CORONAVIRUS. PAS DE VACANCES POUR LES FRANÇAIS ET LA POLICE

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Coronavirus oblige, la vie culturelle est confinée. Unidivers s’en trouve marri. Alors notre rédaction étend sa couverture des actualités. Cette fin de semaine, ensoleillée, c’est la tentation de partir en vacances, contrecarrée par les mesures de confinement, qui tracasse nombre de Français. Et les forces de l’ordre. Car certains citoyens, notamment des Parisiens, sautent le pas de la déception et prennent la route au grand dam de l’intérêt collectif. Un dispositif imposant est déployé durant toute la fin de semaine afin d’enrayer ces velléités, compréhensibles mais illicites, de villégiature. L’esprit des représentants de la loi est plus à la pédagogie qu’à la sanction. Quelques amendes tombent cependant, en accompagnement d’une obligation de retour à l’adresse de départ. Coup de projecteur sur Saint-Malo et Dinard.

Pas de départ en vacances pendant le confinement !” Tel est l’impératif régulateur qu’il s’agit de marteler afin d’éviter une hémorragie sanitaire. En cette fin de semaine, alors que débutent les congés scolaires de la zone C, la lutte contre la propagation du Covid-19 et le respect des règles de confinement ont été renforcés par la préfète d’Ille-et-Vilaine et de la région Bretagne, Michèle Kirry. Elle a ainsi demandé aux forces de sécurité de renforcer leurs contrôles, de jour comme de nuit, sur tous les axes du département.

Tout contrevenant s’expose à une amende d’un montant de 135 € (qui peut être majorée à 375 €). En cas de récidive de cette violation (pour 2 violations en 15 jours), l’amende est de 200 € (qui peut être majorée à 450 €) et devient un délit puni de 6 mois d’emprisonnement et de 3750 € d’amende en cas de récidive de plus de 3 fois dans un délai de 30 jours.

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De g. à d. le policier scientifique toujours à l’affût, le sous-préfet Vincent Lagoguey, le directeur de la police municipale Patrice Poirier, le commissaire de la police nationale de Saint-Malo-Dinard Guillaume Catherine.

En ce qui concerne le territoire de Saint-Malo et Dinard, tous les services sont à pied d’oeuvre : police nationale, municipale, PAF, la compagnie 42 de CRS basée à Nantes ainsi qu’un équipage de la PJ de Rennes venu en renfort téléguider un drone sophistiqué afin de surveiller le littoral. Rendez-vous est donné pour un point de situation au rond-point du Grand Aquarium de Saint-Malo. Sur place, l’établissement est fermé, les stationnements désertés ; l’ensemble désole, non seulement d’un point de vue économique, mais également esthétique. Sur le parking, le sous-préfet de Saint-Malo, les maires de Saint-Malo et de Dinard, le commissaire de la PN et le directeur de la PM de Saint-Malo-Dinard règlent les derniers préparatifs.

Vincent Lagoguey, le sous-préfet de Saint-Malo, cheveux blancs et visage affable, nous révèle la carte des opérations : un vaste déploiement de forces de l’ordre sur toute la France. Pour la Bretagne et les Pays de la Loire, le péage de la Gravelle concentre l’attention, mais le dispositif essaime des zones tampons en Mayenne, à Rennes, Nantes et aux abords des principaux axes routiers et des pénétrantes des villes côtières. Pour l’heure, le dispositif de contrôle concentre son action sur la D137 – rond-point du Grand Aquarium, le quartier balnéaire (rue Kennedy notamment), le barrage de la Rance et la gare SNCF (contrôle PAF).

Guillaume Catherine, commissaire de la Police nationale, grand homme svelte à la puissance élégamment maîtrisée, explique de sa voix placide : “Les forces mobiles vont patrouiller jour et nuit. Car, si en début de semaine, les verbalisations étaient en baisse, elles repartent à la hausse. Deux points sensibles : les jeunes et les apéros. Le soleil aidant, après 15 jours enfermés, les ados ressortent pour se rencontrer, faire du skate, se rendre à des rendez-vous galants.” Chez ces jeunes personnes, souvent persuadées d’être immortelles, voire d’être naturellement immunisées, les tentations printanières semblent plus fortes que l’émission-réception des ordres collectifs. L’appel disruptif de la réjouissance est forte dans ce monde insaisissable qui devient depuis un bon mois de plus en plus étrange. Quant aux adultes, “ils partent en goguette à la suite d’apéros organisés sur les réseaux sociaux. Un peu pris de boisson, ils décident en début de soirée de sortir se promener, voire ils se retrouvent les uns chez les autres pour une “réunion cirrhose”.”

Constate-t-on une augmentation des violences conjugales ? Malgré le confinement et la prise d’alcool, voire de stupéfiants, Guillaume Catherine se montre rassurant. “Ce type de violence n’a que peu augmenté en Bretagne, au regard d’autres régions” (notamment le Sud de la France). D’ailleurs si le pourcentage semble en hausse, c’est aussi par contraste avec l’éventail habituel des délits qui a chuté vertigineusement à la suite du confinement.” Cela étant, le problème demeure : combien de femmes et mères trouveront le courage de prendre le risque de se rebeller contre les coups de leur mari alors que les jours à passer enfermés avec lui et avec leurs enfants risquent d’être encore longs ? Un fait de société désespérant auquel chacun – préfecture, police, gendarmerie et services sociaux – essaie de répondre au mieux, dans la limite de sa possibilité d’intervention.

