La Société des Amis de Louis Guilloux à Saint-Brieuc dans les Côtes d’Armor organise pour le public des visites de la maison où vivait l’écrivain breton Louis Guilloux (1899-1980). Elle dévoile l’histoire de la maison et propose de découvrir le parcours, les œuvres et les richesses personnelles de l’écrivain, à raison de une à deux fois par mois.
La maison de l’écrivain Louis Guilloux ouvre ses portes au public un après-midi ou deux par mois. Cette petite maison bourgeoise en pierres de pays, Louis Guilloux l’a faite construire pour y emménager avec sa femme Renée à l’endroit, où à l’époque, il n’y avait que des champs. Les visiteurs découvrent son bureau, installé au dernier étage de sa maison familiale. Ils pénètrent dans l’intimité de l’auteur à travers sa bibliothèque, des objets, des portraits et de nombreux documents personnels. La visite est guidée et commentée par les membres de la Société des Amis de Louis Guilloux. C’est dans ce bureau que flotte le souvenir d’autres écrivains car Louis Guilloux a accueilli certains d’entre eux au cours de la période de l’entre-deux-guerres, comme André Malraux, fasciné par le travail de Louis Guilloux, quand ce dernier écrit le roman Le Sang noir en 1935.
La visite raconte aussi l’histoire de la maison de Louis Guilloux dans laquelle, au cours de la Seconde Guerre mondiale en 1943, se déroule une réunion importante pour la résistance en Côtes d’Armor : la création du comité départemental de la résistance. Elle évoque aussi le passage d’Hélène Le Chevalier, une jeune résistante communiste que l’écrivain accepte d’accueillir, mais qui hélas sera arrêtée. La jeune fille prendra les traits de Monique, l’héroïne dans le livre de Louis Guilloux intitulé Le Jeu de Patience, où l’arrestation est relatée. Le livre a été publié en septembre 1949 aux éditions Gallimard.
La maison de Louis Guilloux est aussi le témoin des visites du peintre et poète quimpérois Max Jacob qui, à plusieurs reprises, a séjourné dans la demeure de Louis Guilloux, tout comme Albert Camus avec lequel une belle amitié s’était nouée. Les deux hommes partageaient la même expérience de l’injustice. Albert Camus a d’ailleurs séjourné dans la maison de son hôte en 1947 et a découvert à cette occasion la tombe de Lucien Camus, son père, tué au début de la première guerre mondiale en octobre 1914 et qui repose dans le carré militaire du cimetière Saint-Michel à Saint-Brieuc : cimetière visible d’ailleurs de la fenêtre du bureau de Louis Guilloux.
Au décès de Louis Guilloux, le 14 octobre 1980, sa maison est achetée par la Ville de Saint-Brieuc. Aujourd’hui, elle est la Maison du Peuple et fait désormais partie du réseau « Maison des Illustres », label décerné par le Ministère de la Culture et de la Communication.
En parallèle des témoignages autour de la maison, La Société des Amis de Louis Guilloux raconte aux visiteurs la vie de l’écrivain qui, profondément marqué par la Grande guerre, a été désigné comme le romancier de la douleur :
Louis Guilloux vient au monde le 15 janvier 1899 à Saint-Brieuc au sein d’une famille modeste ayant déjà deux filles et où le père est militant socialiste et cordonnier de profession ; la mère est modiste. Il va à l’école et dès la sixième au lycée de Saint-Brieuc, aujourd’hui le collège Anatole Le Braz, il se passionne pour la langue anglaise. Sa santé est fragile, il souffre d’une sorte de tuberculose osseuse lui laissant une main gauche légèrement déformée qui ne lui permet pas de choisir un métier manuel. En 1916, il obtient un poste de surveillant d’internat. Il aspire à être écrivain, mais échoue au baccalauréat.
