PETER VON POEHL, « LA SOLITUDE PEUT PROVOQUER UN CERTAIN VERTIGE »

Ses chansons sont élégantes, aériennes, sa voix délicate, presque androgyne. Originaire de Malmö, au sud de la Suède, le chanteur-compositeur Peter von Poehl a sorti en avril 2017 son quatrième album, Sympathetic Magic. Il le présentera en concert à Rennes sur la scène de l’Étage le 25 février 2018 à l’invitation des Tombées de la Nuit.

peter von poehl
Peter von Poehl

Souvent, pour qualifier votre musique, Peter Von Poehl, les journalistes vous décrivent comme une fée. Pourquoi cette comparaison ?

Peter von Poehl : Je ne sais pas… Sur mon premier album, j’avais un morceau, intitulé « The Tooth Fairy  [« la fée des dents », version anglo-saxonne de la petite souris, ndlr]. Peut-être est-ce à cause de ça ? J’avais écrit cette chanson après un passage malheureux chez le dentiste (qui m’a en fait presque tué !).

Dans votre dernier album sorti en avril 2017, Sympathetic Magic, vous avez commencé à introduire des tonalités plus électroniques…

Peter von Poehl : C’est vrai, en général, je n’ai jamais été très à l’aise pour travailler avec des synthés – trop de boutons et de possibilités – et je préférais les instruments acoustiques ou électromécaniques. C’est un peu par chance que ces « nouveaux » sons se sont glissés dans cet album.

J’avais quelques claviers qui trainaient dans le grenier de mes parents depuis mon adolescence (des trucs bon marché, que j’avais achetés pour presque rien à l’époque). A un moment, ils m’ont menacé de les envoyer à la décharge sauf si je les reprenais. Une fois sauvés et ramenés dans mon petit studio d’enregistrement à Paris, j’ai commencé à les tripoter, à chercher des idées. C’était un peu comme l’épisode de la Madeleine de Proust ; ces instruments parlaient un langage que je comprenais !

Dans un entretien auprès de La Voix du Nord, vous disiez que vous aimiez « créer des accidents dans les chansons ». Qu’est-ce que cela signifie ?

Peter von Poehl : J’ai eu la chance de rencontrer George Martin [le producteur des Beatles, ndlr] avant son décès. Je me suis toujours demandé pourquoi les enregistrements des Beatles sont parsemés de bruit : des bavardages, des bouteilles qui tombent, etc… Je voulais savoir si c’était fait intentionnellement, ou si c’était juste par accident, ou négligence. George Martin m’a répondu que BIEN SÛR que c’était intentionnel ; c’est là où se trouvent les très bonnes choses, dans chaque imprévu !

Je suis assez d’accord avec ça. Avec le temps, ce que j’ai tendance à apprécier le plus dans mes albums, c’est précisément les idées qui sont arrivées là par accident.

Vous avez composé plusieurs bandes-originales de film. Est-ce que c’est différent pour vous de composer une chanson pour un film ?

Peter von Poehl : C’est très différent. Il y a quelque chose de presque « binaire » avec la musique et les images. Ou bien ça marche, ou bien ça ne marche pas. Vous le voyez directement : si ça « colle », ou bien si la musique devient quelque chose « par-dessus » l’image. J’aime énormément ce côté collaboratif, quand on travaille sur des films. Un de mes amis, un réalisateur bien connu, m’a dit une fois que faire des films était pour lui la chose la plus proche de jouer dans un groupe de rock.

C’est assez vrai : il y a une large part de psychologie. Il y a une certaine dynamique de groupe qui est très différente à quand je travaille sur mes propres albums. Si je suis davantage un « touriste » dans le monde – ou plutôt dans la vision du monde – du réalisateur avec qui je travaille, je me retrouve ensuite confronté à mes propres chansons, ça veut dire d’un côté une liberté totale, mais aussi d’un autre côté une certaine solitude qui peut provoquer un certain sens du vertige parfois…

Est-ce que vous pensez qu’un film peut influencer l’écriture de vos chansons ?

Peter von Poehl : Chacune de mes collaborations où j’ai le privilège de participer apporte quelque chose de nouveau à ma « boîte à outils » musicale. Ça peut être des idées sur comment approcher les sons, les mélodies, ou des méthodes de travail ou d’écriture. Mais plus profondément, je pense que c’est – comme je l’ai suggéré avant – une question de comment un artiste perçoit le monde qui nous entoure et comment il ou elle choisit de le décrire. C’est là le vrai défi, et c’est probablement ce qui m’inspire le plus quand je travaille avec un réalisateur.

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