DE BREST À ASTRAKHAN, LE LONG VOYAGE INITIATIQUE DE JEAN-ELDAR OLLIVIER

Adopté lorsqu’il avait quatre ans, Jean-Eldar Ollivier a passé la majeure partie de sa vie à Brest. De la Russie, son pays d’origine, il ne se rappelle presque rien, quelques réminiscences tout au plus… Une identité atrophiée avec laquelle le jeune homme dut composer durant toute son enfance et son adolescence, en cherchant dans la poésie quelques parenthèses de réconfort. À l’âge de 22 ans, Jean-Eldar a aujourd’hui décidé de renouer avec ses racines. D’ici quelques semaines, il entreprendra un voyage à pied vers sa terre natale dans l’espérance de rencontrer sa famille biologique.

Les abysses de la mémoire sont impénétrables. On aura beau replonger dans les limbes de notre petite enfance, impossible de faire émerger nos premiers souvenirs avant l’âge de trois ou quatre ans, et ceux-ci demeurent toujours nébuleux. Pourtant, les plus vieux vestiges qui parsèment notre mémoire ont aussi quelque chose de palpable, de solide même. Ces images gazeuses qui échappent à l’amnésie infantile sont comme transformées par notre inconscient en roches qui cimentent une part de notre identité. Elles demeurent floues, mais demeurent, et reviennent souvent avec obsession.

Les couloirs de l’orphelinat, les jeux avec les voisins de chambre, la cour de l’établissement… Voilà à quoi se résume les quelques souvenirs d’enfance de Jean-Eldar Ollivier. D’Astrakhan, sa ville natale, du russe, sa langue d’origine, il ne lui reste rien, pas même le visage de sa mère biologique. Un véritable vide mémoriel qu’il porte comme un fardeau depuis son adoption par une Française lorsqu’il avait quatre ans.

Jean Eldar Ollivier Brest
@Thierry Richard

Après un court passage par Paris, puis à Morlaix, c’est finalement à Brest que Jean-Eldar finit par s’installer. Comme pour nombre de déracinés, sa jeunesse fut plus proche de l’errance que de l’enfance. Il la passa noyé sous un flot de questions, des questions qui ne devraient pas se poser quand on est un enfant : « Pourquoi ai-je été abandonné ? Pourquoi ai-je fini dans un orphelinat ? »

Ce mal-être qui définissait son existence était en outre exacerbé par la relation conflictuelle qu’il entretenait avec sa mère adoptive, au point qu’il décida de couper les ponts avec elle durant quelques années. C’est pourtant elle qui finit par lui apporter les premiers éléments de réponses. C’était en 2019 lorsque Jean-Eldar, alors volontaire civique en tant qu’animateur, reçoit son dossier d’adoption. Il découvre alors ses origines, à commencer par son prénom de naissance, « Eldar », que sa mère francisera par la suite en y apposant « Jean ». Le registre lui révèle également l’existence de sa sœur, restée à Astrakhan, mais surtout le motif d’abandon de sa mère biologique : « incapacité à subvenir aux besoins de l’enfant »… Le choc fut aussi violent que salvateur.

Avant, c’était une souffrance de ne pas savoir qui j’étais. Puis j’ai commencé à avoir les premières pièces du puzzle et à aller mieux. C’est là qu’ont commencé les questions construites et la recherche des réponses.

Dans un élan de découverte et d’affirmation de soi, l’idée de partir à Astrakhan commença à germer : « j’ai fini par comprendre que je ne pourrais jamais m’affirmer en tant qu’individu si je ne connaissais pas mes racines, ou du moins si je n’essayais pas de les rechercher ». Ce voyage initiatique, il l’entreprend aussi comme une quête de liberté, une liberté jusqu’alors cadenassée par d’interminables questionnements existentiels, et que le jeune homme souhaita éprouver par le corps. C’est pourquoi il mènera ce périple de Brest à Astrakhan à pied.

