La sophrologue Chloé Chaubernard à la ville est connue à la scène sous le nom de Ountaneïa. Elle sortait Resonance, son premier album en collaboration avec le dj rennais Maxei, fin février 2024. Nourrie des cultures et des chants du monde, l’artiste aux multifacettes offre un voyage musical électronique psycho-tribal qui invite à la connexion à soi et aux autres par la musique et la danse.
Ountaneïa est née au gré des rencontres et des opportunités comme une feuille vogue au gré du vent, en mars 2023, mais Chloé Chaubernard de son nom de naissance baigne dans la musique depuis l’enfance. Son penchant artistique, elle l’a hérité d’un père mélomane et d’une mère danseuse. Il est loin le temps de la Chloé adolescente, membre de chorales au collège et du groupe de rock pêchu Bloody Mary au lycée. Elle s’est depuis épanouie dans un style musical tout autre qu’elle nous livre dans Resonance, son premier album. En collaboration avec le dj Maxei, elle invite au lâcher prise par la musique et la danse.
Passionnée par la voix, la Rennaise en a fait la base de son activité professionnelle en devenant thérapeute son énergéticienne. Elle la développera d’ailleurs en 2014 grâce à une année de formation en coaching vocal et scénique, prix du concours Mans Cité Chanson, en catégorie interprète, qu’elle a remporté. « Mon prof m’a formé sur les chansons modernes en tant qu’artiste, mais en tant que coach vocal il a fait le lien avec mes connaissances et mes études en sophrologie », déclare-t-elle. Depuis près de dix ans, elle explore les potentialités de la voix – sa vibration, sa fréquence, sa rythmique – dans son travail en s’intéressant à toutes les cultures et les chants du monde qualifiés de sacré. Sa fascination l’a guidée dans sa voie professionnelle et Ountaneïa en est le prolongement artistique. « Les chants du monde me passionnent, la vocalité me passionne, que ce soit dans la linguistique ou dans le chant en fonction du lieu et de la culture. »
Bien qu’elle soit particulièrement sensible aux chants tibétains et grégoriens, qu’elle ait une attirance pour les cultures orientale, nordique et balkanique, son inspiration reste éclectique. « Je retiens peu de noms, j’ai une mémoire de l’expérience dans les musiques », précise-t-elle. Dans des couleurs ethniques, elle cite tout de même le duo Laboratorium Pieśni et en matière de tonalités plus électroniques, elle a un goût prononcé pour la musique Omiki, dj de trance progressive. N’importe quel style peut néanmoins mettre Chloé en état de transe : une ligne de piano, un morceau de psytrance, une chanson de jazz, etc. Et c’est ce qu’elle souhaite transmettre avec sa musique.
Son épanouissement musical prend une nouvelle direction quand elle rencontre le musicien rennais Triskedelik. Une première collaboration naît en mars 2023 lors de la première soirée de l’association Gattai, qu’elle cofonde avec Trikedelik et le dj KERO. Parmi les collectifs et associations de musiques électroniques du cru, ce projet a su se démarquer par son originalité à valoriser les musiques électro-ethno-organiques, rares sur la scène rennaise.
Par la danse et le chant, l’artiste se connecte à la tribalité intérieure présente en chacun de nous au-delà de toute temporalité, de toute culture. « Le chant et la danse sont innés chez l’humain. Leur puissance est phénoménale quand on y pense : ça permet de prendre conscience de notre densité, d’entrer en interaction avec l’autre, d’ancrer, de décharger… ». Ountaneïa, qui signifie « lune de feu», représente la chamane universelle et intemporelle. « Quand j’étais petite, j’avais déjà tout un tas de plume dans les cheveux et mon nom d’indienne à l’époque c’était Petite Lune et depuis Petit Lune a grandi », confie-t-elle sur le ton de l’humour.
