Le festival Les Embellies de Rennes fête ses vingt ans du 20 au 24 mars 2018. L’occasion de découvrir de nouveaux talents avec une programmation rock, pop, folk, électro au Théâtre du Vieux Saint-Étienne notamment mais aussi à l’Ubu ou à la Maison des Associations. Présentation lumineuse.
D’abord nommé Bar’Baries puis Les Embellies, le festival a accueilli de « grands noms » de la Chanson comme Têtes Raides ou Pauline Croze pour ensuite faire le choix de privilégier une programmation composée majoritairement d’artistes émergents. Comment déterminez-vous aujourd’hui les artistes qui se produiront au festival ?
Stéphanie Cadeau : Je fonctionne beaucoup au coup de cœur sur des choses que je peux entendre, que je peux voir en concert. Au début, on a bénéficié de groupes comme Têtes Raides qui étaient en plein essor. Il y avait un gros focus sur la chanson française en France avec d’autres noms comme Thomas Fersen ou Brigitte Fontaine. Au tout début, on était surtout sur des artistes bien connus du grand public, qui remplissaient bien les salles. On était simplement sur de l’organisation. Petit à petit, on a commencé à accompagner des artistes en développement et généralement locaux. Je m’attache aussi à essayer de mener pendant le festival, cette action développement qu’on mène le reste de l’année. L’idée est de proposer des artistes découvertes qui sont sur des premiers concerts, un premier album. C’est à l’intuition, au coup de cœur. Il m’arrive parfois de programmer des choses que je n’ai pas eu l’occasion de voir mais si j’ai été séduite tout de suite à l’écoute ou en visionnant des vidéos, j’ai envie de programmer. Il y a aussi une part de collaboration avec d’autres programmateurs qui me conseillent. Ce sont plus des programmateurs en dehors de Rennes, l’idée est de proposer des choses qui n’ont pas trop été jouées à Rennes ou peu. Il m’arrive souvent de finir une programmation en allant aux Bars en Trans qui sont souvent des premières scènes aussi. C’est généralement des gens sur le reste de la France qui nous donnent des conseils si eux-même ont programmé ou accompagné un groupe. L’idée est d’avoir envie de défendre les artistes qui jouent au festival, d’en faire la promotion et de les faire découvrir au public.
Quel est l’état d’esprit des Embellies ?
Stéphanie Cadeau : A l’époque des Bar’Baries on était tous vraiment très sensibles à la chanson française. Petit à petit nos goûts ont évolué et le festival a pris un virage. Aujourd’hui on va plus vers le rock. Ça reste assez vaste. On peut très bien trouver des choses très indépendantes comme le krautrock ou le math rock comme des sons électro. L’idée est que la palette rock reste assez large. On ira cependant jamais vers les musiques du monde même si cela peut être des choses qu’on peut aimer.
Des animations ont lieu tous les jours de 17h à 20h et le samedi de 15h à 17h en entrée libre avant les concerts. Quels seront les temps forts de l’édition 2018 ?
Stéphanie Cadeau : Les premières années on se posait dans la salle de la Cité. On a vécu de belles années dans cette salle. Après, réduisant notre programmation en faisant moins de têtes d’affiche, nous avons moins pu faire de concerts là-bas. La salle est aussi en travaux en ce moment. Ça nous manquait un petit peu d’avoir ce lieu central. On va à l’Ubu, à l’Antipode, au Jardin Moderne… même si on aime beaucoup travailler dans ces lieux là car nous y sommes très habitués et très attachés, on avait cette envie de réussir à trouver un lieu central pour se poser, où le public pourrait plus facilement nous identifier aussi.
