Cinquième album studio des finlandais de Dark Buddha Rising, Inversum (produit par Neurot Recordings, le label de Steve von Till) flirte avec les sommets du genre, atmosphère savamment asphyxiante, long périple initiatique, sous acide psychédélique, sur les crêtes aiguisées d’un doom metal vertigineux.
Périple initiatique sonore en accords mineurs sur les versants obscurs de l’être Inversum, album composé de deux longues pièces obscurément haletantes, est entièrement conçu pour le format vinyle (que nous vous recommandons chaudement). Comme au bon vieux temps des concepts albums Inversum propose donc deux titres qui couvrent chacun une face : ESO / EXO ! Long, lent, sombre, Dark Buddha Rising (fondé en 2007) respecte les règles du genre mais surtout les transcende et les étire. Nous naviguons entre les deux rives boueuses du Styx. ESO est l’orient, plus méditatif, langoureux et apaisé. EXO, qui débute par un martèlement tribal, est l’occident, aigre et tumultueux. Des deux bords nous attendons longtemps avant d’entendre les voix des damnés exultant dans les lointains… Méconnu, il existe un aspect sombre du bouddhisme fait d’étranges rituels shamaniques, de rites initiatiques pratiqués dans les cimetières, parmi les ossements. C’est à celui-ci que pourrait renvoyer la musique lourde et répétitive de Dark Buddha Rising, avec toutes les modérations qu’implique l’aspect carnavalesque de la création artistique.
Derrière le décorum macabre, le symbolisme tortueux et sanglant demeure la musique. Hypnotique et tempétueuse elle convoque les puissances obscures de l’âme, les draine, les expurge. Renouant, finalement, avec certains procédés des musiques traditionnelles cette forme musicale très moderne, si elle n’atteint pas aux mêmes effets, procure les mêmes frissons. A travers vibrations et répétitions nous sommes mis en présence de certaines énergies cachées, exaltantes. Ode épique aux forces occultes Inversum est une oeuvre qui se place dans la lignée des révélations du romantisme noir, la création doit assumer et exorciser les souffles obscures de l’âme humaine. Pour paraphraser Lars von Trier, qui clôturait par un ironique petit speech chaque épisode de Riget (sa série télévisée avortée) : «Si vous comptez suivre Dark Buddha Rising dans son royaume, préparez-vous à prendre le mal avec le bien».