Du 26 novembre au 6 décembre 2025, la médiathèque de Loudéac accueille l’exposition Białowieża, conçue par l’association Wild Bretagne et consacrée à la dernière grande forêt primaire d’Europe. À la frontière entre Pologne et Biélorussie, Białowieża est un sanctuaire où la nature règne sans intervention humaine. Un lieu où les arbres tombent et repoussent seuls, où les bisons errent encore, et où les mousses anciennes recouvrent les troncs comme une mémoire vivante.
L’exposition est gratuite et ouverte à tous. Elle présente huit tableaux mêlant peintures, photographies et récits de voyage, retraçant l’expédition d’un groupe d’amis bretons partis découvrir cette forêt millénaire. Un voyage initiatique qui a radicalement changé leur regard sur la forêt, la notion de sauvage et le rôle que l’humain peut — ou ne doit pas — y jouer.
En point d’orgue, le vendredi 5 décembre à 18h, le cinéma Quai des Images proposera la projection du film documentaire L’Appel sauvage, réalisé par Alexandre Patureau. D’une durée de 1h15 et déconseillé aux moins de 12 ans, le film mêle immersion sensorielle, images d’une rare intensité et prise de conscience écologique. La séance sera suivie d’un échange avec Sane Pasquet, membre de Wild Bretagne. Tarif : 5 € (4,50 € pour les moins de 14 ans).

Réensauvager la Bretagne : une idée radicale ou salutaire ?
Wild Bretagne, créée pour « faire éclore des forêts sauvages en Bretagne », œuvre pour l’achat de terrains voués à devenir des réserves en libre évolution : des forêts sans coupe, sans chasse, sans exploitation humaine. Sur son site, l’association rappelle qu’en France, seulement 0,14 % des forêts sont laissées en évolution libre, bien loin des 10 % recommandés par les scientifiques. En Bretagne, déjà l’une des régions les moins boisées de France (moins de 15 % du territoire), cette démarche est d’autant plus singulière.
Wild Bretagne a déjà protégé 3,4 hectares et œuvre à l’acquisition de 13,2 hectares supplémentaires. À Plouëc-du-Trieux, 1,8 ha de forêt ont été acquis grâce à une campagne de financement participatif. Ce sont des bouts de forêts voués à ne plus être exploités, transformés en biens communs pour tous les vivants. L’association défend l’idée que ces espaces sans intervention ne sont ni perdus ni “inutiles”, mais au contraire, des refuges écologiques essentiels, des réservoirs de biodiversité, des lieux de respiration pour la société.
Les bénéfices et les tensions d’un retour au sauvage
Réensauvager la Bretagne n’est pas une idée naïve. C’est un projet exigeant, parfois clivant. Le foncier est rare et cher ; les usages du territoire sont profondément ancrés. “Laisser faire la nature” demande du temps, de la pédagogie, et une acceptation culturelle de ce qui peut sembler désordonné : bois morts, chemins infranchissables, arbres couchés, retour des ronces et des champignons. Le sauvage ne s’exhibe pas : il se vit, il s’apprivoise autrement. Il bouscule les repères esthétiques et économiques.
Mais les bénéfices sont immenses. Ces forêts en libre évolution abritent une vie invisible et foisonnante. Elles nous obligent à ralentir, à observer, à revoir notre place. Elles incarnent une autre manière d’exister : non plus dominer le vivant, mais cohabiter avec lui. Elles sont peut-être, au fond, des promesses d’habitabilité dans un monde en crise.
Avec Białowieża et L’Appel sauvage, Wild Bretagne ne raconte pas seulement un ailleurs forestier. Elle trace, ici, en Bretagne, les lignes d’un possible : celui d’un monde moins pressé, moins productif, plus vivant.