12 Years A Slave de Steve McQueen, Un film mémoriel

À chaque président américain, la production cinématographique étasunienne prend une sensibilité, voire une tournure, différente. Avec Barrack Obama, l’Amérique se penche un peu plus sur la dimension esclavagiste de son histoire. 12 Years a slave, Douze ans d’esclavage, est une adaptation fidèle du livre de Solomon Northup. Fidèle et sans prise de risque.

12 ans esclave, filmD’emblée, on regrettera une bande-annonce ampoulée et digne des pires productions de Jerry Bruckheimer. Elle est truffée des clichés du blockbuster biographique. Sans doute acceptable pour un public américain, mais too much pour un cinéphile européen.

Dommage, car cette histoire n’avait pas besoin de tant d’artifices pour capter le spectateur. Un père de famille noir vivant paisiblement à Saratoga (État de New York) accepte un contrat juteux pour suivre deux artistes sur les routes comme musicien. Hélas, il est kidnappé et envoyé dans une plantation du Sud comme esclave. Il y restera 12 ans.

12 ans esclave, film

D’un point de vue critique, le réalisateur Steve McQueen ne prend guère de gants avec cette Amérique de l’esclavagisme. Il y dénonce les préjugés sur les noirs comparés à des animaux (qui existent encore aujourd’hui de loin en loin) tout comme l’évangélisation forcée des esclaves. Mais il ne prend pas de gants non plus avec les esclaves eux-mêmes qui se trahissent, s’avilissent afin de « Survivre », comme le dit le héros de 12 Years a slave confronté à sa propre lâcheté.

McQueen expose ainsi la violence de l’esclavagisme dans des scènes insoutenables. La bestialité des maîtres qui assouvissent leurs envies de pouvoir, leurs pulsions les plus viles, est révoltante. Le film remet ainsi le sujet à la place qu’il ne devrait jamais quitter : cruauté et inhumanité de l’esclavage. Se hausse-t-il ainsi au niveau d’Amistad ou de la Couleur Pourpre, le fameux diptyque de Spielberg ? On peut en douter.

De fait, 12 ans d’esclavage accuse une forme convenue. Côté histoire, elle est sans surprise puisque son dénouement est connu. La réside l’éternel problème du BioPic : les flashbacks et les montages rapides des amorces de ces longs-métrages ne parviennent pas à subvertir ce traitement désormais conventionnel. La suite se déroule comme du papier à musique ; bien interprété, accessible à tous les publics, sans prise de risque. Résultat, 12 years of slave est davantage un film-mémoire qu’un grand moment de fiction.

Dès lors, un Oscar est-il à portée de main ? Le fait que le réalisateur, Steve McQueen, soit noir pourrait y aider. Mais la comparaison s’invite aussitôt : qu’aurait pu produire Spike Lee dans sa période faste ? Et, de fait, dans 12 years a slave, entre les montées de sentiments de révolte et de colère savamment distillés par une réalisation technique excellente flotte un certain ennui.

12 Years A Slave – 12 ans esclave
22 janvier 2014 (2h13min)

Réalisé par Steve McQueen (II)
Avec Chiwetel Ejiofor, Michael Fassbender, Benedict Cumberbatch
Drame , Historique américain

Article précédentDouble album de Dirty Beaches Drifters-Love is the Devil, Diamant noir
Article suivantVie et biographie de van Gogh chez Flammarion, Une somme clinique
Didier Acker
didier.ackermann {@] unidivers .fr

LAISSER UN COMMENTAIRE

S'il vous plaît entrez votre commentaire!
S'il vous plaît entrez votre nom ici