Sous ses airs de chansonnette, Cui Cui – Basalt sons et curiosités invite à un véritable voyage sensoriel et critique au cœur du monde aviaire. Du 20 juin au 3 août 2025 à La Longère de Rennes, cette exposition mêle art sonore, installation plastique et mémoire écologique. Entre archives d’espèces disparues et inventions poétiques, elle interroge notre capacité à écouter ce qui s’efface : le chant du vivant.
Sous ses airs enfantins, presque chantonnants, Cui Cui dissimule un dispositif d’une redoutable acuité. À La Longère, du 20 juin au 3 août 2025, cette exposition conçue par le collectif Basalt, dans le cadre du programme Exporama, transforme l’espace en un sanctuaire acoustique, où se conjuguent la mémoire des oiseaux et celle, vacillante, de notre rapport au vivant.
Derrière les murs de cette ancienne ferme réhabilitée, un bestiaire sonore, visuel et sensible prend forme. Plus qu’une simple exposition, Cui Cui est une traversée : celle d’un paysage d’écoute peuplé de chants réinventés, de cris oubliés, de signaux faibles émis par des espèces disparues ou en voie d’effacement. Ici, l’oiseau est à la fois le sujet, la matière et la métaphore.
Les oiseaux ne chantent plus, ou si peu
Il y a d’abord cette gêne sourde que l’exposition ne dit pas mais laisse deviner : et si les oiseaux n’étaient plus là ? Et si ce « cui cui » n’était qu’un souvenir filtré, restitué par synthèse numérique, archivage sonore ou fiction artistique ? À la manière d’une éthologie poétique, les artistes réunis interrogent l’appauvrissement de notre environnement acoustique, ce silence qui s’installe lentement autour de nous sans que nous n’y prenions garde.
Certains dispositifs nous font entendre ce que nous ne pouvons plus entendre : le chant reconstitué de l’oiseau-moineau d’Arabie, éteint au début du XXIe siècle, ou encore des compositions qui mêlent voix humaines, field recordings et sonorités synthétiques pour évoquer un paysage sonore disparu. Il ne s’agit pas d’une reconstitution muséale, mais d’un geste artistique profondément engagé : faire de l’art un lieu de survivance sonore, une mémoire augmentée.
Cabinet de curiosités ornithologiques
L’espace de La Longère se fait cabinet de curiosités du XXIe siècle. Y sont présentées des œuvres inédites, souvent hybrides : impressions graphiques de plumes mutantes, installations évoquant des nids de ville, sculptures-sonars à écouter à l’oreille, pièces à manipuler pour déclencher des sons d’oiseaux impossibles, entre invention et archive.
On songe à Cornelia Parker, Céleste Boursier-Mougenot ou aux fragments de Michelangelo Pistoletto : ici aussi, le détournement et la décontextualisation invitent à repenser le réel. Basalt, collectif naviguant entre arts sonores, design critique et création documentaire, orchestre un monde instable, en équilibre entre l’éthologie spéculative et la fable écologique.
Chants de l’Anthropocène
Il faut aussi entendre le propos politique, mais feutré, jamais frontal, de Cui Cui. Le monde que l’exposition met en scène est celui de l’Anthropocène, cet âge géologique où l’humain est devenu force tellurique, laissant derrière lui des chants de ruines. L’oiseau-lyre qui imite les alarmes de voiture, les corneilles apprenant à parler en captivité, les chardonnerets capturés pour être vendus dans des cages : tout cela est là, en creux.
À travers cette volière d’images et de sons, Cui Cui pose une question essentielle : comment réapprendre à entendre ce que nous avons oublié d’écouter ? Elle propose, peut-être, un début de réponse dans cette hybridation féconde entre art, science et soin. Écouter devient alors un acte de résistance, une manière de renouer avec le monde.
Performances, DJ sets ornithologiques et autres envolées
Le vernissage du 19 juin marquera l’ouverture d’une série d’événements pensés comme des prolongements vivants de l’exposition. Performances sonores, DJ sets à base de chants d’oiseaux remixés, conférences sauvages et ateliers d’écoute active prolongeront le geste artistique dans l’espace public et sensoriel.
Les rendez-vous incluent également des rencontres avec les artistes, des lectures ornithologiques, et même des marches sonores le long du canal. Car Cui Cui ne veut pas rester enfermé : c’est un art qui bat des ailes, un art en migration.
Informations pratiques
- Lieu : La Longère, 66-68 Canal Saint-Martin 35000 Rennes (Prairies Saint-Martin)
- Dates : 20 juin – 3 août 2025
- Vernissage : jeudi 19 juin à partir de 18h
- Entrée libre
- Horaires : du mardi au samedi de 14h à 18h
Jeudi 19 juin 2025 de 18h00 à 21h00
Soirée d’inauguration Cui Cui, performance et Dj Set mix des oiseaux
Dans le cadre du vernissage de l’exposition Cui-Cui, nous avons le plaisir de vous convier à deux performances sonores :
– 18 h 30 Sandra Boss, « Birds Organ » à Basalt (la Longère).
Birds Organ est installation/performance sonore composée de 20 sifflets à eaux en céramiques en formes d’oiseaux, joués automatiquement via un contrôleur midi.
– 19 h 30 Gauthier Tassart, « Mix des oiseaux » : DJ set de vinyles de chants d’oiseaux. À découvrir à la Capitainerie les petits bateaux 48 canal Saint-Martin.
À l’instar de l’oiseau-lyre qui chante la déforestation de son habitat naturel en imitant le bruit des tronçonneuses, Gauthier Tassart tente de réenchanter le monde, armé d’un set-up electro et de leur phonographie de chants d’oiseaux.
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