Ils avaient mis le feu au Triangle il y a deux ans. Les X-Trem Fusion reviennent à Rennes les 24 et 25 février 2016 avec leur création Minkang. Toujours sur la base du Hip-Hop, ils creusent leur sillon au fil des chorégraphies, affinent leur style. Leur danse a l’énergie électrique des danses urbaines et de leur jeunesse, la profondeur de l’Afrique et la fierté de ses racines. Minkang se révèle une réflexion posée sur cette Afrique qui s’affirme comme une partie du monde qui ne s’en laisse pas conter artistiquement.
Il est très périlleux de porter à la scène une danse qui ne lui est pas originellement destinée. Dans la rue, les codes se mettent en place et un langage naît au gré de la pratique. Mais ces codes restent ouverts, car challengés par les spectateurs de la rue, spectateurs de tous horizons avec lesquels les danseurs restent en dialogue permanent. Les danses urbaines ne se chorégraphient pas sans dommage quand elles entrent dans les théâtres, comme depuis quelques années, et le résultat est malheureusement souvent un spectacle lissé pour la scène, propret. Les X-Trem Fusion réussissent ce tour de force qui consiste à faire entrer dans le théâtre le hip-hop et la danse africaine sans les dénaturer, sans rien leur faire perdre de leur spontanéité et de la force de leurs messages contestataires.
Le thème central autour duquel la pièce Minkang se développe est la racine, la source, l’origine (traduction du mot minkang d’origine Bétis du centre du Cameroun). La minkang est symbolisée par la calebasse qui leur colle aux basques, comme le hip-hop teinté de danse africaine vers lesquels les X-Trem Fusion reviennent toujours enrichis, grandis, sans jamais s’appesantir et encore moins s’alourdir.
Les expérimentations des X-Trem sont intégrées aux créations au fil de leur découverte par le groupe. Dans Minkang, le travail autour de la danse sans musique (piste chère à la danse contemporaine) est exploré, approfondi et met en exergue la musicalité propre de la danse elle-même. C’est le corps du danseur qui devient instrument et la musique est créée par ses pas, sa respiration, son corps entier. La multitude de bruits que font les danseurs devient la partition sur laquelle ils dansent. Fidèle à la rue, chaque danseur est mis en avant à différents moments de la chorégraphie, le break de Stecky, le new style de Mario, le popping d’Afrik’1, Yuri et Funkaurel, puis tous se fondent en une expérimentation commune : le masque, la théâtralisation, les différents espaces créés par des jeux de lumière, le mariage de la musique classique avec le hip-hop. Mais au-delà, ce qui garantit à la chorégraphie Minkang sa capacité à se régénérer se trouve dans les nombreuses fenêtres que les X-Trem Fusion se sont laissées dans la composition. Tout au long de la pièce subsistent des endroits que les danseurs peuvent modifier à la faveur de ce qu’ils ressentent du public alors même qu’ils sont en train de danser, comme dans la rue. La complicité des danseurs entre eux leur permet de changer en direct le court d’un mouvement, d’une phrase, son rythme, son atmosphère. Le public n’ingurgite pas le spectacle passivement. Au contraire, il le nourrit de sa présence et de ses réactions.
Minkang de et avec Blaise Eteme Atangana aka Stecky, Michel Ateba aka AfriK’1, Alexandre Hervé Ayissi aka Yuri, Aurélien Mouafo aka Funkaurel, Éric Marius Pounde aka Mario.
Crédit photos : Martin Bertrand