Cette entité lui permet de toucher un plus grand nombre de personnes dans différents lieux : des concerts d’improvisation méditative en journée, des événements culturels en soirée. Elle offre un espace de lâcher prise et de connexion avec l’instant T, dans l’idée qu’il peut résonner en chacun, avec ce qui lui appartient, sans qu’elle n’y mette une intention particulière. « C’est déjà ce qu’il se passe dans n’importe quel concert », précise-t-elle. « Bien qu’on ait tous une histoire unique, nous avons les mêmes émotions à partager. La musique, c’est finalement ce qui réunit le plus de personnes différentes en un seul endroit, en un seul moment. L’artiste véhicule un projet personnel, mais à travers sa voix, son instrument, il transmet une vibration émotionnelle qui fait écho à nos propres histoires et permet de se réunir malgré nos différences. » Ses paroles et sa philosophie de transmission résonnent d’autant plus en ces temps de conflits durant lesquels il semble important de rappeler que cet espace-là existe, « et qu’il est précieux ».
« J’aime cette idée de mise en résonance de l’instant et des êtres les uns avec les autres. »
De cette idée découle le titre de son premier album réalisé en collaboration avec le dj Maxei, Resonance. « C’est une base de la métaphysique, tout dans l’univers n’est qu’émission et réception. Tant qu’une onde n’a pas trouvé un récepteur à partir du moment où elle est émise, elle peut traverser l’univers entier », nous apprend-elle. Membre récent de l’association Gattai, Maxei avait des sons dont il ne faisait pas usage, Chloé avait des textes laissés de côté depuis quelques années. L’alchimie entre les deux artistes et le naturel avec lequel leurs œuvres s’imbriquaient ne pouvaient aboutir qu’à un opus. « Maxei a une belle sensibilité dans la construction de sa musique. Il a son style en tant qu’artiste et producteur et des univers qu’il privilégie par rapport à sa personnalité, mais il est aussi très curieux, ce qui lui permet d’explorer d’autres champs et moi de poser ma voix sur des sonorités différentes. »
Dans un équilibre entre textes anciens, textes écrits pour des sons de Maxei et chants intuitifs, Resonance touche à l’universalité de l’être. Chacun des neuf morceaux représente une des nombreuses facettes de l’être humain. Avec le morceau « L’Autre » comme point de départ, Ountaneïa chemine dans cette diversité présente en chaque personne, « avec nos côtés sombres et nos chaos qu’il est important d’assumer et d’intégrer ». Portée par la musique de Maxei, sa voix s’écoute comme une guidance chantée sur des sonorités parfois rythmées, parfois envoûtantes. Ses textes mélancoliques à la note positive montrent une voie à suivre, celle qu’elle a choisi de suivre en tout cas. « Ses facettes négatives nous servent et nous nourrissent, il s’agit juste de savoir comment les canaliser, les intégrer et vers quoi on va avec elles. » Parmi les titres, « Mascarade » aborde les masques de l’ego que l’on porte tandis que « Rien à foutre » invite à suivre une belle ligne de conduite et pourrait être un hymne à l’acceptation de soi. « Resonance » et « Lune de feu », nés de chants intuitifs qui lui à cœur, puisent quant à eux dans ses sensibilités pour la world music.
Ountaneïa se balade dans les cultures comme elle se balade dans les langues. L’album se construit dans une alternance de français, anglais et italien et confirme son souhait d’universalité. « Le rythme des différentes langues me permet une autre exploration de ma propre voix. » Pour cet album, la chanteuse fait appel à celles qu’elle maîtrise, mais elle imagine déjà, dans un futur plus ou moins proche, des collaborations dans lesquelles elle pourrait expérimenter d’autres langues.
Une fois la connexion aux différentes facettes établie, la chanson « Ressens » conclut l’album dans une invitation à accueillir notre humanité dans son ensemble. Elle nous plonge ainsi dans une séance de sophrologie. Plus qu’une conclusion, une ouverture serait d’ailleurs plus adéquat. Dans l’ouverture musicale que proposent Ountaneïa et Maxei s’est construit une ouverture plus grande, sur les autres et soi. « La suite au prochain album », s’amuse Chloé en nous dévoilant par la même occasion l’avenir de ce duo. La dernière chanson amorce le fil conducteur du deuxième album : il s’intitulera Sensitif et prolongera leurs réflexions.
En attendant, il est possible de découvrir le premier live de Ountaneïa et Maxei ce samedi 9 mars 2024 à la soirée Trans’fusion, organisée au bar La Bonne Nouvelle de l’association Gattai dans le cadre de sa résidence de huit mois.