Imaginez une maison d’édition où chaque nouveau livre serait pure merveille. Imaginez une véritable ligne éditoriale tenue par un engagement moral. Imaginez un livre attentif à la conception rigoureuse des belles choses. Un livre respectueux de l’environnement. Favorisant l’emploi local. Conçu, fabriqué et imprimé en France avec des encres végétales. Un livre politique sans en avoir l’air et qui serait, en quelque sorte, une diététique culturelle à lui seul. Bref, imaginez que cet éditeur et ce livre existent. Son nom : Plume de carotte. Son titre : Quand la nature inspire les peintres. Son auteur : Hélène Mugnier. Après la lecture d’un tel ouvrage, vous ne regarderez plus la nature de la même façon, et vous n’irez pas davantage au musée avec la même innocence.
Pourquoi le blé, la rose et le raisin sont-ils omniprésents dans les tableaux de maîtres ? Pourquoi le coquelicot est-il devenu la fleur impressionniste par excellence ? Saviez-vous que Renoir et Bonnard sont les peintres qui ont le plus travaillé la fleur de mimosa ? Et Van Gogh, imagine-t-on un instant qu’un autoportrait se dissimule dans ses tournesols ? L’étude commence en -800 avant notre ère et prend forme autour d’artistes célèbres à travers les tulipes de Rubens, la pomme de Magritte, mais aussi les sapins de Peter Doig, les anémones de Klimt, Tiepolo et la Jacinthe, Signac et les figues, Warhol lorsqu’il s’inspire de fruits et légumes… Ils y sont tous. En 200 toiles, Hélène Mugnier raconte l’évolution de notre rapport à la nature depuis l’antiquité jusqu’à nos jours. Il ne fallait pas moins d’une historienne de l’art (diplômée de l’école du Louvre) pour réunir les amoureux des plantes et les amateurs de peintures ; manière de transcender l’écologie par le détail du pinceau, et rendre accessible une certaine idée du partage. Et s’il m’arrive d’offrir les livres que je chronique à ceux qui les réclament, celui-là je le garde.
Jéome Enez-Vriad
Quand la nature inspire les peintres d’Hélène Mugnier, éditions Plume de Carotte, 196 pages en couleurs sur papier glacé – 35,50 €