C’est une histoire digne d’un scénario de comédie italienne ou d’un roman picaresque. Trois religieuses autrichiennes, âgées de 82 à 88 ans, ont décidé début septembre de prendre leur destin en main. Contre l’avis de leur diocèse et de la maison de retraite où elles avaient été placées, elles ont regagné clandestinement le couvent de Goldenstein, près de Salzbourg, où elles avaient vécu pendant des décennies.
Bernadette, Regina et Rita, les trois sœurs insoumises
Sœur Bernadette (88 ans), sœur Regina (86 ans) et sœur Rita (82 ans) sont les dernières survivantes d’une communauté qui avait marqué des générations d’élèves dans le pensionnat et l’école tenus par le monastère. Placées en maison de retraite en 2023, elles n’ont jamais accepté cette séparation forcée avec les murs qui avaient abrité leur vocation. « Nous n’avons jamais quitté le couvent de notre plein gré », affirment-elles aujourd’hui.
Une évasion savamment organisée
Loin d’un simple caprice, leur retour a été minutieusement préparé. Les trois religieuses ont bénéficié de la complicité d’anciens étudiants, de voisins, mais aussi d’un gardien et même d’un serrurier pour franchir les portes closes du monastère désormais désaffecté. Une opération menée avec autant de détermination que de discrétion, qui a pris de court les autorités locales.
Un couvent délabré, mais habité de mémoire
Le château de Goldenstein, niché sur les hauteurs d’Elsbethen, n’est plus entretenu depuis plusieurs années. Les religieuses y vivent désormais dans des conditions précaires, sans chauffage ni confort moderne. Pourtant, pour elles, ce retour sonne comme une renaissance : « Nous préférons vieillir ici, au milieu de nos souvenirs, plutôt que dans une chambre impersonnelle », expliquent-elles à la presse autrichienne.
Entre amusement et embarras des autorités
Le diocèse, qui avait organisé leur placement en Ehpad, ne cache pas son embarras. Les habitants, eux, oscillent entre admiration et sourire attendri devant ces octogénaires au caractère bien trempé. Dans les journaux comme sur les réseaux sociaux, les surnoms de « nonnes fugueuses » ou « sœurs insoumises » fleurissent, transformant l’affaire en petit phénomène médiatique européen.
Plus qu’une fugue : une leçon de liberté
Derrière l’anecdote pittoresque se dessine une question plus sérieuse : comment respecter la volonté et la liberté des personnes âgées, même lorsqu’elles semblent fragiles ? L’histoire de Bernadette, Regina et Rita illustre avec force que l’attachement à un lieu, à une communauté, à une mémoire peut être plus fort que toutes les injonctions administratives.
En attendant de savoir si elles pourront rester légalement dans leur ancien couvent, les trois religieuses goûtent une liberté retrouvée. Et leur geste résonne comme une prière vivante, joyeuse et têtue : celle de rester fidèles jusqu’au bout à leur maison spirituelle.