Rennes va se doter d’une Réserve Communale de Sécurité Civile pour répondre aux crises

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Réserve communale de Sécurité Civile
Réserve communale de Sécurité Civile – Ville d'Inzinzac-Lochrist

Inondations, tempêtes, vagues de chaleur, ruptures d’approvisionnement ou pandémie : depuis plusieurs années, les crises s’enchaînent, parfois se chevauchent. Et toujours, ce sont les communes qui font face les premières. Rennes entend désormais ne plus être prise au dépourvu. Comment ? En créant une Réserve Communale de Sécurité Civile. Une force de proximité, humaine solidaire et bénévole, prête à agir aux côtés des services publics lorsque le réel vacille. La création de la RCSC de Rennes sera mis au vote au conseil municipal du lundi 30 juin. 

Des mains tendues, quand le sol se dérobe

Lorsque le vent se lève, que l’eau monte ou que les réseaux lâchent, il ne suffit pas de déclencher une alerte ou d’attendre les renforts. Il faut être là. À l’école où les enfants sont coincés, chez la vieille dame dont les volets claquent, au carrefour où les lampadaires clignotent. Il faut des bras pour porter, des voix pour rassurer, des relais pour transmettre. C’est cette présence civique, humble et concrète, que veut structurer la commune à travers la création de sa Réserve Communale de Sécurité Civile (RCSC).

Un projet de terrain, pensé à hauteur d’habitant

À l’origine de cette initiative, Cyrille Morel, élu municipal engagé sur les questions de sécurité et de prévention. Le constat est simple : les crises se multiplient, et les moyens techniques, aussi performants soient-ils, ne remplaceront jamais l’intelligence collective ni l’engagement de proximité. Les ville a besoin de femmes et d’hommes prêts à se mobiliser, dans leur rue, leur quartier, pour leur ville. Pas une armée, mais un réseau de volontaires. Pas des sauveteurs, mais des soutiens. Des gens du coin, formés, disponibles, réactifs, capables de mettre de l’humain là où la logistique seule ne suffit plus.

Concrètement, qu’est-ce qu’une réserve communale ?

Instaurées par la loi de 2004 sur la modernisation de la sécurité civile, les RCSC offrent aux communes un levier souple et réactif pour faire face à des situations exceptionnelles. Elles ne remplacent pas les pompiers ou les forces de l’ordre : elles les épaulent, selon les besoins.

Les missions sont variées :

  • distribuer de l’eau ou des repas en cas de rupture d’approvisionnement,
  • installer un centre d’accueil pour les sinistrés,
  • aller chercher une personne isolée,
  • informer la population en cas de coupure de réseau,
  • vérifier la sécurité autour d’une école ou d’un EHPAD.

Et surtout : écouter, rassurer, expliquer, faire le lien. En temps de crise, ce sont souvent les gestes simples qui sauvent des vies.

Un engagement ouvert à tous, encadré et formateur

Dans les semaines à venir, la municipalité lancera un appel à volontaires. Tous les habitants de plus de 18 ans pourront candidater, sans exigence de diplôme ni condition physique particulière – sauf contre-indications pour certaines tâches. L’envie d’être utile, la connaissance du quartier, la fiabilité : voilà ce qui compte.

Chaque réserviste recevra une formation de base, en partenariat avec le SDIS 35 (pompiers d’Ille-et-Vilaine) : alerte, sécurité, premiers secours, organisation logistique. Des exercices grandeur nature viendront compléter le dispositif. L’objectif : ne pas être novice quand l’imprévu surgit.

Un maillon humain dans une stratégie de résilience

La création de la RCSC s’inscrit dans un cadre plus large : celui du Plan Communal de Sauvegarde, en cours de mise à jour. Elle vient aussi compléter les Plans Individuels de Mise en Sûreté, distribués aux familles et aux personnes vulnérables. On ne protège pas une population uniquement avec des arrêtés. On la protège en la rendant actrice, consciente, responsable. Cette réserve, c’est aussi un acte de confiance envers les habitants.

Et demain ? Vers une solidarité intercommunale

La loi du 3 avril 2025, tout juste adoptée, ouvre de nouvelles perspectives : mutualisation entre communes, création de réserves intercommunales, reconnaissance accrue du statut de réserviste. Ce projet local s’inscrit donc dans une dynamique nationale, à la croisée de l’engagement citoyen et de la modernisation de la sécurité civile.

La Réserve Communale de Sécurité Civile, ce n’est pas un uniforme ni un gyrophare. C’est une main sur une épaule, un mot au bon moment, un thermos de café dans un centre d’hébergement, un numéro qui répond. C’est cette présence familière, immédiate, rassurante, quand tout le reste semble instable.

reserve communale securite civile

Ce que font déjà les RCSC ailleurs en France : leçons du réel

La Réserve Communale de Sécurité Civile n’est pas un dispositif théorique. Partout où elle est active, elle a déjà fait ses preuves. Deux exemples récents témoignent de son utilité concrète, de sa souplesse, et surtout de son visage profondément humain.

Inondations dans les Landes – novembre 2023 : la RCSC de Saint-Sever au cœur de la solidarité

Quand la Midouze est sortie de son lit après trois jours de pluies intenses, la petite ville de Saint-Sever (Landes) s’est retrouvée partiellement isolée, avec des rues transformées en ruisseaux et plusieurs dizaines d’habitants évacués. Avant même l’arrivée des renforts extérieurs, la Réserve Communale a été déployée.

« Les pompiers faisaient les sauvetages, mais nous, on a installé les cots dans le gymnase, porté les couvertures, préparé les repas, et surtout, on restait discuter avec les gens. C’est ce qu’ils voulaient : parler », témoigne Philippe, retraité et réserviste depuis 2021.

Une dizaine de bénévoles ont aussi tenu un point d’information de quartier, rassuré les commerçants inquiets pour leurs stocks, et effectué des rondes de surveillance pendant la nuit.

Canicule dans la vallée du Rhône – août 2022 : les visites bienveillantes de la RCSC de Bollène

Lors de la canicule prolongée de l’été 2022, la ville de Bollène (Vaucluse) a activé sa RCSC pour rendre visite chaque matin aux personnes âgées isolées. Une soixantaine de foyers avaient été identifiés comme vulnérables via le registre communal.

« Mon fils vit à Marseille, je suis seule. Quand les réservistes passaient à 9h avec un sourire, une bouteille d’eau fraîche et même un mot croisé parfois, ça m’aidait à tenir », confie Mme Bréand, 86 ans.

Les réservistes ont également installé un point fraîcheur dans une salle municipale, distribué des brumisateurs, et tenu une permanence téléphonique pour toute personne en détresse.

Ces expériences montrent que la RCSC ne se limite pas à des crises spectaculaires. Elle agit dans le silence des gestes utiles, souvent là où les grandes structures ne peuvent pas intervenir. Des gestes modestes, mais essentiels, surtout quand le quotidien bascule.