Patrice Poirier, directeur de la Police municipale et homme à la puissance ancrée dans le sol, contribue à l’échelon local à sécuriser les pénétrantes. “Même si certains connaissent les chemins de traverse pour arriver à bon port” nous confie-t-il. Qu’en est-il du moral de son équipe de 18 agents ? “Un peu sur les rotules. Mais ça va. La population est calme, très stable, plutôt âgée. Quasiment tout le monde respecte les consignes. Les sorties sont supérieures à la normale, les agents fatigués, mais jamais ils n’auront reçu autant de remerciements de la part de la population. Vous savez, la place du policier municipal n’est pas toujours facile à trouver dans l’organisation du maintien de l’ordre en France. Mon équipe est tellement fière de contribuer à l’effort collectif dans cette difficile période. C’est un moment où la valeur et l’utilité des missions locales reprennent tout leur sens. L’équipe s’en trouve encore plus soudée.” Il est vrai que tant de missions de service public et les agents qui les remplissent ne sont parfois pas estimés à leur juste valeur. Le président Macron a promis des changements après le confinement. Espérons qu’ils aient bien lieu.

Quant au maire de Saint-Malo, le jovial quasi retraité Claude Renoult, il a noté également une recrudescence de promeneurs en t-shirt depuis deux jours. “C’est pourquoi j’ai décidé d’interdire l’accès au rempart tant la tentation de s’y promener s’exacerbait.” Certains Malouins ne cachent pas leur surprise, les remparts leur paraissant que peu fréquentés depuis deux semaines.

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Claude Renoult, maire de Saint-Malo

Pourquoi continuer à fliquer la population ? “Tout simplement, car cela fonctionne – répond Vincent Lagoguey – La maladie semble endiguée. Oui, l’objectif est faire passer le message : pas de transhumance ! Pas de brassage afin de contenir la propagation du coronavirus.” Les forces de l’ordre sont soudées dans la crise (bien que les traditionnelles guéguerres entre services affleurent de loin en loin au fil des échanges). Les policiers relaient avec calme et pédagogie le message de l’État : la victoire contre le coronavirus réclame une responsabilité tout à la fois individuelle et collective.

Au demeurant, les individus récalcitrants sont rares. Moins de 1 personne sur 100, assurent les policiers interrogés. “Il y a quelques têtes de cochons qui vous expliquent la vie, mais, somme toute, peu…” Puis il y a les justifications farfelues : “Trois personnes controlées en voiture, sans aucun justificatif dérogatoire, ont expliqué qu’elles revenaient de faire des courses. – Où sont-elles ces courses ? – On les a mangées…” Chacune des trois a écopé d’une amende…

Aujourd’hui, plusieurs automobilistes se voient infliger une amende assortie d’une obligation de faire demi-tour. Une automobiliste arrivée de la région nantaise en fait les frais alors qu’elle était à deux pas de sa résidence secondaire : “Non, Madame, vous n’êtes pas autorisée en ce moment à venir vérifier que tout va bien dans votre maison secondaire.

De même pour ces deux réfugiés afghans domiciliés à Lourdes qui venaient, selon leurs dires, de déménager à Saint-Malo mais n’avaient pas encore fait leur changement d’adresse… Les policiers leur imposent manu militari de reprendre le train en sens inverse. Direction Rennes.

Finissons par une note d’agréable légèreté dans un moment où l’anxiété demeure intense et diffuse. Finissons avec le portrait d’Aude. 23 ans, sourire gracile, un peu gênée, toute mimi et ingénue dans ce grand costume encore mal adaptée à sa jeune stature. Aude est “élève gardien”. Après une première séquence de 3 ans à l’école de police de Brest, elle est arrivée en septembre à l’école de Saint-Malo.

Pourquoi et comment a-t-elle choisi d’embrasser cette carrière ? “Je n’ai personne dans ma famille dans les forces de l’ordre, et ce n’est pas du tout une vocation.” Ben alors, c’est quoi ? “J’ai toujours aimé le sport et le droit. C’est à travers Internet et les réseaux sociaux que j’ai découvert et compris le rôle et les missions des policiers. Un jour, j’ai compris que ce que je voulais, c’est défendre les valeurs de notre État de droit.” Comme quoi, la relève est assurée ! Avec une diversité de profils. Et gageons qu’Aude se rappelle toute sa vie de cette drôle d’année d’école qui doit se conclure au mois d’août prochain par sa titularisation.

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Nicolas Roberti
Nicolas Roberti est passionné par toutes les formes d'expression culturelle. Docteur de l'Ecole pratique des Hautes Etudes, il a créé en 2011 le magazine Unidivers dont il dirige la rédaction.

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