Ces dernières années, le crochet, comme le tricot ou la couture, est redevenu une tendance et ce n’est pas la Fée Krochette qui dirait le contraire. La Rennaise Delphine fait partie de cette nouvelle génération de créateurs et créatrices qui s’inscrivent dans cette dynamique de consommation plus locale et artisanale qui attire de plus en plus les jeunes.
Les pulls en crochet que notre grand-mère nous offrait pour Noël et que nous avions honte de porter à l’école sont maintenant bien loin. Comme beaucoup de loisirs créatifs, les créateurs et créatrices se sont emparés de ces modes de conception afin de les moderniser, à l’image de La fée Krochette. À 23 ans, la jeune créatrice, étudiante en arts plastiques, partage ses créations sur Instagram avec le pseudonyme La fée Krochette : « Je cherchais un jeu de mots, ça va bien avec le côté fantastique des cagoules que je peux faire ».
Delphine a un univers bien à elle, tourné vers le féérique qu’incarnent ses cagoules. Après avoir passé un an aux Beaux-arts de Nancy, elle a décidé d’arrêter ses études pour travailler. C’est pendant cette période, il y a maintenant deux ans, qu’elle a commencé le crochet : « ça m’a donné envie de retourner dans l’univers de l’artisanat et l’art », explique Delphine. Cette dernière a toujours été manuelle donc cela lui a semblé assez naturel : « Une fois que j’y ai touché, ça m’a plu et je me suis lancée très vite ». Elle n’avait pas envisagé de vendre ses créations jusqu’à ce que son entourage lui en parle : « C’est parti d’un ami qui m’a demandé de lui faire une cagoule pour me l’acheter ensuite».
La création d’un univers féérique
Delphine est autodidacte et a appris à travers des tutos Youtube les bases techniques du crochet. La crocheteuse ne prévoit pas une préparation en amont. Elle a tendance à davantage improviser au fil de son inspiration et de ses créations: « Une bonne série et puis, c’est parti pour des fois plus de 10 heures ». Les pièces originales, qui nécessitent plus de réflexion et d’expérimentation mettent parfois plus de 15h à être réalisées.
Ses créations originale avec une dimension fantastique, tout le monde ne peut pas les porter : « Mon idéal serait de contacter des DJ, des personnes qui font de la musique et qui veulent se créer une identité ». Elle poursuit : « Certaines personnes m’ont contactée pour des manifestations féministes par exemple ». Pour Delphine, créer tout en portant des valeurs qui lui tiennent à cœur est essentiel.
Un mode de consommation qui favorise l’artisanat
La jeune créatrice est convaincue que cet élan de consommation plus douce est positif : « On revient à créer ses pièces, à avoir la satisfaction de faire les choses soi-même ou d’acheter à un créateur ou une créatrice. C’est un boycott de la fast fashion ». Le crochet s’est bien éloigné de sa connotation d’origine. Aujourd’hui, il n’est plus exclusivement réservé aux personnes âgées, ce qui permet à des artistes comme Delphine d’exprimer leur créativité à travers une pratique traditionnelle : « C’est marrant quand je parle de crochet avec des personnes âgées et que je leur montre ce que je fais, il y a un petit décalage, mais ça ne les heurte pas », observe la créatrice. L’accessibilité de ce genre de pratique permet à toutes et à tous de créer.
Pour l’instant, La fée Krochette n’en est pas à un stade professionnel : « Je fais des appels à projets ou je suis démarchée par des copains, copines », explique-t-elle. Se lancer à son compte peut parfois être difficile. Beaucoup de défis et d’obstacles peuvent se dresser sur son chemin. Delphine en a conscience : « Est-ce que je peux me financer sur une longue durée et travailler chez moi, seule ». La passion qu’elle met dans ses créations prend le dessus sur tous les autres questionnements : « Quand tu crées, tu poses pas forcément les questions, c’est naturel et au final tu te rends compte que ça a quand même de la valeur ».
Le crochet comme mode d’expression artistique
Aujourd’hui, Delphine a du mal à définir quelle voie elle aimerait emprunter. En restant dans son univers féérique, la créatrice voudrait donner à chaque cagoule une identité : « Je pensais même à faire des sortes de cartes Panini ou même un jeu de société, il peut y avoir comme projet avec chaque carte personnage », prévoit la créatrice. Cette dernière aimerait collaborer avec des festivals pour faire connaître son travail au grand public : « Il va y avoir un festival organisé par la boîte à meuh l’été prochain, pourquoi pas faire une édition bob vache pour l’évent ».
Utiliser le crochet comme outil d’expression artistique, c’est ce que font déjà plusieurs artistes à travers le monde. La pratique quitte sa fonction d’accessoiriste pour devenir un outil visuel : « J’ai trouvé plein de comptes Instagram, surtout aux Etats-Unis, qui font des trucs encore beaucoup plus fous et gigantesques », explique Delphine. Bien que chacune de ses pièces soit unique et qu’elle ne souhaite pas nécessairement les dupliquer pour le moment, elle envisage de faire des dérives de chaque création : « Pourquoi pas faire des séries limitées sans recréer la même colorimétrie, en ajoutant des bijoux ou des anneaux par exemple ». Au delà des créations en tant que telles, le travail de Delphine et de son amie Marie qui l’accompagne est artistique. Elles s’amusent à créer des personnages, en composant entre la cagoule et la tenue pour faire des clichés uniques.
Pour en voir davantage, ça se passe sur Instagram.