De mèche avec l’association Solid’hair, Style & création est un des deux salons de coiffures de Rennes qui collecte des dons de cheveux pour venir en aide aux personnes atteintes de cancer. Intrigué par la démarche, Unidivers envoie sur les lieux un journaliste-cobaye chevelu qui avait bien besoin de se rafraîchir la nuque… Retour en vidéo sur notre rencontre avec Fabrice, prothésiste capillaire.
Vidéo : Bastien Michel
Musique : Antoine, « Les Élucubrations d’Antoine », label Vogue, 1966.
ET
KAUNE, « What’s Going On », 2019, d’après Marvin Gaye
En bref
Créée en mars 2015, l’association Solid’hair est déjà venue en aide à plus de 400 personnes atteintes de cancer et en difficultés financières.
Elle suit l’exemple de Coupe d’éclat, en Belgique, qui, depuis sa fondation en 2008, a fait bénéficier plus de 5 000 personnes d’une aide financière en vue de l’acquisition d’une perruque.
Palliatif de la chute des cheveux qui accompagne les traitements de chimiothérapie, la perruque, en sauvegardant l’estime de soi du malade, a une valeur thérapeutique indirecte mais certaine. Actuellement, la prise en charge d’une prothèse capillaire par la Sécurité sociale est de 125 €. Mais il faut compter plus de 400 € pour l’acquisition d’une perruque de qualité, nous dit Fabrice, et un simple coup d’œil sur les sites dédiés suffit à voir que les prix grimpent rapidement autour des 600, 800, voire 1 000 €. L’objectif des associations Solid’hair et Coupe d’éclat est d’apporter une aide financière qui serve de complément aux personnes nécessiteuses.
Outre les personnes aidées directement, leur action semble porter ses fruits puisque Fabrice de Style et Création nous annonce que la prise en charge par la Sécu sera prochainement majorée pour certaines perruques.
Renseignez-vous sur la façon d’obtenir une aide financière en cliquant ici.
Modalités de don
Solid’hair a développé un réseau de plus de 1 000 salons de coiffure partenaires ou dépositaires.
Les coiffeurs dépositaires recueillent les mèches de cheveux coupées par vos soins pour les envoyer à l’association. La mèche doit faire au moins 25 cm sur toute la longueur.
Chez les coiffeurs partenaires, on délimite et découpe les mèches à donner, puis on assure la coupe habituelle des cheveux. Les partenaires s’engagent à offrir une réduction sur la coupe. Chez Style & Création à Rennes, tous les donneurs bénéficient du tarif étudiant.
Une dernière modalité consiste à faire un don financier direct sur le site de l’association.
Et après ? Un processus capillotracté
Après le don, les mèches de cheveux sont envoyées à l’association Solid’hair. Elles sont triées par des bénévoles avant d’être vendues à des perruquiers. Ces derniers fabriquent les perruques, ou plutôt les font fabriquer, en grande majorité dans des usines en Asie, nous confie Fabrice, pour les revendre ensuite… à des prothésistes capillaires comme Fabrice ! C’est dire qu’en partant du particulier solidaire, les cheveux passent par l’implication associative pour finir dans un circuit commercial qui traite le don comme une matière première, du cheveu acheté au kilo et revendu à prix d’or, parfois à des personnes obligées de faire une demande d’aide financière à Solid’hair pour se le procurer.
C’est là que le bât blesse. L’absence de manufacture de perruques en France (due au coût de la main d’oeuvre par rapport au temps de travail) empêche les circuits courts de se développer. La rareté du cheveu européen en fait une marchandise de luxe… on ne sait pas trop ce que ça sent, mais en tout cas ça pue !
De plus, il n’est pas dit que les cheveux donnés servent un jour directement à des personnes ayant suivi une chimiothérapie. Même si Fabrice explique que les perruques en cheveux naturels sont prisées des jeunes filles atteintes de cancer et particulièrement affectées par la perte de leur chevelure, le prothésiste capillaire la déconseille aux malades. Le cheveu naturel doit être coiffé, contrairement au cheveu synthétique qui reprend forme après lavage. Or, le simple geste de lever le bras pour se coiffer devient vite une torture pour quelqu’un subissant un gonflement inflammatoire des ganglions. La vieille injonction selon laquelle il faut souffrir pour être beau, et plus encore pour être belle, a le cuir chevelu épais !
Conclusions perplexes en forme de point d’interrogation face aux enjeux du monde contemporain
Mais où vont donc finir vos cheveux ? La question reste complète, la réponse insondable, elle hante encore votre journaliste cobaye, faisant dresser sur sa tête ce qui lui reste de cheveux après un don moyen de 29 cm, châtain, plutôt fin, mi-gras, ça se conserve mieux apparemment.
Couronneront-ils le front d’une reine des nuits hollywoodiennes ne manquant pas de toupet ? Orneront-ils le sommet vacant d’un nouveau riche Brésilien aspirant à ne pas perdre le respect et l’admiration de ses subordonnés et partenaires d’affaires et à s’assurer ainsi que ses actions en bourse ne chuteront jamais aussi vite que ses propres cheveux ?
Il n’en demeure pas moins que, depuis 2015, plus de 400 personnes en France atteintes de cancer ont vu leur quotidien s’améliorer grâce aux aides versées par l’association Solid’hair…
Quelle ne fut pas notre surprise en nous rendant compte que faire don de ses cheveux suffit pour réaliser à quel point la société globalisée telle qu’on la connaît aujourd’hui complexifie la moindre des valeurs, y compris une des plus fondamentales, la solidarité.
Association Solid’hair