La nouveauté pour nous est de se poser au théâtre du Vieux Saint-Étienne du 21 au 24 mars. La veille, le 20 mars, il y aura une ouverture du festival à la Maison des Associations, une clôture le samedi à l’Ubu. On sera au Théâtre du Vieux Saint-Étienne pour proposer des concerts mais également avant avec des installations visuelles et sonores. Ces actions sont issues d’une action culturelle que nous menons à l’école élémentaire Moulin du Comte avec le collectif Vitrine en Cours et le musicien Grégory Hairon. Ce sont des travaux faits avec les enfants de l’école dont il va ressortir trois installations visuelles et sonores qui seront proposées au Théâtre du Vieux Saint-Étienne gratuitement. Il y aura aussi une exposition pour fêter les vingt ans du festival avec vingt visuels de ces vingts années. Le visuel est l’identité du festival et nous y sommes attachés. Ce sera un point information et un point billetterie où il sera possible de retirer son billet sans frais de location. Il y aura aussi un bar et une restauration. Il y aura quelques temps forts : le vernissage des installations en début de soirée, des émissions de radio avec nos partenaires C-Lab et Canal B et aussi un blindtest le vendredi.
Le mardi soir à l’ouverture du festival, nous accueillerons la création Ô Lake [Extended]. Chaque année nous accueillons un artiste en résidence. Cette année c’est Ô Lake, Sylvain Texier qui a déjà proposé deux spectacles : The Last Morning Soundtrack et Fragments. Il propose son nouveau spectacle en duo depuis à peine un an. L’idée est d’en proposer une version élargie, « extended », il sera rejoint par un trio à cordes et un percussionniste. Ce sera six musiciens sur scène. On fait l’ouverture du festival avec la première de ce spectacle qui est créé à l’Ubu à Rennes et au VIP à Saint-Nazaire. L’idée est de continuer d’accompagner ce spectacle sur le reste de l’année et de le diffuser sur le reste de la France en utilisant aussi Les Embellies pour inviter les programmateurs.
Le samedi, à l’Ubu, nous fêterons les vingt ans du festival. On démarrera avec une soirée classique de concert avec Arm, ancien leader de Psykick Lyrikah. Il y aura aussi Madensuyu et Drame. On terminera sur une soirée « tardive » avec trois DJs qui sont des personnes proches de l’association et qui proposeront une « boom » pour fêter les vingt ans du festival. C’est important pour nous de fêter ces vingt ans à l’Ubu car c’est là-bas que nous avons fait nos premières armes et c’est grâce à l’Ubu et à l’association Trans Musicales qu’on a pu démarrer il y a vingt ans.
Tous les soirs au théâtre du Vieux Saint-Étienne sera proposé deux ou trois artistes. La première soirée est plutôt folk avec Emily Jane White et House of Wolves. C’est une tournée commune des deux artistes. Ils jouent chacun leur tour puis ont un set qu’ils font en commun. La deuxième soirée sera plutôt rock noise avec Héron Cendré, Miët et Veik, un trio de Caen. Le vendredi soir sera plutôt pop-électro avec Yachtclub et Deux Boules Vanille. Le samedi après-midi on recevra Jaune et Léonie Pernet.
L’association mène des actions culturelles durant l’année et durant le festival. Un projet entre l’école élémentaire Moulin du Comte et le collectif Vitrine en Cours a lieu cette année. Pouvez-nous nous en dire quelques mots ?
Stéphanie Cadeau : Cela fait cinq ans que l’on travaille avec l’école Moulin du Comte, école située route de Lorient dans le même quartier que nos bureaux. Depuis trois ans le partenariat est devenu vraiment important dans le sens où on le mène toute l’année scolaire, de septembre à juin et qu’il est soutenu par le dispositif Jumelage des services Éducation Artistique et Culturelle de la Ville de Rennes et de la DRAC Bretagne. La première année, nous avons fait une chorale rock avec la classe de CM2 et trois artistes rennais. L’année suivante, nous avons fait une chorale pop et pour la première fois nous avons proposé des activités à toutes les classes avec le groupe Bumpkin Island. Cette année nous avons continué à proposer des activités aux sept classes avec le projet « La Petite Fabrique d’Images». C’est moins musical et plus visuel. Nous avions envie de faire évoluer la proposition à l’école. Nous travaillons avec le collectif Vitrine en Cours qui sont deux projectionnistes qui travaillent uniquement la matière argentique, c’est à dire la diapositive, le film 16 mm. On s’est rendu compte, même si on s’en doutait, que quand on parlait aux enfants de photos et d’images, le mot pellicule a mis beaucoup de temps à venir. Les enfants parlaient de téléphone. L’idée est de leur faire découvrir ces matières anciennes qu’on utilise moins mais qui existent toujours. Dès la journée de présentation les enfants ont été très emballés.