Sa formation intellectuelle n’est donc pas académique, mais prend source dans la curiosité de ses lectures, celles de Blaise Pascal (philosophe et théologien du XVIIe), de l’écrivain et poète allemand Friedrich Nietzsche (1844-1900), de Charles Péguy (1873-1914), de Marcel Proust (1871-1922) de Romain Rolland (1866-1944) et du journaliste et homme politique Jules Vallès (1832-1885). Il fait aussi des rencontres déterminantes avec le philosophe, sociologue Georges Palante (1852-1925) qui est aussi son professeur et en 1917 avec l’écrivain français Jean Grenier (1898-1971), qu’il croise à la bibliothèque de Saint-Brieuc. Louis Guilloux est témoin pendant la guerre de l’arrivée des longues files de soldats blessés au lycée de Saint-Brieuc qui devient un hôpital. Il s’enracine dans cette vision du mal, une thématique qui va le conduire et l’influencer dans ses romans.
Après la guerre, il monte à Paris, bien décidé à être écrivain. Après avoir exercé des petits emplois comme employé de bureau ou colporteur, il écrit des articles pour des journaux parisiens dès 1921. L’année suivante il rentre à la rédaction du grand quotidien de droite l’Intransigeant, au service de la traduction de la presse anglaise.
En 1923, il écrit son premier roman, L’Indésirable, qui a pour décor une ville de l’arrière pendant la guerre de 14-18. Mais le roman demeure inédit de son vivant et ne sera édité qu’en 2019. Louis Guilloux fréquente les réunions littéraires de son ami historien Daniel Halévy où participent les grands noms de la littérature tels qu’ André Malraux (1901-1976). C’est en juillet 1927 à l’âge de 28 ans que Louis Guilloux publie le roman qui va l’imposer sur la scène littéraire, La Maison du peuple. L’écrivain se partage entre Paris et Saint-Brieuc, sa ville natale qui sert de cadre à de nombreux romans.
Pendant la Seconde Guerre mondiale, il vit à Saint-Brieuc et entretient des contacts avec des responsables de la Résistance dans les Côtes-du-Nord, notamment avec l’abbé Chéruel et l’abbé Vallée. Le Pain des Rêves, qu’il écrit pendant l’Occupation, lui vaut le Prix du roman populiste 1942. À la Libération, il est désigné par le Comité départemental de Libération comme interprète auprès des Américains et s’engage comme interprète des troupes américaines.
Le Sang Noir (1935) est considéré comme le chef-d’œuvre de Louis Guilloux. Il y raconte l’histoire d’une journée de 1917 dans une ville de province. Le livre dépeint à travers le calvaire d’un professeur de philosophie, Merlin dit Cripure, le tableau d’une société de pharisiens, de grotesques, de haïssables, en face de gentils, de révoltés, de victimes. Il anticipe une révolution à l’Est. Pourtant Cripure n’est plus révolté. Il est la caricature d’un homme pitoyable à la fin d’une civilisation. Moqué par ses élèves, vivant avec une femme de mauvaise vie, haï par tous les patriotes de l’arrière, il veut se battre en duel, dans un dernier sursaut, mais on le prive de ce duel et de son honneur. Il ne lui reste plus que le suicide…
Le Sang noir est un roman métaphysique, plus que politique. Cette dimension métaphysique et le foisonnement des personnages, Cripure, Maïa, Nabucet, Moka et Lucien, font du Sang noir le roman le plus dostoïevskien de la littérature française.
Maison Louis Guilloux, 13 Rue Lavoisier à Saint-Brieuc
Horaire unique : de 15h à 18h
Dates des prochaines visites : 18 février 2023 – 26 février 2023 – 18 mars 2023 – 26 mars 2023 – 15 avril 2023 – 30 avril 2023 – 13 mai 2023 – 28 mai 2023 – 17 juin 2023 – 25 juin 2023 – 8 juillet 2023 – 30 juillet 2023 – 5 août 2023 – 27 août 2023.
Tout public, gratuit
Contact : 02 96 61 57 54
Un parcours en ville autour du thème de Louis Guilloux et des réfugiés espagnols est aussi possible à la demande.
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