Kmyle rend hommage à Astropolis dans son EP, Keroual. Sorti sur le label Astropolis Records le 18 septembre dernier, ce disque confirme les liens forts que le producteur toulousain a tissés avec l’équipage brestois. La palette de techno qu’il y déploie est le reflet de l’identité musicale et de l’histoire de l’aîné des festivals de musique électronique en France.
La dernière sortie d’Astropolis Records, label de l’iconique festival brestois de musiques électroniques, est signée Kmyle. Keroual doit son titre à l’iconique domaine qui accueille l’édition d’été d’Astropolis. Le producteur toulousain a composé le morceau éponyme juste après son passage au festival en 2018 avec son duo Laval, au petit matin dans la cour du manoir de Keroual.
Hommage à Astropolis. Un exercice de style
Ce n’est pas la première fois qu’un artiste rend hommage au festival Astropolis sous forme de musique. Parmi ces productions, “From The Crypt to the Astrofloor” de Laurent Garnier, “Astropolis” d’Electric Rescue, “La Cour” de Madben, l’EP de Blutch La Cité des étoiles, ou encore deux morceaux du Rennais Earl Nest (alias Lightbulbs), à la suite de son passage au tremplin lors de l’édition 2019. Certains de ces artistes, pour les plus anciens, ont accompagné l’histoire du festival. Les autres, à l’inverse, ont été accompagnés par l’équipe du festival, voire accueillis comme au sein d’une famille, et signés sur le label.
« Sans Astropolis, notre carrière ne serait pas la même », explique Samy, alias Kmyle. « Je ne serais pas où j’en suis aujourd’hui si Gildas Rioualen [directeur du festival, ndlr] et son équipe ne m’avaient pas ouvert des portes et donné la chance de jouer, de faire des scènes, d’aller faire des showcases, etc. C’est comme une famille où tu veux laisser ta marque ».
Kmyle. Un Toulousain à Brest
Samy rencontre l’équipe d’Astropolis par l’intermédiaire d’Antoine Husson, alias Electric Rescue, compagnon de bordée de longue date de l’équipage brestois, au même titre que Manu le malin. Kmyle se produit pour la première fois au festival en 2017, pour une Spring au manoir de Kériolet. Puis en 2018, à Keroual cette fois. Aujourd’hui encore, c’est avec beaucoup d’émotion qu’il évoque ces instants. « Quand tu joues à Astropolis, c’est une forme de consécration. Il y a tellement d’énergie, une puissance du moment indescriptible et supérieure à tout ce que tu peux ressentir en jouant ailleurs. C’est la meilleure expérience musicale que j’ai vécue ! »
Par-delà la relation artistique, Samy tisse des liens personnels avec l’équipe du festival. « À une période, j’allais en Bretagne à peu près tous les deux mois. Pour des dates, pour le festival et puis parce que ma compagne est Bretonne. Je l’ai d’ailleurs rencontrée à Astropolis ». À cette époque, Kmyle cherchait une agence de booking, et c’est tout naturellement que les Brestois lui font profiter du réseau ancien d’amis du secteur formé au long de 25 ans de rave. « Les promoteurs, patrons de boîte ou programmateurs qui font confiance à Astro parce que ce sont des gens sincères et motivés par l’amour de l’art partagent ces mêmes valeurs. Et quand tu es amené à travailler avec eux, les rapports sont plus amicaux, basés sur la confiance », se réjouit Samy.
Après plusieurs années de collaboration profitable et de complicité, Kmyle signe officiellement, avec Keroual, son entrée dans la famille brestoise, en apportant sa contribution au catalogue du label, Astropolis Records.
Keroual. Un EP aux couleurs d’Astropolis
C’est encore vibrant de son passage avec son duo Laval dans la cour du manoir de Kéroual, closing de l’édition 2018, que Kmyle compose le morceau “Keroual”. Dès les premières secondes, le kick incisif se marie à une nappe de synthé lumineuse. Celle-ci progresse tout au long du titre, pour dessiner la lente montée en puissance d’une techno euphorique et dansante, à la Laurent Garnier.
Le deuxième morceau de l’EP, “Telegraph”, se fait plus sombre, plus mental, hypnotique. « Le choix des autres morceaux a aussi un rapport avec Astropolis », précise Kmyle. « Parce que Gildas [Rioualen] voulait quelque chose qui reflète l’âme du festival, une techno classique, avec de l’émotion, mais aussi quelque chose de plus dur, clin d’œil aux origines du festival ». La techno de Kmyle a de classique que ce machiniste habitué du live et inspiré de la scène de Detroit aime à marier des sonorités dures aux mélodies plus émotives.
Un pas est encore franchi avec le dernier morceau de l’EP, un remix du titre éponyme signé Zadig, alias Day Is Dying, sous son projet hardcore. Le kick est distordu et les nappes lumineuses se voient remplacer par des alarmes angoissantes. « C’est quelqu’un qui a beaucoup apporté à la scène techno française », affirme Kmyle. « On avait envie de l’avoir sur l’EP pour rappeler à la nouvelle génération qu’il y a eu des gens comme ça, qui ont compté pour la techno française, et qui continuent à faire de la musique aujourd’hui ». Keroual fait donc le pont entre différentes facettes, mais aussi différentes époques de la techno, cette culture en mouvement, mais déjà patrimoniale. Or, c’est la même mission qu’entreprend chaque année le festival Astropolis à travers sa programmation artistique et ses actions culturelles.
La suite ?
Producteur prolifique depuis 2015, Kmyle n’est pas près de s’arrêter. Le 23 octobre dernier, il lançait son label avec un premier EP signé par lui-même, Wasteland. Il diversifie également sa production en travaillant sur d’autres projets. Avec son complice Cléric, ils composent une bande-son ambient pour le reportage du journaliste Ian Urbina, The Outlaw Ocean. Il travaille aussi avec Skyptöm Records, son premier label, à une nouvelle version de la Skyptobox, pièce musicale électronique pour concerts assis, un spectacle immersif sonore et visuel à 360 ° dont la tournée est en préparation. Face à une conjecture particulièrement défavorable, Samy ne se décourage pas. « Tout ce qu’on a créé depuis les débuts de la musique électronique est en train de se perdre. On se doit de résister. Il faut continuer à sortir des disques et à produire du contenu pour montrer qu’on est toujours là », conclut-il.