Il y a toujours une petite appréhension, une sorte de frisson à l’ouverture d’un festival. C’était le cas jeudi dernier lors de la soirée d’inauguration du Grand Soufflet à Rennes. Autant en raison de la découverte du choix des organisateurs que par le retour des vibrations d’un instrument qui rythme un événement de plus en plus ancré dans le paysage rennais, voire brezhillien. Au bout de 18 ans d’existence, le festival a toujours su évoluer, s’adapter et s’ouvrir à des pays et des styles qui donnent la note belle à l’accordéon. Pour cette édition, bienvenue au Mexique, à un folklore et des mélanges qui détonnent. Sous le chapiteau, le ton est donné avec une fresque d’une tête de mort aux couleurs fluorescentes, la calavera.
En ouverture, le thème est donné : la soirée sera Cumbia – style musical centraméricain, voire sudiste – mais ce soir avec une formule particulière. Il y a d’abord une basse, avec un sont fort et percutant, et l’irruption d’un batteur hirsute qui bat le rythme avec une exécution puissante. Sous le combo de ces deux instruments, une ambiance un peu rock-punk avec une bande musicale de cuivre électro annonce une chaleur musicale. Déchaîné, Camilo Lara arrive en sautillant sur scène avec pour mot d’ordre… Cumbia. Installé derrière ses machines et autres samplers, il suscite un véritable melting pot.
Entre rock et electro, ska et hip-hop aux paroles engagées et poétiques, une alchimie se crée sans jamais savoir où se dirige le groupe pour le plus grand bonheur musical et dansant du public avec qui le groupe interagit à chaque fin de chanson. Il est question de la mégalopole qu’est Mexico, des relations humaines et d’autres revendications politiques plus ou moins sérieuses – on pense par exemple aux t-shirts qu’arbore fièrement le groupe ; Cumbia is the answer ou Give Cumbia a Chance.
Mais quid de l’accordéon ? Il se distille de-çi delà et prend vie en touches et soufflets sous les doigts de Robert Santiago. En invité de luxe, il distille durant plusieurs morceaux les accords de ce piano à bretelle avec une rapidité d’exécution qui n’a d’égal que ses entrées sur scène et le plaisir qu’il semble prendre à venir se mêler pour jouer au sein de cette formation éclectique.
Car à bien y réfléchir, voilà la leçon de cette édition mexicaine du Grand Soufflet : à l’image de la vie mexicaine, de son histoire et de ses cités, sa musique – et ce Mexican Institute of Sound – propose un métissage qui loin de rebuter se révèle alléchant.