Armé de ses pochoirs et de ses bombes, RNST livre son sentiment d’indignation sur le MUR de Rennes dans une œuvre poétique engagée en soutien à une famille irakienne dont les enfants sont scolarisés dans la même école que sa fille. Jusqu’au 31 mars 2022, ce nouvel invité s’empare du tableau noir, sis 24 rue Vasselot, et a un tas de choses à dire…
Dans une composition teintée de gris et de noir, et relevée d’un rouge vif saisissant, les courbes et couleurs brutes du graffeur RNST s’inscrivent sur le MUR de Rennes jusqu’au 31 mars 2022. Loin d’être un inconnu dans la capitale bretonne, l’artiste affiche un de ses portraits, caractéristiques de son travail, sur le tableau noir du 34 rue Vasselot. Il propose une œuvre engagée et humaine en soutien d’une famille irakienne dont les trois enfants sont scolarisés dans l’école de sa fille… Un travail poétique, et politique, à l’image de sa pratique artistique.
« Je dessine et bricole depuis toujours », commence RNST. Avant de devenir le personnage que l’on identifie aujourd’hui sous cet alias, le Dijonnais a roulé sa bosse, le plus souvent à la nuit tombée, dans les rues des villes qu’il traversait. Après un an sur les bancs d’une école des beaux-arts, mais peu convaincu par l’enseignement, le graffeur tire sa révérence de bon cœur, préférant apprendre en autodidacte les techniques qui construiront son identité. « J’ai commencé le pochoir avant le graffiti, c’était la technique la plus simple pour reproduire un dessin », déclare-t-il. « Le tracé direct à la bombe est plus lié aux lettrages dans le graffiti. »
Un CAP tailleur de pierre et une petite agence de design plus tard, RNST naît en 2008-2009 de l’envie de s’exprimer sur ses convictions, ses valeurs. Laissant sa première identité exclusivement vandale en retrait, le personnage de RNST se construit iconographiquement et graphiquement, et s’épanouit dans la revendication jusqu’à devenir celui qui existe aujourd’hui. C’est dans ce bouillonnement artistique, nourri par une âme de révolté, que la sérigraphie lui apparaît comme l’outil approprié à sa pratique. « C’est un tout. Les techniques du pochoir et de la sérigraphie, et l’affichage ont créé mon univers graphique et le personnage de RNST. » Le pochoir et l’affichage deviennent rapidement ses armes absolues pour entamer sa révolution créative. Il détourne l’outil de prédilection de la propagande pour mettre les populations opprimées sur le devant de la scène.
La démarche créative de RNST est alimentée par le sentiment d’injustice et d’indignation, par la révolte et la rage de combattre. Elle explose dans des compositions coups de poing aux lignes nettes et aux couleurs crues. Particulièrement inspiré par le courant de la culture punk, le DIY (Do It Yourself), la culture politique de la propagande, et l’esthétique du collectif d’artistes français Bazooka (1974-1978), il a créé un principe graphique autour d’une image sombre relevée d’une ou deux couleurs, notamment le rouge et le rose. « Dans le pochoir et la sérigraphie, une couche correspond à une couleur. Plus tu mets de couleurs, plus le pochoir devient compliqué à travailler. »
De ce processus créatif naît une image efficace et authentique. Les couleurs tranchées rajoutent de la dureté, intensifient le discours et matérialisent l’énergie avec laquelle l’artiste crée. Pour autant, la violence du propos, à coups de cocktail Molotov, masque à gaz, fil barbelé ou batte de baseball, est pacifiée par les figures des femmes et d’enfants, filles et garçons, personnages principaux de sa vendetta artistique. « Ça dépend du sujet, mais le propos se prête à cette identification », souligne-t-il avant de préciser : « L’image de l’enfance adoucit le discours même s’il est colérique, ça glisse tout seul. Mais l’enfant c’est aussi pour dire qu’on est tous restés un petit enfant au fond de nous-même ».
Dans les couleurs crues de RNST, des mots incisifs s’immiscent et accompagnent les regards expressifs, à l’image de “WAR” sur le MUR de Rennes. Ils résonnent avec l’image tels la bande dessinée, dans « des relents du travail d’affichiste », comme le souligne celui qui fut graphiste plusieurs années. « J’ai fait beaucoup de graphisme, le lien entre le slogan et l’image reste important pour moi. Ça donne un deuxième sens à l’image. » De la même manière, les foulards et les masques, liés au monde du graffiti, parlent avant tout de la clandestinité et des populations opprimées – migrants, ouvriers et clandestins, mais pas seulement. Prodiguant une forme d’anonymat, ils permettent, quelque part, au passant de s’identifier. « C’est un peu le principe du travail de rue. À chacun de faire son interprétation », conclut-il.
Après deux années calmes, RNST ne chômera pas en 2022. Vous pourrez retrouver son travail au MUR d’Aix-les-bains en mars et au MUR de Mulhouse au mois d’août. Il fera également un petit crochet au Lavomatic à Paris au mois de juin.
Adresse
Le MUR de Rennes, 34 rue Vasselot, 35 000 Rennes
Site du MUR de Rennes