Résidant en France depuis 1966, le peintre Vladimir Velickovic, qui se veut toujours Yougoslave, citoyen d’un pays désintégré par une guerre d’une rare violence, n’a eut de cesse d’exprimer sans fioriture, dans son art la terrible violence qui aveuglément déforme et meurtrie les corps. Le réalisateur François Catonné a eu l’heureuse idée de lui consacrer un film au rythme bien accordé au caractère et à l’œuvre du peintre.
Né en 1935 à Belgrade, Vladimir Velickovic expose posément son parcours. Artiste autodidacte qui ne fréquenta jamais un cours de dessin ou une école d’art, il se forme seul, en se passionnant pour les livres et fréquentant les rares musées auxquels il avait accès. Ce qui ne l’empêche pas d’exposer son travail dès l’âge de seize ans et de remporter en 1965 une bourse de six mois en France. Il arrive à Paris en 1966 et il s’établit alors en France…
Sans musique redondante ou mise en scène pesante, le réalisateur laisse libre cours à la parole et aux gestes de l’artiste. Celui-ci dans des séquences en noir et blanc, déroule son parcours, explique son travail, ses causes, mais sans jamais s’appesantir sur une exégèse unilatérale ou des considérations trop techniques. Paroles d’évidences d’un homme qui vit totalement par et pour ce qu’il fait. Les séquences en couleurs dans lesquels est montré l’homme au travail sont éloquentes. Jamais grandiloquentes alors même qu’il y a quelque chose de très fort, de très mystérieux, à regarder ce peintre « revenir sur la toile », intervenir, remodeler un détail, debout face à ces tableaux de grande dimension. Car depuis longtemps les œuvres de Velickovic sont « immenses ». En cause selon lui, un certain réalisme, mais surtout la nécessité d’un dialogue « corps à corps » entre les corps représentés et le spectateur.
Velickovic explique l’agressivité et la violence sanguinaire qui toujours hantent ses toiles. Il s’agit d’un refus. Refus de figurer un monde de paix alors « que le monde qui m’entoure n’est pas un monde de paix ». Volonté de tendre un miroir à la constante agressivité de notre espèce. Exprimés de façon sereine, filmée avec précision et affection, la parole et l’art de Vladimir Velickovic s’illuminent. Beauté et vérité ne sont jamais plus éclatantes qu’au cœur du noir le plus profond. Peut-être sera-ce finalement l’alliance de la beauté et d’une cruelle lucidité qui sauvera le monde…
Vladimir Velickovic, Le choix du noir, DVD, deux documentaires de 52mn et de 26mn, François Catonné.