JEROME HOUYVET, LE PHOTOGRAPHE QUI S’ENVOIE EN L’AIR EN BRETAGNE

A bord de son paramoteur, le photographe normand Jérôme Houyvet a saisi, sous tous leurs angles, les côtes d’Ille-et-Vilaine et des Côtes-d’Armor. Il en a tiré un livre : Vol au-dessus du littéral de Bretagne.

« C’était les Caraïbes », se souvient Jérôme Houyvet. Sur les clichés du photographe normand, le vert de l’eau le dispute à la végétation des îles et îlots environnants ; la mer bleu azur qu’il surplombe est à peine plus sombre que ce ciel troublé par à peine quelques nuages blancs. « Il aime photographier les lagons », s’amuse l’historien finistérien Erwan Crouant.

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Archipel de Port-Blanc – Photo ©Jérôme Houyvet www.jeromehouyvet.com

Mais ces paysages ne sont pas ceux des Antilles, ou d’autres îles paradisiaques. L’archipel mentionné se situe au large de Port-Blanc, dans les… Côtes-d’Armor. Le photographe et l’historien publient ce mois de mai « Vol au-dessus du littoral de Bretagne » (Bid Red Editions), dont le premier volume survole les côtes d’Ille-et-Vilaine et des Côtes-d’Armor. Une manière d’inviter, à travers des clichés aériens, à redécouvrir ces paysages souvent bien connus, parfois plus discrets.

« J’ai toujours aimé photographier de manière différente », explique le Normand.  Passionné de sport de glisse, déjà, il ne voulait pas se cantonner à la plage comme les autres photographes. Alors il s’est jeté à l’eau, avec un caisson étanche, pour approcher au plus près les surfeurs et autres planchistes. Devenue sa deuxième maison, Hawaï semble encore influencer ses clichés, jusqu’aux eaux bretonnes… Photographe officiel, ensuite, de la sécurité civile, il a pu s’envoler sur leurs aéronefs pour prendre des clichés aériens.

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Jérôme Houyvet – Photo ©Jérôme Houyvet www.jeromehouyvet.com

« Il y a onze ans, je cherchais le moyen de continuer à photographier en aérien », poursuit Jérôme Houyvet. Comme Nicolas Hulot avant lui, il découvre le paramoteur : une toile de parapente à laquelle sont fixés un siège et un moteur – une chaise volante, comme il le résume. Une solution contrainte pour le Normand, qui n’avait pas les moyens de louer un hélicoptère. Mais il en voit rapidement les côtés positifs. « Il y a un respect de l’environnement avec le paramoteur, détaille-t-il : c’est un engin qui consomme 3L par heure, qui ne fait pas beaucoup de bruit. »  Sous son aile, il peut approcher la faune locale, en ne conservant qu’une distance minimale de respect. Il peut approcher également, en volant à basse altitude, des scènes de la vie quotidienne, en contrebas.

Il pilote la toile comme un parapente classique, avec deux commandes. « On peut les lâcher, et dans ce cas-là, on se retrouve à l’équilibre, on vole droit, ce qui me laisse les mains libres pour photographier  » détaille le photographe normand. Dans ces cas-là, il lui suffit de basculer une jambe vers la gauche ou vers la droite pour effectuer un léger virage. Il ne conserve en main que l’accélérateur du paramoteur, pour maintenir sa vitesse et son altitude.

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Cap Fréhel – Photo ©Jérôme Houyvet www.jeromehouyvet.com

L’appareil détermine une autre façon de faire de la photographie. « Ce sont des photos très proches, prises avec un grand angle », décrit Jérôme Houyvet. À seulement 50 mètres du sol, il est encore entre ciel et terre… ou mer. « J’aime bien montrer de l’air, pour laisser les images respirer », ajoute-t-il. Et l’on voit souvent, sur ses clichés, les horizons azur sur lesquels se découpent les roches de la côte de granite rose ou des plus hautes falaises de Bretagne. Des horizons que ne peuvent guère capturer les photographes depuis les hélicoptères ou les avions, qui volent à une altitude trop élevée.

