Deux couples d’artistes intellectuels se lient d’amitié dans le New York des années 1970. A travers leur vie au cours des 30 années qu’ils parcourent ensemble, cahin-caha, se jouent des intrigues de la , auxquelles s’entremêle progressivement un drame bien plus terrible… Siri Hustvedt entraîne le lecteur dans le passionnant microcosme intellectuel et artistique new-yorkais. L’intrigue monte en puissance, le style est envoûtant, mais le roman se transforme en patchwork mêlant intrigues romanesques et longues descriptions artistiques ou littéraires.
Un roman esthétique au rythme en peu lent
L’écriture élégante, presque sensuelle, rend la lecture agréable et plaisante. Malheureusement, le livre manque de dynamisme et oscille entre le roman, qui tourne au thriller psychologique sur la fin, et le documentaire sur l’hystérie, l’anorexie, l’art contemporain… On pourrait s’attendre, avec de tels personnages, à plus d’énergie et de puissance.
Les incursions dans les domaines psychologiques et surtout artistiques sont cependant fascinantes. Le lecteur a le sentiment d’être initié aux secrets d’un univers étrange et privilégié. Ce qui modifie au final son regard sur l’art contemporain. Certains passages sont assez dérangeants et Siri Hustvedt ne nous épargne pas quelques descriptions un peu gores…
À noter qu’en se glissant dans la peau d’un homme pour dérouler l’intrigue, Siri Hustvedt n’a pas échappé à certains écueils. Ainsi, on se prend à sourire devant certains gestes amoureux de Leo qui semblent plus féminins que masculins…
À conseiller si…
… vous avez envie de mieux comprendre l’art contemporain : que cherche l’artiste ? De quoi nourrit-il son œuvre ? Peut-on tout se permettre sous prétexte de quête artistique?
… vous souhaitez découvrir Siri Hustvedt, dont il semble que ce soit le livre le plus abouti. Pour le clin d’œil biographique : c’est la femme de Paul Auster.
Extraits :
Siri Hustvedt écorche au passage les critiques d’art :
[…] ce ton narquois, cynique et sans joie qu’il adoptait en général dans ses articles sur l’art et les artistes. Bien entendu, Hasseborg n’était pas unique. Il avait de nombreux compatriotes qui écrivaient exactement comme lui – quoiqu’avec moins d’intelligence -, d’autres journalistes culturels qui avaient adopté le jargon brillant et superficiel du moment. C’est un langage que j’en suis venu à haïr, car il ne fait ni place au mystère ni à l’ambiguïté dans son vocabulaire plein d’autosatisfaction qui suggère avec arrogance que tout peut être su.
À méditer :
[…] un mensonge spectaculaire n’a pas besoin d’être parfait. Il repose moins sur le talent du menteur que sur l’attente et les désirs de celui qui l’écoute.
Hélène
Tout ce que j’aimais, Siri Hustvedt (Auteur), Christine Le Boeuf (Traduction), Actes Sud, mai 2005, 455 p., en folio à 10€