SÉRIE. THE OUTSIDER, UN CONTE DE FIN D’HIVER

Entre enquête, doutes, deuil et silence, la mini-série The Outsider (adaptée du roman éponyme de Stephen King) résonne comme un conte de fin d’hiver. Mise en lumière.

Le corps mutilé d’un enfant de 11 ans est retrouvé en pleine forêt, dans le comté de Cherokee en Géorgie. Preuves à l’appui — traces d’ADN et empreintes digitales relevées sur les lieux du meurtre — l’inspecteur Ralph Anderson décide d’arrêter le coupable évident, en la personne d’un citoyen respectable, professeur d’anglais et entraineur de baseball pour les élèves de son collège. Clamant aussitôt son innocence, le suspect va rapidement plaider sa cause en fournissant à l’aide de son avocat, des vidéos de surveillance attestant de sa présence physique (et sonore) indiscutable au moment du crime, dans une autre ville à 100 kms de l’endroit où il était censé être.

The outsider

Tel est le point de départ de la nouvelle série The Outsider que diffusent la chaine HBO et par ricochet OCS en France ce mois-ci. En s’inspirant du roman éponyme de Stephen King publié l’an passé chez Albin Michel, Richard Price scénariste de The Wire et The Night of, a eu la bonne idée d’enrichir la structure narrative par rapport à la trame d’origine, dans le but avoué d’introduire une tension dramatique plus consistante. La série est  articulée autour de 10 épisodes dont les 2 premiers, réalisés par John Bateman (lequel s’autorise à interpréter le rôle du suspect numéro 1), annoncent brillamment le ton de The Outsider, ne pas manquer en 2020 ! Mentionnons aussi la mise en scène de 2 autres épisodes confiée à Dennis Lehane auteur de Mystic River, Shutter Island et Gone Baby Gone.

The outsider

Un nouveau whodunit (“qui l’a fait ?”, ndlr), me direz-vous ? Certes, vous répondrais-je, à en juger de prime abord par cette nouvelle série du genre qui dissémine avec ordre et justesse aux yeux du spectateur les mêmes indices dont disposeront les enquêteurs pour résoudre l’énigme en cours. Cependant, à bien y regarder, on est presque obligé de nous rendre très vite à l’évidence passée la 1ère entame du 1er épisode : l’entraîneur de baseball est-il coupable ou non ne devient plus forcément la bonne question à se poser.

Ce qu’il convient d’interroger, c’est plutôt la réalité toute entière dans ce microcosme américain, dans cette petite ville où tout le monde se connait, où les personnages principaux et secondaires qui composeront un groupe à proprement parler, vont unir leurs forces et leurs peines face au mal, topique caractéristique chez Stephen King. De fait, le questionnement en amorce sur la culpabilité ou non de l’enseignant va glisser sur des conjectures plus improbables à travers la personnalité de l’enquêteur principal : le policier endurci Ralph Anderson, interprété avec maestria par Ben Mendelsohn, à qui viendra s’ajouter dès le 3ème épisode une détective peu orthodoxe campée par Cynthia Erivo (Les Veuves). Le tandem dès lors constitué pourra mener son investigation avec calme, patience et lucidité, autour de deux questions fondamentales en fil rouge jusqu’au dénouement final : dans quelle mesure peut-on ouvrir son esprit à la possibilité de quelque chose qui parait impossible ? Jusqu’où peut-on trouver des espaces rationnels dans une réalité qui nous échappe et qu’il nous faut néanmoins accepter — the  « Outsider » signifiant étranger, extérieur, pas des nôtres ?

The outsider

Si d’aucuns peuvent déplorer le rythme lent de l’intrigue nourrie par des fausses pistes inutiles, ainsi que le choix de sa résolution formelle dans l’épisode final, on peut reconnaitre que la série a le mérite de chercher à déchiffrer des thèmes rarement aussi bien explorés tels le doute — et la remise en question permanente de nos certitudes vers une explication moins rationnelle — le deuil pour ceux qui restent, et enfin le silence qui enveloppe tout malgré la gravité des sujets abordés (meurtre d’enfants, violence sexuelle) sans voyeurisme, sans cris ni pleurs hystériques, et les scènes les plus belles, parfois tragiques, deviennent des scènes presque muettes et filmées sciemment de loin.

The Outsider, 1 saison, 10 épisodes. Sortie le 1 Janvier 2020, adaptée du roman The Outsider de Stephen King (2018).

The Outsider sur HBO

Article précédentRADIOOOOO.COM, LA MACHINE À REMONTER LE TEMPS EN MUSIQUES
Article suivantDEUX MILLIONS DE MASQUES DE PROTECTION POUR LA BRETAGNE

LAISSER UN COMMENTAIRE

S'il vous plaît entrez votre commentaire!
S'il vous plaît entrez votre nom ici