Mercredi 25 janvier à 18 h 30 aux Champs libres, Mona Ozouf, agrégée de philosophie, historienne et critique littéraire, a présenté son dernier livre. La cause des livres rassemble quarante années d’articles publiés au Nouvel observateur. La grande prêtresse de l’histoire viendra en pays conquis dans sa Bretagne natale.
Mona Ozouf est connue pour ses nombreux ouvrages, dont son Dictionnaire critique de la Révolution, écrit avec François Furet. Bretonne, elle a intériorisé son identité dans le corbillon de son enfance. Que disons-nous, elle est Bretonne. Fille d’un « patriote breton » et d’une femme qui embrassa la cause de son mari, Mona Ozouf est d’un pays composé « d’un peuple d’insurgés, fils authentiques de pilleurs d’épaves, de brûleurs de manoirs et aux réfractaires. »
Dans Composition française, Mona Ozouf n’oublie jamais sa terre natale. Elle en parle avec émotion. Elle la défend même non sans ironie :
« Tantôt, on évoque la langue comme un jargon incrusté sur quelques dizaines d’hectares : il est bien connu que les Bretons baragouinent ; tantôt on se félicite de voir l’école républicaine faire abandonner aux écoliers sur le seuil, la “parlure familiale” et voilà pour les parlers régionaux, incapables de sa hausser à la dignité d’une langue. […] On somme les minorités de produire leurs raisons d’exister, d’établir à quoi elles peuvent servir dans le monde actuel et ce qu’elles peuvent bien opposer à la modernité qui insensiblement les détruit. »
Toutefois, Mona Ozouf n’est pas une militante de la Bretagne vivante. Elle s’est plongée dans la grande histoire par respect d’une tradition bretonne. « C’était aux femmes, dit elle dans Composition française, que revenait le soin d’entretenir la mémoire familiale, de tenir la greffe des naissances, des mariages, des anniversaires, de faire circuler les images traditionnelles. »
Réduire Mona Ozouf à l’art de transmission serait toutefois lui faire un terrible affront. Elle a en effet passé son temps à expliquer dans ses livres un passé commun… par-delà l’universalisme et le particularisme. Elle le confirme encore une fois dans Composition française. « Je ne crois ni les universalistes parce que notre vie est tissée d’appartenances, ni les communautaristes parce qu’elle ne s’y résume pas. » En fait, elle a toujours composé… « C’est l’individu qui tient la plume et se fait le narrateur de sa vie. Le narrateur, c’est-à-dire l’ordonnateur, l’arrangeur, l’interprète. » Or, la narration serait libératrice. « C’est elle qui dessine l’identité, sans jamais céder à l’identité. Car le parcours biographique corrige, nuance, complique à l’infini la vision absolutisée des identités. »