C’était un campement discret. Depuis le 9 juillet, sept jeunes filles originaires d’Afrique de l’Ouest et centrale avaient installé leurs tentes dans le square Joseph-Loth, à quelques pas de l’antenne du musée des Beaux-Arts de Rennes. À leurs côtés, des bénévoles de l’association Utopia 56, engagés de longue date dans la défense des personnes exilées. Leur objectif : alerter sur l’absence de prise en charge de ces adolescentes qui se déclarent mineures non accompagnées (MNA), mais dont la minorité n’a pas été reconnue par les autorités françaises.
Une jeunesse en suspens
Les jeunes filles sont originaires d’Angola et de République démocratique du Congo. Elles ont fui des contextes familiaux et politiques instables, traversé plusieurs pays et continents, et sont arrivées seules en France, souvent au terme d’un parcours migratoire long et dangereux. « On n’est pas venues ici pour devenir des filles de la rue », confiait l’une d’elles à France 3 Bretagne, les larmes aux yeux.
Elles affirment être âgées de 16 à 17 ans, mais leur examen et leur demande de reconnaissance comme MNA ont été rejetées ou sont encore en cours d’évaluation. En attendant une décision, aucune prise en charge n’est assurée par le Département, lequel est compétent en matière de protection de l’enfance. A défaut de place dans le dispositif d’urgence, ces jeunes dorment dehors depuis plusieurs semaines.
Un campement pour ne pas disparaître
L’installation des tentes dans le square Joseph-Loth, dès le 9 juillet, n’avait rien d’un geste de confort. Il s’agissait d’un acte politique, soutenu par les militants d’Utopia, pour rendre visible l’invisible. « Elles survivaient auparavant dispersées dans les parcs rennais, parfois sans tente, sous des arbres », explique Fabien, salarié de l’association. Le square, modeste jardin enclavé dans le centre-ville, est rapidement devenu un point de ralliement pour les bénévoles, riverains solidaires, et médias alertés. Le 10 juillet, des élus municipaux se sont rendus sur place. Une demande d’audience a été formulée à la préfecture. Le 12, une manifestation de soutien a rassemblé une cinquantaine de personnes.
Une prise en charge, mais temporaire
Hier, le 16 juillet, après une semaine de campement, une solution d’hébergement temporaire a enfin été proposée par les services de l’État. Les sept jeunes filles ont pu quitter les tentes pour un logement d’urgence à Rennes, dans l’attente d’une nouvelle évaluation de leur situation administrative et médicale. Si cette décision a été saluée comme un soulagement, elle ne constitue pas une reconnaissance de leur statut de mineure ni un engagement de long terme.
Comme pour de nombreux jeunes exilés en France, les tests d’évaluation de l’âge, fondés sur des examens médicaux qui ne sont pas totalement fiables, conduisent régulièrement à des refus de reconnaissance. Une fois déclarés « majeurs », ces jeunes sont exclus de toute protection de l’enfance et se retrouvent à la rue, livrés à eux-mêmes.
Selon les données d’Utopia, plus de 200 personnes campaient en juillet dans des parcs rennais, notamment à Maurepas. Parmi elles, plusieurs dizaines de jeunes migrants isolés, souvent mineurs de fait, mais contestés en droit.
