Derrière Moi, Matilda, 25 ans, retraitée, à La Comédie de Rennes les vendredis 7 novembre et 19 décembre 2025, le public découvre la comédienne Mathilde Bouilland. Entourée de cartons de déménagement, entre récits d’expériences professionnelles passées et réflexions personnelles déjantées, elle raconte avec humour et sincérité sa relation compliquée avec le monde du travail et, en transparence, ses inquiétudes à l’égard du monde.
Le saviez-vous ? « Le travail, quelle horreur ! […] Ça vient de tripalium qui veut dire « faire souffrir » » Avec cette information en tête, Matilda, 25 ans, a toute raison de prendre sa retraite aussi jeune ! Pas tout à fait remise de sa dépendaison de crémaillère de la veille, elle fait visiter tant bien que mal l’appartement parisien, où elle vit en colocation, qu’elle s’apprête à quitter. Mais c’était sans compter sur sa grande faculté à taper la causette. Mamie avant l’heure, Matilda est très bavarde. Et, même si elle n’a pas un sou en poche, elle n’a rien perdu de son mordant et de son humour, surtout quand il s’agit de raconter ses galères…

La comédienne Mathilde Bouilland est à l’image de son seul en scène : sincère, léger et avec une bonne dose d’humour. « J’ai commencé le théâtre à 9 ans donc j’ai reçu mes premiers rires sur scène très tôt. Je me suis dit « wow, mais c’est génial. Je veux revivre ça toute ma vie » » raconte-t-elle. Entre son personnage et elle, il n’y a qu’un pas, ou plutôt qu’une salopette. Dans cette première création, elle joue en effet son propre rôle et son écriture est arrivée un peu par hasard, après avoir assisté à un festival d’humour à la montagne. « C’était purement par ego », plaisante-elle. « Être comédienne, c’est un peu un égotrip en fait. » Boostée par l’envie d’être à leur place, elle écrit son premier sketch en s’inspirant de son séjour à la montagne puis rejoint un groupe de comédiennes qui souhaitent jouer dans les bars parisiens. Le public apprécie, alors pourquoi ne pas continuer ?
De quoi parle-t-elle précisément ? Des (més)aventures de Matilda, jeune comédienne qui essaie de faire son bout de chemin à Paris et qui aime raconter des blagues. Lutin pour l’extraordinaire maison de Père Noël, super-héroïne un peu trop sexy, ses rendez-vous Tinder (photos à l’appui), elle tourne en dérision toutes les galères qui lui sont tombées dessus. Ce patchwork de sketchs écrits au fur et à mesure sont ici réunis autour de la thématique de la retraite, et donc le travail. « Je voulais parler de notre relation au travail, de l’aliénation et du temps qu’on y passe », informe-t-elle. « J’ai longtemps associé le travail à la douleur et à la fatigue, parce que j’ai vu mes parents trimer toute leur vie même s’ils adoraient leur métier. » Passionnée par le sien justement de métier, la comédienne a souhaité montrer que le travail peut être synonyme d’épanouissement personnel, comme ce fut le cas pour elle, ou qu’il ne résume pas une vie. Elle fait aussi partie des voix d’une génération qui privilégie le présent, qui n’a pas envie de s’enterrer dans un boulot et dont les schémas transmis par les parents sont aujourd’hui obsolètes. « Attendre d’avoir plus de 60 ans pour voyager alors que je n’arriverai peut-être plus à me déplacer ne me fait pas rêver », dit-elle honnêtement.

Son allure et son phrasé sont un clin d’œil à Coluche dont la voix, le bagou et les histoires ont bercé son enfance. « Quand j’étais petite, je n’arrivais pas à dormir, alors j’écoutais en boucle les CDs enregistrés de Coluche » confie-t-elle. « Je ne comprenais pas la moitié de ses blagues, mais j’aimais sa façon de parler. Il y a quelque chose de très attachant dans son personnage. Il faisait de l’humour avec poésie et de manière très juste, et ses propos sont encore actuels. » Un poil naïve, mais authentique et attachante, Matilda réfléchit (beaucoup) au monde qui l’entoure – le capitalisme, l’écologie, l’immigration, l’insalubrité des appartements parisiens, etc. -. Mais elle ne prend jamais un ton moralisateur et ne tombe pas dans le pathos. « C’est une chose qu’on avait appris en communication, les gens ne retiennent pas les messages culpabilisants, un spot humoristique est plus impactant », souligne Mathilde qui a suivi une formation en communication avant de se lancer dans des études de théâtre. « Je peux être pessimiste parfois donc c’était un moyen pour moi d’extérioriser. »
Elle trouve à La Comédie de Rennes, théâtre de divertissement comme elle l’appelle où elle est aujourd’hui comédienne, cette légèreté dont elle avait besoin pour s’épanouir professionnellement. « J’ai joué beaucoup de drames à Paris, et je n’avais plus envie de ça quand je suis arrivée à Rennes. » Moi, Matilda, 25 ans, retraitée se rapproche plutôt de l’esthétique du théâtre de boulevard : elle utilise l’humour comme porte d’entrée à un théâtre contemporain moins accessible et parfois considéré comme élitiste.
Matilda évolue sur scène au milieu de ses cartons, farfouillant de temps à autres dedans à la recherche d’un bout de sa vie. Matériau synonyme de transition et de déplacement, représentent-ils des meubles de fortune ou le signe d’un déménagement ? Elle laisse planer le doute, mais sa présence sur scène fait écho à la situation et la précarité du personnage dans une ville où trouver à se loger pour un prix raisonnable est synonyme d’accepter l’insalubrité. « J’ai eu la chance de ne pas avoir de réels problèmes financiers à Paris, mais c’était l’enfer pour des amis, quand bien même ils travaillaient à côté », se rappelle-t-elle. Elle ajoute : « Ce matériau est aussi voué à devenir un déchet et Atika [Camara, artiste en charge de la scénographie, NDLR.] travaille beaucoup sur le réemploi de ce type de matériaux. On se retrouvait bien dans cette idée. »

Aujourd’hui, Matilda est rentrée à Rennes, se retrouve dans une colocation de 8 personnes et a trouvé l’amour. Ses aventures sont loin d’être terminées, il reste encore beaucoup à écrire. Mais pour l’instant, elle fait vivre ses premières aventures à La Comédie de Rennes donc rendez-vous les vendredi 7 novembre et 19 décembre !
Moi, Matilda, 25 ans, retraitée. À partir de 13 ans. Durée : 1 h
Texte : Mathidle Bouilland
Mise en scène : Caroline Raux
Scénographie : Atika Camara
Vendredi 7 novembre et vendredi 19 décembre au théâtre de La Comédie de Rennes,
Zone commerciale Les Longchamps, 31 rue Xavier Grall, 35 700 Rennes
Tarifs : Tarif plein 18€ / tarif étudiant (moins de 20 ans) 14 € (Billetterie en ligne)
