Avec Il fallait bien les aider, François-Guillaume Lorrain livre une enquête journalistique et historique

françois guillaume lorrain

Le sous titre de l’ouvrage de François-Guillaume Lorrain paru chez Flammarion dit tout : « Quand des Justes sauvaient des juifs en France ». À travers une quinzaine de cas, l’auteur lève le voile sur ces personnes qui cachèrent des milliers de Juifs pendant la seconde guerre mondiale, en toute humilité et humanité.

« Justes ». Existe-t-il un mot plus approprié, plus exact pour définir ces « non juifs qui ont aidé des juifs » sans « avoir reçu aucun argent des gens qu’ils ont sauvé », pendant la seconde guerre mondiale? Probablement pas tant ces deux syllabes renferment la capacité des Hommes à assumer leur statut d’êtres pensant et aimant. La France restera longtemps à la traine pour cette reconnaissance créée juridiquement en 1953 par l’état d’Israël mais qui débute réellement le 1er février 1963 avec enfin, la recherche effective des Justes dans le monde entier. Les historiens, les cinéastes, les écrivains, l’état français s’intéresseront peu à leur détection comme si la Collaboration de Vichy et la participation des corps constitués aux rafles recouvraient cette Histoire d’un voile sombre. Il faudra le discours du 16 juillet 1995 de Jacques Chirac à l’occasion de la commémoration de la Rafle du Vel d’Hiv pour qu’enfin les « Justes » en France soient l’objet d’attention et de recherches. Cette déclaration tant attendue s’accompagne, comme un contre balancier politique indispensable, d’une valorisation des « bons » français ceux qui, auraient sauvé les deux tiers de Juifs non déportés. À partir de cette date, les Justes français vont être enfin cherchés, reconnus et honorés.

C’est dans ce processus que s’inscrit l’ouvrage de François-Guillaume Lorrain, journaliste au Point, responsable de la rubrique Histoire. Chargé par hasard d’une commémoration d’une Juste, Mathilde Gauthier, il s’étonne du peu de résonance nationale de ce mouvement, décide de s’intéresser à son histoire et de recueillir les derniers témoignages des survivants presque centenaires, ou de leur famille, leurs amis, leurs voisins. Le temps presse et seuls les écrits peuvent rendre un dernier hommage à ces sauveurs. Le journaliste va ainsi enquêter sur une quinzaine d’histoires personnelles, retournant sur les lieux de sauvetage, pour recueillir la parole.

françois guillaume lorrain

Il fallait bien les aider, ce titre révèle l’état d’esprit des Justes qui conçoivent leurs actions comme naturelles et allant de soi. Odette Blanchet-Bergoffen et Jacqueline Balle, deux survivantes rencontrées par l’auteur ne disent rien d’autre: « C’était des réfugiés comme tout le monde, on faisait comme si c’était des amis, des voisins, j’ai eu l’impression de faire ce qu’il fallait faire, sauver les gens, qu’ils soient juifs ou n’importe quoi, on sauvait, c’était tout, on ne regardait pas si c’était Pierre ou Paul, que vous soyez juifs ou catholiques, vous voulez vivre » déclare cette dernière, blanchisseuse dans un château du Limousin recueillant des enfants. L’évidence est omniprésente chez ces Justes, comme leur absence totale de demande de reconnaissance. Ce sont des tiers qui vont entamer les procédures. Une autre réalité ressort de l’enquête minutieuse: pourquoi Paul et Gisèle, et pas Martine et Michel? Les histoires recueillies disent souvent que ce sont des chaînes humaines qui ont agi. Le facteur, le boulanger, la voisine, eux aussi ont aidé mais resteront dans l’anonymat pour toujours, faute de témoignages écrits.

L’enquête emplie d’humanité, dit le bien, la fierté d’être Homme. En creux, elle livre aussi un autre message: le même Homme est capable du pire, car à côté de ces passeurs de bien, jaillissent en filigranes les dénonciateurs, les pleutres, auteurs de fautes majeures et mortelles mais aussi de petites lâchetés : « Si vous voulez rester, rester, mais je vous enlève le duvet du lit », déclare une propriétaire d’un logement. De la bonté extrême à l’abjection la plus sordide, cet ouvrage nous fait voyager dans les recoins cachés de l’âme humaine, avec un corollaire qu’exprime clairement le fils d’un Juste, Jean-Pierre Foucault, animateur télé : « (…), moi, je ne sais pas si j’aurais pris la décision de cacher des Juifs ou non, si j’aurais eu peur ou non, si j’aurais aidé ou non ». Question abyssale qui nous renvoie à nous même, à nos croyances, à nos convictions, à nos valeurs.

Il fallait bien les aider. Quand des Justes sauvaient des juifs en France de François-Guillaume Lorrain. Editions Flammarion. 340 pages. 23€.

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Le duel Anquetil Poulidor sur les pentes du Puy-de-Dôme en 1964, les photos de Gilles Caron dans le Quartier latin en Mai 68, la peur des images des Sept boules de cristal de Hergé, les Nus bleus de Matisse sur un timbre poste, Voyage au bout de la Nuit de Céline ont façonné mon enfance et mon amour du vélo, de la peinture, de la littérature, de la BD et de la photographie. Toutes ces passions furent réunies, pendant douze années, dans le cadre d’un poste de rédacteur puis rédacteur en chef de la revue de la Fédération française de Cyclotourisme.

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