Elle habillait la reine comme personne, inventait des robes qui faisaient scandale ou sensation dans toute l’Europe, et osa imposer son génie dans un univers réservé aux hommes. Rose Bertin, première « ministre des Modes », revient à la lumière grâce à l’ouvrage d’Audrey Millet, qui ressuscite le destin flamboyant de cette pionnière de la haute couture.
Rose Bertin, la modiste de Marie-Antoinette, le nouvel ouvrage d’Audrey Millet, parait le 23 octobre 2025 aux Éditions Tallandier. L’historienne y plonge le lecteur dans l’univers fascinant de Rose Bertin (1747-1813), créatrice visionnaire qui bouleversa les codes vestimentaires de l’Ancien Régime et accompagna Marie-Antoinette jusque dans ses ultimes heures.
Figure oubliée de l’histoire, Rose Bertin a pourtant marqué de son empreinte l’évolution de la mode en France. Bien avant l’invention de la haute couture au XIXe siècle, elle en jeta les bases en transformant l’art de s’habiller en un langage politique, social et esthétique. Dans son livre, Audrey Millet retrace le destin exceptionnel de cette pionnière, sa relation intime avec la reine de France et l’influence qu’elle exerça dans toutes les cours d’Europe. Par son talent et sa créativité, Bertin devint ce que l’on surnomma très vite la « ministre des Modes ».

Née le 3 juillet 1747 à Abbeville, dans la Somme, fille d’un cavalier de la maréchaussée et d’une garde-malade, Rose Bertin débute modestement comme fileuse dans une manufacture de draps. Mais dès l’âge de seize ans, elle part à Paris, où elle entre comme modiste chez Trait Galant, maison réputée de la capitale. Chargée des livraisons, elle y découvre l’univers raffiné de l’aristocratie et se forge un réseau précieux. Très vite, son sens du détail et de l’élégance lui permettent de s’émanciper.
En 1770, elle ouvre son propre magasin, Le Grand Mogol, dans l’actuel 8ᵉ arrondissement de Paris. Sa boutique devient rapidement un lieu incontournable pour la noblesse. Elle y emploie bientôt une trentaine de personnes et collabore avec une centaine de fournisseurs. Rose Bertin invente une nouvelle grammaire de la mode : elle allège les silhouettes avec des paniers plus souples, popularise la mode champêtre avec les robes en mousseline, et crée même des robes de grossesse — autant d’innovations audacieuses qui marquent une rupture avec l’étiquette rigide de Versailles.


C’est par l’entremise de Marie-Adélaïde de Bourbon, duchesse de Chartres, que Rose Bertin rencontre la dauphine Marie-Antoinette en 1774. Cette rencontre bouleverse sa vie. La reine, passionnée de mode, trouve en elle une alliée précieuse et lui commande ses tenues deux fois par semaine. Leur complicité scandalise certains : non seulement Bertin est issue d’un milieu modeste, mais les métiers de conception étaient encore largement dominés par des hommes. L’audace de cette roturière nourrit jalousies et critiques, mais elle impose son style. Ses créations — coiffures extravagantes et robes aux noms évocateurs (la Belle Poule, la Montgolfier, la Philadelphie) — se répandent dans toutes les cours d’Europe. Catherine II de Russie elle-même salue son talent dans sa correspondance.

Mais le faste des modes de Versailles ne résiste pas aux bouleversements révolutionnaires. Bertin demeure fidèle à Marie-Antoinette qu’elle habille encore lorsqu’elle est emprisonnée. Ses dernières tenues accompagneront la reine jusque dans sa chute, le 16 octobre 1793, jour de son exécution. La modiste s’exile alors à Londres pour échapper à la Terreur, avant de revenir à Paris en 1795. Elle vit ses dernières années à Épinay-sur-Seine et meurt oubliée en 1813 en laissant pourtant une trace indélébile dans l’histoire de la mode.
Audrey Millet rappelle combien Rose Bertin fut une pionnière : elle transforma l’artisanat en art, fit du vêtement un instrument de pouvoir et imposa l’idée que la mode pouvait être une force culturelle mondiale. Son parcours raconte à la fois l’ascension fulgurante d’une femme de talent et les fragilités d’un destin lié aux caprices de l’histoire.
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Audrey Millet, historienne née en 1981, est spécialiste de l’histoire de la mode et du travail. Docteure en histoire et lettres, elle enseigne à Paris, Florence et Oslo. Auteure reconnue, elle a publié des ouvrages remarqués comme Le Livre noir de la mode (2021), dénonciation des dérives sociales et environnementales de l’industrie textile, ou encore Les dessous du maillot de bain (2022), réflexion sur les rapports entre émancipation féminine et normes esthétiques. Ses travaux, traduits dans plusieurs langues, l’ont imposée comme une voix critique et engagée sur les enjeux contemporains de la mode.

Dans ses ouvrages récents, Woke washing (2023) ou L’Odyssée d’Abdoul (2024), elle explore les tensions entre consommation, luttes sociales et dérives mondiales. Son regard sur Rose Bertin éclaire donc autant le XVIIIe siècle que notre époque, en mettant en perspective les origines d’une industrie toujours traversée par des enjeux de pouvoir, de désir et de domination.
Rencontre-dédicace avec Audrey Millet : le 25 octobre 2025 à 15h à la Librairie des Princes, au château de Versailles. Une occasion unique d’échanger avec l’historienne autour de la mode, de l’histoire et du destin fascinant de Rose Bertin.
Entrée libre (réservation conseillée). Possibilité de précommander l’ouvrage et de demander une dédicace personnalisée.

Informations et réservations : 01 30 97 71 11
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Pourquoi lire Rose Bertin, la modiste de Marie-Antoinette ?
- Un portrait de femme hors du commun : Rose Bertin incarne l’ascension sociale par le talent et l’audace dans une société encore corsetée par les hiérarchies.
- La naissance de la haute couture : comment une modiste transforma l’art de s’habiller en langage de pouvoir et en art à part entière.
- Une plongée dans l’histoire : Versailles, l’Europe des Lumières, la Révolution… la mode y apparaît comme un miroir des bouleversements politiques et sociaux.
- Un écho contemporain : les analyses d’Audrey Millet rappellent que les enjeux de la mode – féminisme, consommation, inégalités – résonnent toujours avec notre époque.
