In Parenthesis est le premier album du compositeur breton Glenn Besnard, sous l’alias Øllø. Dans cette parenthèse musicale sortie en décembre 2023, il confirme son affection pour les musiques scandinaves et contemporaines en plongeant plus profondément dans la sphère des musiques électroniques. À l’ambiant et la downtempo, le musicien costarmoricain mêle des sonorités plus rythmées dans un album immersif .
Si l’on devait imager l’ouverture de l’album In Parenthesis d’Øllø, les premières notes plongent son auditorat dans les profondeurs de l’océan. Le Costarmoricain Glenn Besnard nous introduit en douceur dans son premier album aux morceaux envoûtants et poétiques qui propose un voyage au coeur des quatre éléments.
Après une école d’audiovisuel en section son, Glenn Besnard a travaillé dès 2004 en tant qu’opérateur son à Radio France tout en pratiquant la musique avec des groupes locaux. Son métier l’a ensuite conduit à travailler pour le spectacle vivant, et il compose aujourd’hui pour des films, documentaires ou fictions, le théâtre et la danse. C’est justement au contact de musiciens avec qui il collabore que l’envie lui revient de reprendre la musique, laissée de côté. La découverte en 2009 du film Heima du groupe islandais Sigur Ros sera le déclencheur d’une écriture musicale qui aboutira à la création du groupe Bumpkin Island, dans lequel il sera claviériste : « À partir de ce moment-là, je n’ai plus vraiment arrêté de jouer de la musique, parallèlement à mon travail de technicien son ».
Le groupe, dans lequel il est aujourd’hui ingénieur son, s’est épanoui dans des compositions folk teintées d’electronica dont la source d’inspiration principale sont les pays scandinaves, particulièrement l’Islande, une île aux paysages fascinants qui interpelle musicalement Glenn. « Est-ce parce j’aime ces pays-là que mon écoute est influencée ? », s’interroge-t-il avant d’ajouter : « Il y a une qualité musicale et quelque chose de très fort dans leur musique qui me touche beaucoup. Les groupes ont des styles très différents, mais tous ont une démarche personnelle et un univers très prononcé. » Le musicien cite entre autres le groupe islandais Múm qui n’existe plus aujourd’hui, Amiina et la violoniste Hildur Guðnadóttir, à l’origine de la bande originale de la série Tchernobyl.
Cette sensibilité forte pour la musique nordique prend en 2016 une nouvelle forme, en solo cette fois-ci, et nouveau nom, Øllø. Le palindrome ne signifie rien, mais rappelle par son orthographe et sa sonorité son pays de cœur. Glenn expérimente différentes textures et couleurs dans plusieurs EP avant de sortir officiellement son premier album, In Parenthesis. Celui qui était habitué à composer des musiques d’images, dédiées à un univers, plonge dans la création sans avoir d’autre contrainte que celle de raconter une histoire. « L’envie d’écrire cet album est partie d’une précédente création que j’ai réalisée pour la pièce de théâtre, Rebondir d’une compagnie de Saint-Brieuc », raconte-t-il. « La metteuse en scène voulait une musique un peu électronique, assez rythmée, ce que je ne faisais pas avant, ma musique étant plus atmosphérique et planante. » C’est un morceau de la pièce qu’il réarrange qui devient le point de départ de l’album « J’avais envie de mélanger mon univers très ambiant avec des percussions et tempos plus dansants. »
« Avec cet album, c’était un peu la cour de récré. J’étais focalisé sur la musique et le fait de me faire plaisir avant tout. »
La parenthèse d’Øllø est un voyage musical, une expérience immersive et hypnotisante, qui oscille entre downtempo, ambiant et electronica dansante. « C’était un approfondissement de mon rapport à la machine, que ce soit avec l’ordinateur, les synthés, ou les boîtes à rythme. »
Si les sonorités rappellent Rone à ses débuts, on retrouve dans l’album In Parenthesis l’expérimentation caractéristique des musiques contemporaines et la singularité de certaines musiques nordiques à faire ressentir les sonorités silencieuses de la nature. Les synthétiseurs analogiques s’allient aux pianos acoustiques ou électriques dans une alternance de sons vibrants et de boucles répétitives. Les dix morceaux, composés dans la campagne costarmoricaine, sont autant d’invitations, planantes ou plus rythmées, à créer des paysages mentaux, comme dans « Ugginaqtuq » ou « Song for Owen ». « J’ai besoin de grands espaces autour de moi. Quand on voyage avec ma conjointe, on va beaucoup sur les îles, qu’elles soient bretonnes ou plus loin comme la Nouvelle Zélande », exprime Glenn. « J’aime ce rapport à la nature et aux éléments. Sur les îles, il y a le vent, très important, et la mer autour. » En Islande, la glace des glaciers côtoie le feu des volcans et cette réunion des éléments demeure pour lui une source d’inspiration inépuisable. Certains titres sont d’ailleurs une référence directe à des paysages où la terre rencontre la mer : la chute d’eau « Alafoss » en Islande et, plus proche de chez nous, « Cancale » en Bretagne. « J’essaie de retranscrire dans la musique toutes ces choses qui, pour moi, sont importantes », comme la nature que le musicien côtoie et apprécie, et le mysticisme qui entoure ce pays fortement imprégné de ses mythes et légendes.
« Je reviens de chaque voyage avec beaucoup d’envies musicales. Chaque île est un univers dans lequel existe un lien très fort entre la nature et l’humain. »
Malgré la dimension cinématographique qu’on peut prêter à l’album, Glenn est moins inspiré par les bandes originales de films que par les artistes qui ne composent pas seulement pour le cinéma, comme l’Islandais Johann Johannsson (décédé il y a 6 ans et compositeur de la musique de First Contact de Denis Villeneuve) ou le Britannique Jonny Greenwood du groupe Radiohead et compositeur pour des films. « Il y en a d’autres… je trouve leur travail passionnant et parfois déroutant. » Il cite encore les travaux des Américains Philip Glass et Steve Reich et des compositeurs français Alexandre Desplat, qui a écrit la musique de Grand Budapest Hotel de Wes Anderson, et Yann Tiersen.
Après la sortie de l’album en décembre 2023, le clip de « Ricochet » est prévu pour février 2024, mais Øllø n’envisage pour le moment pas live ou un deuxième album. Il compose actuellement pour deux pièces de théâtre, une pour la compagnie Gazibul et le Grand Appétit de Saint-Brieuc. Le temps fera son oeuvre, mais pour l’heure In Parenthesis demeure une parenthèse solitaire sur le chemin musical de Glenn Besnard que l’on prend plaisir à écouter, dans l’attente qu’il la rouvre, peut-être un jour.