Rinaldo de Haendel à l’opéra de Rennes pour sa dernière représentation

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Rinaldo Haendel
Rinaldo/ Haendel Opera de Rennes Septembre 2021

Donné la dernière fois en septembre 2021, l’opéra Rinaldo de G. F. Haendel fut un véritable succès populaire et nous en étions devenus de fervents admirateurs. Ce 30 août 2025, les choses furent un peu différentes, mais laissez-nous vous conter par le menu le chaotique déroulé de cette journée vraiment pas ordinaire.

Ce qu’il vous faut savoir, c’est que le spectacle de rentrée devait être donné en extérieur, dans le très beau lieu qu’est l’écomusée de la Bintinais. Seulement voilà, nous sommes en Bretagne et parfois le climat peut jouer quelques mauvais tours.

Si, la veille, la générale s’était déroulée à peu près sans accrocs, dès samedi matin il apparaissait très clairement qu’il ne serait pas possible de renouveler ce petit exploit. Le déroulé de la soirée démontra de toute évidence qu’une décision très sage avait été prise par Matthieu Rietzler et, partant, qu’une possible catastrophe avait été évitée.

Face à cela, une dure réalité s’est imposée, et en l’espace d’une journée il a fallu transporter à la maison mère tous les éléments de scénographie, les machines, les décors, les costumes, les chevalets… La liste est si longue qu’elle en serait vite fastidieuse, pourtant cet exploit invisible, l’ensemble des personnels et des intermittents du spectacle l’a réalisé et, par ce travail acharné, a permis que Rinaldo soit donné dans les meilleures conditions. Qu’il nous soit donc permis de leur dire toute notre reconnaissance. Les plus humbles, les obscurs, ceux que par obligation on vêt de noir pour être encore plus invisibles, qu’ils soient ce jour mis en pleine lumière. Les applaudissements nourris d’un public debout et émerveillé à la fin de la représentation, ils en ont mérité une large part.

C’est donc sur la scène que chanteurs et musiciens se sont retrouvés, faute de pouvoir utiliser la fosse d’orchestre. Il a bien sûr fallu réduire drastiquement la voilure, mais l’adresse de la metteuse en scène Claire Dancoisne, son utilisation judicieuse de tous les espaces, tout a contribué à faire oublier la suppression de quelques machines et éléments d’animation que nous avions appréciés en 2021.

Rinaldo Haendel
Rinaldo / Haendel – Opéra de Rennes, septembre 2021 © Laurent Guizard

Autre élément informel mais qui a eu son importance, le fait que ce soit la dernière a contribué à installer une certaine spontanéité, particulièrement de la part des interprètes, qui nous ont paru heureux de chanter ensemble et ont donné une prestation aussi énergique qu’authentique.

S’ils sont tous à égalité, rien n’empêche d’avoir de petits coups de cœur et, à ce jeu, c’est Maylis de Villoutrey qui emporte la palme. Son interprétation pudique et émouvante de l’air rendu fameux par le film Farinelli, « Lascia ch’io pianga », lui attire immanquablement les faveurs de l’assistance. Pourtant Paul Figuier, contre-ténor, en Rinaldo ne manque pas de brio, il en est de même pour Mathilde Ortscheidt en Goffredo. Sacré couple également que celui formé par l’excellent baryton-basse Damien Pass en Argante, le furieux guerrier pourtant si près de faiblir lorsqu’il tombe amoureux, et, de l’autre côté, la méphitique Camila Poul, plus méchante que nature au point que c’en est délicieux.

Adressons également un salut amical à Rita Tchenko, Gaëlle Fraysse et Henry Botte qui, sans faiblir, se transforment en soldats, en monstres, en animateurs de machines et sont présents sur scène quasiment non-stop. Très beau travail également que celui proposé par l’ensemble « Le Caravansérail », sous la main experte de Bertrand Cuiller : la couleur musicale, aux accents baroques, est un véritable bonheur.

Rinaldo Haendel
Rinaldo / Haendel – Opéra de Rennes, septembre 2021

Voilà, vous savez tout. Ce qui aurait pu être une Bérézina s’est transformé en éclatante victoire parce qu’un chef a su fédérer sa troupe et lui inspirer l’envie de s’investir au-delà d’un horaire ou d’une fonction. Aussi la seule conclusion acceptable sera d’adresser à l’équipe de l’Opéra de Rennes, dans son intégralité, toute notre reconnaissance.

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