Les ateliers prennent plusieurs formes. On leur fait créer des visuels sur des supports plus ou moins grands en fonction de la difficulté. Les plus grands vont travailler sur des supports plus petits comme le film de 8 mm de large. On peut aussi leur faire travailler sur la diapositive ou des grands calques pour appareils de rétro-projection. Les façons de travailler sont variées. Cela peut consister à gratter la matière argentique qui est noire, cela fait un effet. Cela peut être de la peinture ou du coloriage au feutre. Il y a eu d’autres ateliers sur les notions de négatif et positif. Il y a eu des ateliers de développement photo. Un laboratoire photo a été installé dans l’école. Cet après-midi va être filmé une grande boucle sur du 16 mm avec une très ancienne caméra. Le thème central choisi avec la directrice de l’école est la cours de récréation. Cet après-midi on va faire défiler tous les enfants et on va filmer leur visage dans la cours de récréation. L’idée est d’en faire une seule boucle unique qui tournera sur de vieux appareils de projection. C’est une des installations qu’il y aura au Vieux Saint-Étienne.
Il y a aussi le musicien Grégory Hairon connu sous son projet Gregaldur. Maintenant il a changé de nom pour Héron Cendré. Il jouera aux Embellies d’ailleurs. Il est intervenant musicien. L’idée est de poser de la musique sur toutes ces images. Avec les enfants, toujours avec des appareils analogiques, pas de numériques, ils ont enregistré toute sorte de son dans la cours. Le thème de l’eau a été proposé par Vitrine en Cours. Ils ont capté du son avec de l’eau. Grégory va utiliser tous ces sons et à partir de là en faire la matière sonore autour des installations. Il y a eu une restitution au moment de Noël à l’école. On a montré aux parents ce qui est fait avec les enfants. Les parents étaient enchantés de voir des diapositives, de vieux appareils de projection… Les installations au Vieux Saint-Étienne seront une autre forme de restitution. Les parents seront invités à venir voir avec les enfants les installations. On projette une ultime restitution dans l’école à nouveau au mois de juin pour fêter la fin de « La Petite Fabrique d’Images».
Patchrock est l’association organisatrice du festival. Comment fonctionne-t-elle ? Combien de salariés emploie l’association à l’année et combien de bénévoles leur viennent en appui durant le festival ?
Stéphanie Cadeau : L’association existe depuis 1996. Aujourd’hui, il y a quatre salariés. Je fais la direction artistique. Il y a une personne à la coordination qui gère tous les aspects techniques, la coordination de l’action culturelle, des artistes. Il y a une personne à la communication et une personne qui s’occupe de la diffusion des spectacles qu’on accompagne.
Tout au long de l’année nous avons un conseil d’administration et un bureau qui sont actifs et suivent les projets de l’association. Pendant le festival une vingtaine de bénévoles vient en renfort sur chaque lieu à tous les postes sauf pour les postes techniques. Là on embauche des intermittents du spectacle. Toute l’année nous embauchons une cinquantaine d’intermittents du spectacle très régulièrement en technique et pour les artistes de nos spectacles.
Comment qualifierez-vous l’ambiance de ces quatre jours de festival ?
Stéphanie Cadeau : Comme c’est notre première au Vieux Saint-Étienne, nous espérons en faire un lieu convivial et que le public s’y sentira bien. Le maître-mot est la découverte et le soutien aux artistes en développement.