Plongez dans la discothèque de Serge Gainsbourg

Photo: Dominique Gonot.

Né en 1970 à Lyon, Stéphane Girel exerce depuis plus de trente ans le métier d’illustrateur et d’auteur d’albums et romans jeunesse. Dans un autre registre, on le connaît aussi aujourd’hui comme iconographe du musée Serge Gainsbourg, un artiste auquel il a consacré de longues recherches personnelles. Ses récents travaux, réalisés avec le journaliste Christophe Geudin, ont donné lieu à l’écriture de l’ouvrage Dans la discothèque de Serge Gainsbourg, publié le 24 octobre 2024 aux éditions Seghers.

A l’origine, le parcours personnel comme professionnel de Stéphane Girel n’avait aucune partie liée avec l’univers musical. Originaire de Lyon, il suit tout d’abord des études d’art à l’école de dessin et d’animation Emile Cohl entre 1989 et 1992. Au sortir de son cursus, il débute une activité d’illustrateur et d’auteur pour la jeunesse. Il participe ainsi à une soixantaine de romans et d’albums, publiés pour des éditeurs français comme Gallimard, ou des structures internationales telles que le sud-coréen Yeowon Media. En outre, ses dessins originaux font l’objet d’une exposition en 2003 à la galerie L’Art A La Page de Maisons-Alfort. Quatre ans plus tard, il devient également professeur d’illustration à l’ENAAI (Enseignement aux Arts Appliqués et à l’Image) de Chambéry, profession qu’il exerce toujours aujourd’hui.

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Stéphane Girel. Photo: Neta Landeau.


Depuis près de trente ans, il développe également une passion parallèle pour la chanson et la musique anglo-saxonne. A cet égard, il éprouve un intérêt tout particulier pour la vie et l’oeuvre de Serge Gainsbourg, dont il a découvert en 1992 la biographie signée Gilles Verlant. Désireux d’en apprendre davantage sur l’homme à la tête de chou, il se lance alors dans un long travail de recherche, qui occupe peu à peu la plus grande partie de son temps. De fil en aiguille, il entre en contact dès 2020 avec l’écrivain Sébastien Merlet, l’un des auteurs de l’ouvrage Le Gainsbook (2019) consacré aux coulisses des créations du célèbre artiste. Tout juste nommé commissaire d’une exposition pour le musée Gainsbourg, ce dernier lui propose d’être son bras droit pour ce même projet. Une opportunité qui permet à Stéphane Girel, finalement chargé de l’iconographie du musée, de poursuivre et d’intensifier ses recherches, explorant des archives nouvelles et jusqu’alors inconnues.

Désormais approfondi, ce travail devient progressivement la matrice d’un ouvrage qu’il co-écrit avec le journaliste musical Christophe Geudin, rédacteur en chef de la revue Muziq et du site Funk-U. Baptisé Dans la discothèque de Serge Gainsbourg, ce livre est sorti le 24 octobre 2024 aux éditions Seghers.

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Photo: Roger Kasparian.

Outre ses recherches antérieures sur le sujet, Stéphane Girel a nourri l’ouvrage de sa visite en mars 2021 du 5 bis rue de Verneuil à Paris, l’ancien domicile de l’artiste aujourd’hui ouvert au grand public. Un évènement qui lui a permis d’examiner de nombreux éléments éclairants, notamment des pochettes d’albums, ou encore des notes mentionnant des dates de concerts présentes dans l’agenda personnel de Gainsbourg. A cette occasion, il a également pu mettre la main sur une série de photos, dont certaines, évocatrices, viennent ici illustrer le propos. Elles présentent le musicien en pleine création, parfois accoudé à son piano ou à son matériel hi-fi, souvent entouré de disques soigneusement choisis.

Pour reconstituer la collection musicale de Gainsbourg, Stéphane Girel a pu également compter sur les connaissances encyclopédiques du co-auteur Christophe Geudin. Ce dernier y apporte ainsi son expertise, nous informant sur les différents courants et musiciens cités au fil des pages. Par ailleurs, l’ensemble du livre s’appuie sur un véritable travail d’analyse, portant sur les nombreuses interviews données par Gainsbourg durant ses 33 années de carrière. S’y ajoute également l’étude de plusieurs de ses prestations live, en particulier pour la télévision et la radio. Autant d’éléments qui témoignent avec précision de l’impact de ses goûts musicaux sur la création de son propre répertoire.

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Photo: Tony Frank.

D’une époque à l’autre de la vie de Gainsbourg, on découvre dans ce livre l’ampleur impressionnante de sa collection musicale. Pour cause, cette discothèque dévoile près de 400 références, déclinées sur tous les supports audio du XXe siècle : elle s’étend ainsi des 78 tours familiaux aux cds des années 80 et 90, sans oublier les cassettes, les 33 et 45 tours des années 50 à 70. De même, les auteurs en profitent pour retracer l’origine de certaines acquisions majeures de cette collection, dont on retrouve quelques pochettes et présentations additionnelles dans le corps du livre.

Le contenu même de cette collection atteste de la curiosité apparente de Gainsbourg quant aux multiples courants musicaux qui l’ont marqué. En dépit de sa posture d’esthète épris des répertoires classiques et jazz, il cultivait un éclectisme hérité en partie de son éducation paternelle. A cet égard, il se montrait également à l’affût des nouveaux styles qui ont émergé et rythmé la musique internationale pendant la seconde moitié du XXe siècle. Parallèlement à ses emprunts notoires au reggae et à la funk, on découvre aussi son goût quasi méconnu pour le punk rock des Sex Pistols, ou encore la soul de James Brown et le rhythm and blues de l’extravagant Screamin’ Jay Hawkins, auteur du standard « I Put A Spell On You ». Se déroule ainsi son large spectre d’influences ayant rejailli, à des degrés divers, sur plusieurs recoins de son œuvre. Des synthèses qui, d’ailleurs, doivent aussi beaucoup aux contributions parfois majeures de ses arrangeurs et co-compositeurs tels qu’Alain Goraguer ou encore Jean-Claude Vannier.

En fin de compte, on éprouve un réel plaisir à se perdre dans les méandres de cette importante discothèque, dont on retrouve la liste en fin d’ouvrage. A bien des égards, la lecture de ce livre nous offre ainsi un décryptage aussi immersif qu’inspirant sur le processus créatif de Serge Gainsbourg. Une publication qui devrait donc ravir ses aficionados… et les autres aussi, très certainement.

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Dans la discothèque de Serge Gainsbourg, Stéphane Girel & Christophe Geudin, éditions Seghers, 192 pages, 25 euros, parution : 24 octobre 2024.

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Pierre Kergus
Journaliste musical à Unidivers, Pierre Kergus est titulaire d'un master en Arts spécialité musicologie/recherche. Il est aussi un musicien amateur ouvert à de nombreux styles.

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