L’association HF+ Bretagne a dévoilé la 5e édition de son diagnostic sur les inégalités de genre dans les Arts et la Culture en Bretagne au cinéma Arvor, vendredi 29 septembre 2023. L’étude montre l’évolution de la représentation des femmes et des personnes issues des minorités de genre dans le secteur culturel breton. Qu’en est-il en 2023 ?
Un patchwork de photographies de femmes s’affichent sur un fond turquoise, le sourire aux lèvres, le regard à l’horizon. Qui sont-elles ? Baya, Sarah Maldoror, Marcel Moore ou encore Jo Manix. Ces femmes vous accompagneront dans votre lecture de l’édition 2023 du diagnostic sur les inégalités de genre dans les arts et la culture en Bretagne, réalisé par HF+ Bretagne. Depuis 2015, l’association rennaise publie une étude chiffrée afin d’éclairer objectivement les inégalités de genre persistantes dans les programmations et les métiers de la culture en Bretagne. En 2023, l’étude introduit pour la première fois le secteur du cinéma et de la muséologie, dressant un tableau de plus en plus complet de la situation.
HF+ Bretagne a recours à deux méthodologies : le comptage de données publiques (programmation des festivals, salles de concert et de spectacle, lieux d’art contemporain et musées) et la récolte de données auprès des lieux. L’implication des réseaux professionnels de Bretagne permet aussi de recueillir des chiffres de première main : a.c.b – art contemporain en Bretagne, AprèsMai, Bretagne en Scène(s), Collectif des festivals, Bretagne musées, Films en Bretagne et le service Bretagne Cinéma de la Région Bretagne. Des données ont aussi été transmises par la DRAC Bretagne, l’EESAB, l’école du TNB, le Pont Supérieur et Tamm-Kreiz.
Les données sont divisées entre les hommes, les femmes, les équipes mixtes et les personnes non-binaires. Car depuis 2021, l’association souhaite rendre le diagnostic plus inclusif en sortant de la binarité femme – homme. Raison pour laquelle HF Bretagne est d’ailleurs devenue HF+ Bretagne en cette année 2023. « Néanmoins, il peut être difficile de déclarer sa non-binarité sur son lieu de travail donc l’information n’est pas toujours présente en ligne et c’est difficile de l’identifier dans les programmations », précise Silvia Carboni, coprésidente de l’association.
Si des avancées sont constatées depuis le premier diagnostic, il y a 8 ans, le compte n’y est pas encore en termes de parité… Les chiffres prouvent que les inégalités perdurent et que le changement reste trop lent et modeste. Des progrès apparaissent dans toutes les disciplines artistiques du spectacle vivant depuis 2018, mais aucune discipline n’atteint 50 % de projets portés par des femmes. « La place est inversement proportionnelle à la visibilité et aux moyens. Plus la salle est grande et dotée, plus il y a d’hommes responsables artistiques », nous apprend Marie Parent, membre active d’HF+ Bretagne.
33% de femmes sont responsables artistiques d’un spectacle dans les salles labellisées contre 52% d’hommes. Dans les autres salles, la proportion est plus grande (39% contre 49%). Le seul endroit où elles sont majoritaires reste dans les spectacles à destination du jeune public (52%). « On sait qu’il y a moins de moyens et ça répond au stéréotype de genre qui voudrait que les femmes travaillent plus facilement sur la question de l’enfance. », poursuit-elle.
De la même manière, plus il y a de représentations, moins la part des femmes est haute…
En ce qui concerne les équipes permanentes des 46 structures membres de Bretagne en scène(s) qui ont répondu, les métiers restent encore très genrés.
Une écrasante présence des hommes dans la régie et la technique (43 hommes, 1 femme et 1 mixte) est constatée alors qu’ils ne se retrouvent plus que 3 en médiation et relation publiques (contre 36 femmes et 7 mixtes), 6 en communication (contre 36 et 5), et 6 en administration (contre 37 et 4). Les hommes seraient-ils moins doués en relationnel et en paperasse ? Les chiffres révèlent le même constat dans le cinéma, dans les sociétés de production et dans les équipes de films interrogées.
Dans le cinéma, le budget moyen d’un film réalisé par une femme est 21% plus faible que le budget moyen des films réalisés par des hommes (chiffre national). Dans les festivals de cinéma en Bretagne, sur 2043 films projetés, 40 % des films projetés sont l’œuvre d’une femme, 53 % sont réalisés par des hommes et 7 % par une équipe mixte. Par ailleurs, la proportion des femmes est plus grande dans le documentaire et révèle une problématique systémique dans le milieu culturel : la répartition genrée des budgets en fonction de la somme.
Dans les arts visuels, 73% des diplômé·es sont des femmes, mais dans les expositions collectives elles ne représentent que 23% des artistes exposé·es. Quant aux musées, sur 43 expositions, 68 % d’entre elles exposent le travail artistique ou l’histoire des hommes, 16 % le travail artistique ou l’histoire des femmes et 16 % des contenus mixtes.
Pour la première fois, HF+ Bretagne a souhaité faire une place aux violences sexistes et sexuelles et à tous les comportements que subissent les femmes sur leur lieu de travail, « un des socles des rapports de domination qui structurent notre société ». Contrairement aux autres données, l’association a essayé de voir ce qui était mis en place : protocole, personne référente, formation, affichages, etc. Mais en 2023, 58% des structures interrogées ne forment aucun·e salarié·e aux questions de violences sexistes et sexuelles.