A Apigné The Whalestoe Attic a amplifié ses harmoniques (Tombées de la nuit)

Dernier temps (fort) pour le quatuor The Whalestoe Attic : vendredi 17 juillet. Sous le dôme des Tombées de la nuit, installé près du Moulin d’Apigné, il fallait jouer amplifié, dans les conditions d’un groupe de rock, un subtil répertoire pour un public dispersé. Les précédentes prestations le laissaient présager. Oui, la magie a opéré !

 

the whalestoe atticMagie du son, équilibré, bien dosé, bien maîtrisé, ce qui n’a rien d’évident dans l’environnement sphérique et ouvert du dôme utilisé par les Tombées de la nuit depuis quelques années. Cadre toujours un peu déroutant et toujours sympathique pour le public (qui, c’est assez étonnant, sait spontanément s’y répartir harmonieusement) mais cadre qui est loin d’être adapté à la mise en son amplifié d’un ensemble et d’une musique dont l’essence est acoustique. Pour Morgane Houdemont (sa fondatrice) et The Whalestoe Attic, mais aussi pour le public, c’était donc un nouveau test. Après le Mabilay à Rennes et l’église de Laillé, il s’agissait de mesurer le répertoire du quatuor à des conditions d’interprétation plus pop, plus rock (les enfants ne s’y sont pas trompés qui, à leur manière, ont dansé quelques « pogos » devant la scène). Et la magie a opéré. L’amplification, les difficultés acoustiques liées au lieu n’ont pas obéré la qualité ou la subtilité des compositions. Saluons donc, une fois n’est pas coutume, le beau (et délicat) travail de l’ingénieur du son.

the whalestoe atticSaluons aussi le sens de l’interprétation du jeune quatuor qui a su comprendre l’enjeu, l’esprit du lieu et y a adapté son jeu avec une énergique simplicité. Dès la première pièce, l’aura est imposée, l’égrégore du public captivée. L’introduction inspirée d’une pièce de Schubert laisse place à de longs développements, des aplats mélodiques et harmoniques qui évoquent certaines des matières sonores chères au compositeur britannique Ralph Vaughan Williams. Les thèmes évoqués (deuils, mélancolie, oppression…) pourraient ne pas sembler très adaptés au cadre majoritairement festif du festival estival. C’est compter sans la magie de la musique. De la suite au Seven tears de John Dowland composée par Morgane Houdemont s’élève une rosée d’espérance, de son adaptation du second mouvement du Requiem de Schnittke (Moi l’expert des passions humaines) exsude une lumineuse énergie fraternelle communicative. Et du vide évoqué par la composition Ode to the void s’échappe, au rythme frénétique du violoncelle, un actif appel à surmonter les obstacles, à s’affranchir des craintes en transformant les poisons en cure. La démonstration est appuyée par l’arrivée sur scène de Pierre, le chanteur-guitariste de Santa Cruz pour l’interprétation de deux tubes des années 80 version The Whalestoe Attic. the whalestoe atticLa réception chaleureuse du public à l’audition des beaux arrangements de Morgane Houdemont pour une version romantique du Blue Hotel de Chris Isaac se mue en enthousiasme débordant sur l’interprétation pop-classique de l’entêtant Shout de Tears for Fears.

À la fois épreuve et cadeau, pour une jeune formation hors cadre et hors format, cette carte blanche offerte par Les Tombées de la nuit aura tenue toutes ses promesses. Offrir l’opportunité à une compositrice et à ses musiciens de rencontrer (se confronter) à des publics diversifiés en des lieux originaux, mettre à l’épreuve de la réalité et de sa complexité un répertoire riche, exigeant et démontrer qu’il est pourtant abordable, qu’il apporte profondeur des émotions, instants uniques (non reproductibles) de beauté singulière, joie et partage. Souhaitons donc une longue et belle carrière à The Whalestoe Attic. Une carrière à l’image de cette carte blanche, pleine de défis, de croisements, de rencontres, d’instants magiques, de joies multiformes par-delà les épreuves et les nostalgies…

The Whalestoe Attic : Youenn Rohaut, Morgane Houdemont, Raphaël Chevalier, Solène Comsa

Crédit photos : Nicolas Joubard

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Thierry Jolif
La culture est une guerre contre le nivellement universel que représente la mort (P. Florensky) Journaliste, essayiste, musicien, a entre autres collaboré avec Alan Stivell à l'ouvrage "Sur la route des plus belles légendes celtes" (Arthaud, 2013) thierry.jolif [@] unidivers .fr

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