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Une marche vers une terre ancestrale guidée par une insatiable soif de réponses… D’aucuns verront en Jean-Eldar Ollivier un nouveau pèlerin. Nous lui préférons néanmoins une comparaison plus poétique, celle de la figure rimbaldienne bien sûr. Ce n’est d’ailleurs pas un hasard si notre voyageur est passionné de poésie. Celle-ci fut pour Jean-Eldar un refuge autant qu’un exutoire durant ses années d’errance philosophique et existentielle. Il en lit et en écrit, sur les réseaux sociaux notamment, ainsi que dans un magazine où il fut édité plusieurs fois.

Voilà bientôt un an que l’aède met au point son départ en s’imposant au quotidien une marche de vingt kilomètres ainsi que différents exercices. Au-delà de la préparation physique, le plus épuisant demeure la préparation matérielle et financière.

Ce périple de plus de 5000 kilomètres nécessite un matériel de première qualité à la fois résistant, léger et adapté à des conditions extrêmes (sac de couchage, chaussures de marche tout-terrain, tente de trekking ultra-légère, téléphone satellitaire…). Le montant total de toutes ces fournitures est évalué à près de 6000 euros (4000 euros à l’achat avant le départ, et 2000 euros supplémentaires à prévoir durant le trajet), une somme considérable que Jean-Eldar ne peut prendre en charge qu’avec le soutien de sponsors et l’aide d’un financement participatif.

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Pour ce faire il a ouvert une cagnotte en ligne sur la plateforme KissKissBankBank. À sa grande surprise, ce premier financement a déjà atteint ses 100% en quelques semaines ! Pour autant une seconde cagnotte sera mise en place lorsque Jean-Eldar débutera son périple. Les fonds recueillis sur cette deuxième cagnotte serviront en cas d’imprévus, mais seront aussi reversés à l’UNICEF.

Le grand départ est prévu pour avril 2021. Pour ce qui est de l’itinéraire, Jean-Eldar sait seulement qu’il passera par la Belgique, l’Allemagne, la Pologne, l’Ukraine, avant d’arriver à Astrakhan aux abords de la Mer Caspienne. Il sait aussi qu’à raison d’une vingtaine de kilomètres par jour et de plusieurs pauses, son itinérance devrait durer au minimum neuf mois… Probablement plus nous confie-t-il. Une fois arrivé il sera en relation avec une traductrice qui l’aiguillera dans ses recherches. Pour le reste, il ne sait pas et ne veut pas savoir. Cherchant à se libérer dans la mesure du possible de toute contrainte, il n’a pas souhaité élaborer de feuille de route précise. Il s’agit d’un voyage initiatique après tout, pas d’un trek.

Une fois arrivé à Astrakhan, Jean-Eldar Ollivier entamera un autre voyage qui, espérons-le, lui permettra de lever le voile sur ses origines. Cette deuxième étape nécessite elle aussi une préparation, psychologique cette fois. Le jeune Franco-russe en est conscient, il se peut qu’il ne retrouve jamais sa mère biologique, ou pire encore, qu’il finisse par la retrouver, mais qu’elle ne le reconnaisse pas… Peu importe l’issue du voyage, il se dit prêt à affronter tout les scénarios, même les pires.

La vraie préparation se fera quand je serais seul sur mon périple, j’aurais alors tout le temps pour me poser les questions et me préparer, à l’échec si besoin.

Bien qu’elle ait récemment atteint les 100% de la somme fixée, la première cagnotte mise en ligne reste ouverte sur KissKissBankBank. Une partie de l’argent déposé servira de matelas lors du périple, le reste reviendra à l’UNICEF. Nous vous invitons évidemment à y faire un tour ainsi qu’à suivre Jean-Elldar Olivier sur sa page Facebook, où vous pourrez voir ses péripéties et interagir avec lui en chemin.

QR code cagnotte kisskissbankbank Jean Eldar Olliver Brest Russie
QR code de la cagnotte KissKissBankBank

Un second financement participatif sera ouvert lors du départ qui, si les conditions sanitaires le permettent, est prévu pour le mois d’avril. En attendant, notre poète itinérant continue de s’armer pour son voyage, notamment en recherchant des sponsors et en préparant son paquetage, où il compte bien évidemment embarquer de quoi écrire.

Jean-Eldar Ollivier sur Facebook.

Jean-Eldar Ollivier sur Instagram.

La cagnotte participative.

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