Le Palais Saint-Georges, Rennes vi(ll)e enchant(i)ée

Quant on présente à des amis en visite aussi bien le Palais Saint-Georges que le développement urbain de Rennes, on aboutit souvent à rappeler les liens étroits qu’entretiennent la municipalité de Rennes avec cinq promoteurs immobiliers, dont une banque – française mais grande adepte des paradis fiscaux – le Crédit Agricole. Dernière manifestation en date de cette solidarité de destin : l’arrêt soudain du projet hôtelier prévu dans le somptueux Palais Saint-Georges.

 

Bien qu’élu lieu idéal pour accueillir le Palais des Congrès de Rennes, le couvent des Jacobins lui a été préféré malgré l’opposition de nombreux Rennais, notamment de plusieurs élus, y compris de la majorité. Dès lors, le magnifique bâtiment construit pour l’abbesse Madeleine de La Fayette par les architectes lavallois Tugal Caris et Pierre Corbineau était promis à un autre destin : devenir un magnifique hôtel de luxe avec vue sur le beau parc éponyme. De fait, le précédent maire de Rennes, Daniel Delaveau (PS), souhaitait qu’il incarnât le symbole d’un tourisme de luxe dans notre bonne destination Rennes.

Mais patatras, la nouvelle maire de Rennes, Nathalie Appéré (PS), annonçait dans Ouest-France le 7 novembre 2014 l’arrêt de l’opération. « Le Palais Saint-Georges accueille encore des services municipaux et une caserne de pompiers. Il n’y a pas d’urgence », expliquait-elle. D’un revers de la main, l’élue mettait fin à l’un des plus ambitieux projets hôteliers de la capitale bretonne. Elle mettait fin à un programme initié par la Ville elle-même, pris en la personne de son prédécesseur.

Quelques semaines après, les langues commencent à se délier… » Le projet a été abandonné, car il faisait de l’ombre à une autre opération menée dans le centre-ville par le groupe Blot. Et pourtant, nos propositions étaient menées par des grands architectes, » exprime un proche d’un des deux derniers promoteurs recalés. Difficile de vérifier une telle information dans des dossiers où le secret est toujours de mise. « On le sait, si l’on dénonce ouvertement les petits arrangements à Rennes, bye bye les futurs marchés sur la ville » ajoute un spécialiste des appels d’offres publiques sur le territoire de la Métropole de Rennes.

Alors pourquoi l’élue rennaise est-elle revenue sur cette opération ? Unidivers a contacté la municipalité de Rennes à ce sujet, elle n’a pas souhaité répondre. Les élus se taisent et laissent libre cours aux supputations. La maire ne peut toutefois arguer d’un trop-plein d’offres hôtelières de luxe dans la mesure où ses prédécesseurs ont légitimé la construction du Centre des congrès sur l’ancien Couvent des Jacobins, place Sainte-Anne, afin justement de faire vivre… des établissements hôteliers.

A-t-elle voulu éviter une guerre des hôtels de luxe dans Rennes ? A-t-elle voulu jouer la carte renno-rennaise en privilégiant les opérations menées par des promoteurs rennais ? Avenue Janvier, le groupe immobilier Blot construit actuellement un nouvel hôtel Best Western, à la place de l’ancien hôtel Président. Il bâtira également avec le groupe Légendre un hôtel de luxe et une résidence hôtelière à la place du siège de la Banque populaire de l’Ouest. Tant mieux pour les promoteurs rennais et leurs employés ; tant pis pour les opérateurs Cogedim et Vinci.

Allez, pour finir, une dernière hypothèse : étant donné la profonde détestation qui règne entre l’actuelle mairesse et le précédent maire, l’arrêt du projet tiendrait également du règlement de compte personnel. Si, si, on vous l’assure : la gestion de l’intérêt général par les élus ne tient parfois qu’à des petites histoires d’egos…

palais saint-georges

Texte : Nicolas Roberti
Dessin : Michel Heffe

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Nicolas Roberti
Nicolas Roberti est passionné par toutes les formes d'expression culturelle. Docteur de l'Ecole pratique des Hautes Etudes, il a créé en 2011 le magazine Unidivers dont il dirige la rédaction.

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