Le concert de clôture de l’OSB par Alexandre Tharaud a eu lieu les 15 et 16 juin 2017 à Rennes au TNB. Portant le numéro 23, cet ultime concert de la saison et de la série les essentiels portait en sous-titre : grandeur d’esprit. L’occasion de retrouver le pianiste français Alexandre Tharaud. Beaucoup s’en souviennent encore, mais l’année passée une affection aussi violente que soudaine avait causé l’hospitalisation du musicien quelques heures avant son concert, créant en même temps inquiétude et déception.
La soirée commençait avec une œuvre intitulée « The Wasps », autrement dit, les guêpes de Ralph Vaughan-Williams. Sacré personnage que ce musicien anglais né en octobre 1872 et qui a mené une carrière parsemée des rencontres les plus prestigieuses. Camarade d’études de Léopold Stokowski au Royal College of music, il a également pour proche l’étonnant Gustav Holst, l’auteur des planètes, il est également apparenté à la dynastie des Wedgwood, les fameux faïenciers anglais, et a pour oncle le naturaliste Charles Darwin. Voilà un homme sur le berceau duquel les fées se sont généreusement penchées. Les premières notes évoquent parfaitement les déplaisants hyménoptères et ne sont pas sans rappeler quelques mesures du vol du bourdon de Rimski-Korsakov. Musique légère composée pour accompagner une pièce du tragédien grec Aristophane, elle respecte avec humour le côté satyrique de l’œuvre. Le but d’Aristophane est de critiquer l’organisation de la justice populaire Grecque, qu’un excès de démocratie rend finalement insupportable, et les jurés, tels des guêpes s’acharnent sur les accusés. Formé à l’orchestration par Max Bruch et Ravel, Ralph Vaughan-Williams propose une musique pleine d’allant, surprenante au début, et par laquelle on se laisse capturer dans un second temps.
C’est avec le fameux concerto pour piano et orchestre en la mineur de Edvard Grieg que le très attendu Alexandre Tharaud fait son entrée sur scène. Arborant cette même apparente fragilité qu’il y a deux ans, il paraît, malgré l’approche de la cinquantaine, ne pas avoir changé. Le piano aurait-il des vertus de jouvence ? Il entame avec vigueur le premier mouvement. L’ouverture virtuose du piano est basée sur le motif de la seconde descendante suivie par une tierce descendante,structure typique de la musique populaire norvégienne. Cet allegro molto moderato nous entraîne immédiatement dans les méandres puissants d’une musique de caractère, il y a un côté épique, un souffle particulier que l’on retrouve souvent dans les musiques à forte identité nationale, un peu comme dans le concerto n°2 de Sergueï Rachmaninov. La pression va monter régulièrement tout au long de l’œuvre. Malgré la douceur du second mouvement, l’adagio en ré bémol, une certaine tension reste présente, soulignée par l’intervention mélodieuse du violoncelle, lui-même soutenu par les cors et les bassons. Le troisième mouvement allegro moderato molto e marcato, est marqué par le retour des mélodies basées sur le rythme du halling, danse populaire norvégienne. Le piano reprend sa méditation, rageuse et parfois rêveuse et le jeu nerveux et énergique d’Alexandre Tharaud nous subjugue jusqu’à nous faire perdre pied. Un bien beau bouquet final pour cette fin de saison musicale de l’orchestre symphonique de Bretagne.
Il serait néanmoins injuste d’occulter la troisième œuvre présentée cette soirée avec les variations sur un thème original Enigma opus .36 de Sir Edward Elgar. Il est sans doute plus présent dans nos esprits grâce à ses fameux « pomp and circonstances », particulièrement la marche n°1 « Land of hope and glory ». Bâtie comme un amical clin d’œil au cercle de ses amis proches, chacune de ces variations est censée brosser un tableau personnalisé, mettant en avant des traits de caractère, pas forcément flatteurs. Ainsi, la partie illustrant William Heath Baker, évoque une personne au caractère peu avenant, quand la variation dédiée à Caroline Alice Elgar, son épouse, est empreinte de douceur et d’une touchante tendresse. Pour ce qui est de l’énigme, tient-elle dans le thème de six mesures qui pose le cadre de ces différents portraits, impossible de répondre, et malgré les indices semés avec un humour très Britannique par le chef Grant Llewellyn, le mystère restera entier. Il réussira pourtant à faire chanter au public les premières mesures du God save the Queen.
Belle fin de saison, en résumé pour l’Orchestre symphonique de Bretagne, même si la fatigue se fait sentir et que quelques visages connus manquent à l’appel, tels Pascal Cocheril, Anatol Karaev ou Michel Péresse. Qu’ils soient rassurés, quelques jeunes gens les ont remplacés et reconnaissons-le, ont bien tenu leur place. Notre amical salut ira au jeune Victor Haviez, du conservatoire national supérieur de Paris signant, avec talent et au cor, sa première présence au sein de l’OSB. Nous lui souhaitons une riche carrière. En attendant bonnes vacances à tous et à bientôt pour continuer à soutenir notre orchestre symphonique de Bretagne.
Retrouvez le programme de l’OSB pour la saison 2017-2018 ici.
Crédit photo : Shumin, site shu-min.com
Photo de Une issue de la page Facebook d’Alexandre Tharaud