Joli titre que celui de « ispirazione Italiano » pour ce concert n°3 des ‘Essentiels’ de l’OSB qui recevait Enrico Onofri ! Il est vrai que les musiciens italiens ne manquent pas d’inspiration pour chanter la joie de vivre, la bonne humeur, le bon vin. Que dire de l’amour ! En revanche, il serait quelque peu réducteur de les cantonner à une forme de musique qui ne serait que légère et un peu superficielle. Ils sont parfaitement capables de profondeur. Enrico Onofri, pour ses deux concerts au TNB les 16 et 17 octobre, en a fait la démonstration.
Arcangelo Corelli, musicien romain au service des cardinaux et autres grands de son époque, ouvrira le bal avec un très beau concerto grosso en ré majeur OP. 6 n° 4. Deux violons et le violoncelle dialoguent avec l’orchestre et nous offrent l’occasion de découvrir Enrico Onofri, talentueux instrumentiste, qui a la curieuse particularité de ne pas utiliser de mentonnière à son violon, mais de passer sous le cordier un foulard qu’il noue autour de son cou lorsqu’il joue pour maintenir son instrument. Autre plaisir, celui de voir l’excellent supersoliste de l’OSB, Pascal Cocheril, lui donner la réplique avec talent et énergie. Un peu en retrait, eu égard à une partition plus modeste, Olivier Lecourt, premier violoncelle, fait montre de détermination et sait imposer ses belles notes graves face aux deux autres membres de ce concertino.
C’est avec Giovanni Paiselo qu’apparaît la mezzo soprano Julie Robard-Gendre. Appréciée du public rennais dont elle est bien connue, sa dernière apparition date d’une soirée « Révisez vos classiques » organisée à l’opéra de Rennes la saison passée. Dans l’interprétation de l’ouverture du barbier de Séville, il faut bien reconnaître qu’elle nous surprend agréablement, sa voix semble avoir pris de la maturité, son interprétation sobre et pleine d’émotion nous séduit franchement. Plus tard dans la soirée avec « folk songs pour voix et orchestre » de Lucciano Berio elle démontre une bonne capacité à s’adapter à des ambiances très contrastées. Ce recueil de différentes musiques se présente comme un voyage au cœur de cultures et d’esthétique qui n’ont que de très lointains rapports. Du « rossignolet du bois », qui a la douce mièvrerie des chants de troubadours du Moyen-âge en passant par « Loosin Yelav » la triste mélopée Arménienne, elle fait montre d’authentiques qualités vocales et d’interprétation. Un seul et tout petit bémol, la puissance vocale sur les notes graves n’est pas encore totalement au rendez-vous et parfois l’orchestre couvre un peu sa voix, mais ce n’est qu’un détail et Julie Robard-Gendre a séduit les visiteurs du TNB par une prestation assez remarquable.
L’OSB nous a fait découvrir en simultané l’œuvre de Ottorino Respighi et une sélection de photographies, projetée en arrière-plan, choisies par Enrico Onofri pour illustrer la suite n° 1, « airs et danses antiques ». Il est assez juste de constater que l’œuvre de Respighi dans le conscient collectif se résume presque systématiquement à la très fameuse trilogie romaine formée par : les fontaines de Rome, les pins de Rome et fêtes romaines. Il serait dommage de ne pas explorer les autres compositions de cet auteur prolixe. Les airs et danses antiques sont comme un exercice « à la manière de », exécuté avec malice et inspiration. Créées sur la base d’ un recueil de tablatures de luth françaises et italiennes du 17e siècle, ces musiques réemploient des tournures totalement surannées et pourtant pleines de charmes. C’est une forme de pastiche exécuté avec beaucoup d’humour que Stravinski qualifiait de « primitivisme raffiné ».
À l’occasion de ce concert, Marc Feldmann nous donnait quelques nouvelles de l’opération de crowdfunding menée par le bassoniste Marc Mouginot, dont nous relations l’exploit lors de la course des 100 kilomètres de Millau. Il reste encore du chemin à parcourir pour financer la formation musicale et à n’en pas douter, le touchant petit film présenté ces deux soirs, devrait contribuer favorablement à la progression des dons.
Soirée globalement agréable à laquelle a quand même manqué un peu de vraie folie italienne. Tout a été plutôt réussi, mais un peu trop policé, et l’on attendait (on souhaitait), quelques joyeux débordements à la manière de Gilles Apap ou Carlos Nunez, lesquels avaient réussi à dynamiter un public rennais toujours assez sage et respectueux. Cela ne s’est pas passé bon… tant pis… pas si grave !
Prochains concerts des essentiels de l’OSB – Etoiles du Nord
Concert n° 4 des Essentiels de l’OSB avec Noam Zur. Jeudi 22 octobre 2015 à 20h – Vendredi 23 octobre 2015 à 20h. Opéra de Rennes
Richard Wagner
Idylle de SiegfriedJean Sibelius
Valse triste, op. 44Magnus Lindberg
Concerto pour violon et orchestreJean Sibelius
Pelléas et Melisande, op.46