pareilles circonstances d’avoir tort. Bravo à Jan et à Kiani, lesquels en solistes chantent sans faillir devant une salle pleine. (Estupendo !)
Après une heure d’un spectacle étourdissant, c’est d’un seul homme que le public rennais a offert à VEUS une standing ovation largement méritée. Souhaitons que ce groupe, dans les années qui viennent soit à nouveau l’invité de l’opéra.
Vous le constaterez, ce grand boum a été le motif de nombreuses satisfactions et au milieu de tout cela, un but essentiel a été atteint : celui de faire entrer à l’opéra un public qui de lui-même se serait exclu d’un tel lieu. Cette réussite est due au travail acharné de professeurs de musique, de chefs de chœur qui ont encore foi en leur mission et il est juste de les en remercier, et les mots qui nous viennent naturellement à l’esprit sont bravo et merci.
* malheureusement dans l’impossibilité d’assister au spectacle Transport express de la chorale parisienne SOTTO VOCE, nous en avons néanmoins entendu le plus grand bien, c’était juste fabuleux !