La vitesse elle aussi vient changer le travail du photographe. On pourrait, selon lui, se contenter de deux séances de deux heures dans un hélicoptère pour capturer tous les paysages qu’il a survolés. À 50 km/h, son rapport au territoire qui défile en contrebas change complètement. Il ne peut pas s’arrêter – sinon il perd de l’altitude. Mais il peut tourner sur place, revenir plusieurs fois, partir à la découverte. « C’est un travail de fourmi, c’est très lent », raconte le Normand.

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Phare de Men Ruz, à Ploumanach – Photo ©Jérôme Houyvet www.jeromehouyvet.com

À chaque fois, il revient donc plusieurs fois sur les lieux. « En aérien, on n’est jamais sur la même hauteur, jamais sur le même angle », et donc chaque cliché est toujours différent. Il survole donc, avec ses deux appareils photo, un même endroit trois à quatre fois, matin et soir, à marée haute ou basse, selon les saisons – pour à chaque fois trouver la bonne lumière, qui mettra le mieux en valeur le paysage qu’il survole. Au total, avec 50 à 70 heures de vol, il a pris entre 5 000 et 6 000 clichés, dont seulement 150 ont été conservés pour ce premier tome de « Vol au-dessus du littoral breton ».

Ce travail de fourmi est rendu plus délicat encore par les contraintes du paramoteur. La vitesse du vent double rapidement lorsqu’il monte en altitude, avec le risque de le déporter loin de la côte – ou contre un arbre, à l’instar de Nicolas Hulot. « À partir de 25 km/h de vent au sol, je ne peux plus voler », explique Jérôme Houyvet. Il s’aligne donc sur la météo pour prendre son envol : « dès qu’il y a un anticyclone sur la Bretagne, je prends ma tente et j’y vais pour quelques jours. » Sur place, ensuite, il compose avec la force du vent, pour parfois ne voler que deux heures par jour.

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Paimpol – Photo ©Jérôme Houyvet www.jeromehouyvet.com

« Il y a beaucoup de préparation pour chaque vol », décrit le photographe. Avant de déployer sa voile, il examine le terrain sur google earth, pour voir les points où il peut se poser, sur quels repères il faut se baser, quelles coordonnées GPS il doit noter pour prendre ses photos. « Le plus difficile, c’est quand je n’ai pas de point d’atterrissage en cas de problème, comme sur les îles ou au-dessus des villes », témoigne-t-il. Pour photographier Saint-Malo, il a fallu attendre la marée basse, pour s’élancer de la plage et s’y poser si besoin était.

Pour lui, le paramoteur enseigne l’humilité. « On ne peut pas voler quand on veut, il m’arrive de renoncer à un vol s’il y a des cumulonimbus, si le vent tourne pour venir de la terre », raconte-t-il.  Avec de préciser : « c’est toujours un soulagement quand ça décolle, même après dix ans de pratique ». Mais une fois en l’air, il profite pleinement de sa passion, malgré les basses températures d’altitude. « Il y a le privilège d’être seul à un endroit, et de pouvoir le partager par la photographie », explique Jérôme Houyvet.

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Falaises de Plouha – Photo ©Jérôme Houyvet www.jeromehouyvet.com

Avec ce premier tome de « Vol au-dessus du littoral breton » – deux autres suivront pour suivre la côte du Finistère  à la Loire Atlantique – c’est chose faite. Et pourquoi pas, plus tard, continuer à longer le littoral français, pour d’autres publications ? Son éditeur, en tout cas, semble approuver ce nouveau vol.

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Jérôme Houyvet, Vol au-dessus du littoral de Bretagne, Volume 1 : Ille-et-Vilaine – Côtes-d’Armor,  Big Red One Editions, 188 pages, mai 2018, 30€

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