Avec LUX EZ3kiel irradie une lumière mouvante

Avec son dixième opus en vingt ans de carrière, EZ3kiel apporte chaleur et lumière à l’orée de la saison sombre et froide. Leur nouvel album LUX est une harmonieuse lumière sonore qui brille dans les ténèbres. Concert à Rennes.

EZ3kiel
EZ3kiel (photo : Studio Pierre 2 Lune)

Dans leur précédent projet, Les Mécaniques poétiques, EZ3kiel interrogeait le statut des machines dans leur rapport à l’humaine créativité. Il démontre leur attachement tant aux sonorités qu’aux images (est-il besoin de préciser la grande qualité de l’artwork de ce nouveau travail?). L’album LUX déroule aujourd’hui dix titres avec une parfaite harmonie. L’ensemble compose la bande-son idéale d’un film qui n’existera jamais ailleurs que dans l’évocation mentale de l’auditeur. Danse cérébrale aussi, en douceur et en finesse, avant que le corps ne se laisse finalement emporter.

luxLUX, grâce à la suavité et la chatoyance de sa production, pourrait presque nous convaincre que les machines ont une âme. Les sonorités électroniques sont douces et chaudes. C’est le monde qui environne l’auditeur qui, bien qu’organique et « naturel » apparaît froid, distant, statique et insensible. C’est déjà un pari gagné : imagerie et musique se répondent harmonieusement une fois encore. Et sans aucunement oblitéré la part « imaginale » de l’auditeur qui ne tiendrait pas à fixer continuellement les visuels de l’album durant son écoute (non, non ce n’est pas obligé!).

monwoLes voix, bien que rares, résonnent tout au long de cet album quasi instrumental. Les sons acoustiques se surréalisent, ondoient et abolissent les frontières stériles entre corps et âme, entre animalité et onirisme. Curieusement le chant (piquant et chaloupé) de Pierre Mottron sur  l’exceptionnel Anonymous, plus encore que l’interprétation (pourtant suavement agréable) de Laetitia Shérrif sur Eclipse, achève de féminiser et d’orientaliser (ex oriente lux !) l’ambiance générale de ce voyage. Voyage enchanteur inauguré par la froide sensualité de Born in Valhala et qui s’achève dans l’hypnose tachychardique post-rock de Stereochrome en faisant escale par le prog-rock électro rugueux de Lux, lumière rocailleuse et bien trempée, pour le coup.

Le reste s’écoule, à l’avenant. En torrent. Presque sans surprise mais (paradoxalement) avec un plaisir et une joie de découvrir accrus à chaque écoute. Néo-rock sombre, mouvant, électro et rugueux, dub musculeux, plages d’ambient et pointe de néo-classique répondent parfois à une basse aux accents cold-wave du plus bel effet (mention spéciale à l’épopée Dead in Valhala, somptueuse de ce point de vue). L’ensemble est subtil, sensible, poignant sans être tapageur. EZ3ekiel évite tous les chausse-trapes du style « mélange des genres ». Une parenté évidente avec le meilleur de Massive Attack mais si intelligente et personnelle qu’elle exhausse presque au-delà le projet tourangeaux…

LUX est une lumière sonore mouvante qui confirme l’inventivité sensible des musiciens d’EZ3ekiel. Nul doute qu’elle devrait trouver à s’épanouir dans les chaudrons alchimiques des concerts.

EZ3kiel LUX, novembre 2014, 13 à 25 euros,
album en vente chez Ici d’Ailleurs
EZ3kiel en concert à Rennes, le 12 novembre 2014 à L’Etage

EZ3kiel :
Johann Guillon : guitare, programmation, claviers, EBow.
Stéphane Babiaud : batterie, vibraphone, percussions, claviers, voix.
Sylvain Joubert : basse, guitare, claviers.
Yann Nguema : visuels, technologie, machines.

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Thierry Jolif
La culture est une guerre contre le nivellement universel que représente la mort (P. Florensky) Journaliste, essayiste, musicien, a entre autres collaboré avec Alan Stivell à l'ouvrage "Sur la route des plus belles légendes celtes" (Arthaud, 2013) thierry.jolif [@] unidivers .fr

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