Bong Joon-ho, après avoir décroché la Palme d’Or avec Parasite et s’être imposé comme l’un des plus grands réalisateurs contemporains, est de retour avec un projet audacieux : Mickey 17. Si le film a généré une grande attente, les spectateur se partagent aujourd’hui entre enthousiasme et déception. En mêlant science-fiction, humour noir et critique sociale acerbe, ce film fou-flou suscite des réactions contradictoires, allant de l’admiration pure à la déception totale.
Un voyage dans notre univers chaotique
Derrière l’intrigue de Mickey 17, un concept fascinant : Mickey Barnes, interprété par Robert Pattinson, est un clone créé pour effectuer des tâches sur une planète hostile. Mais à chaque échec, il est « remplacé » par une nouvelle version de lui-même, un concept qui touche immédiatement au cœur des questionnements sur la condition humaine, la répétition et l’exploitation de l’individu. L’idée d’un clone voué à une existence sacrificielle est, à la base, riche de réflexions philosophiques et sociales, mais ici, Bong Joon-ho semble perdre pied dans l’univers qu’il crée.
L’univers visuel et narratif est à la fois riche et absurde, proposant une satire de la société capitaliste à travers une dystopie où la déshumanisation prend forme. Mais dans cette exploration, l’équilibre est délicat : le film oscille sans cesse entre moments de brillance et de confusion, ce qui n’est pas sans rappeler l’imperfection des productions de Bong Joon-ho, toujours ambitieuses mais parfois inégales.
Une satire politique en trompe-l’œil
La dimension politique du film, indéniablement drôle et acerbe, s’attaque violemment au populisme et au capitalisme et, particulièrement, à l’administration de Donald Trump.. Ce qui se manifeste par des scènes grotesques où les personnages, à la fois caricaturaux et terrifiants, rappellent les travers d’un pouvoir autoritaire et désinvolte.
Mais si l’intention est clairement politique, elle n’est pas sans failles. Comme l’indique Le Monde, ce « joyeux bordel narratif » ne parvient pas toujours à maintenir une ligne directrice claire et devient parfois une surcharge d’informations, où la critique sociale se noie dans un tourbillon visuel et idéologique difficile à digérer. Le film semble vouloir trop en dire, trop attaquer, mais cette accumulation de couches semble parfois contre-productive, nuisant à l’impact de son message.
Robert Pattinson, un rôle ambigu
L’interprétation de Robert Pattinson, en Mickey, semble être une pierre angulaire du film. L’acteur, qui a su s’imposer comme l’une des figures les plus intéressantes de sa génération, livre une performance qui ne manque pas d’ambiguïté. Cependant, son jeu, bien que captivant, semble parfois à la frontière du surjeu dans un film déjà marqué par son absurdité. Pattinson, dans ce film, semble plus être une « carte de crédit » hollywoodienne qu’un véritable atout pour la narration, rendant son personnage plus marionnettiste qu’humain. La tension entre la starisation de l’acteur et la volonté de Bong Joon-ho de créer un film socialement engagé génère une distorsion qui fait parfois hésiter entre fascination et frustration.
L’incohérence narrative plutôt dingo
Un autre point de friction est la structure narrative du film, jugée parfois incohérente. Le Figaro qualifie Mickey 17 de « retour raté » pour Bong Joon-ho, soulignant que le film manque de cohérence dans sa progression. Le film, bien qu’ambitieux dans sa mise en scène et sa thématique, donne l’impression de s’éparpiller dans trop de directions. La complexité de l’univers et de l’intrigue – entre clonage, philosophie de la répétition et satire sociale – finit par rendre l’expérience cinématographique plus déroutante que captivante. Il y a une impression générale de chaos narratif, où l’humour noir et les enjeux existentiels se heurtent sans véritablement se résoudre. Ce manque de structure semble miner la portée du message, rendant l’ensemble difficile à suivre et, paradoxalement, trop prévisible dans sa critique des structures de pouvoir.
Mickey 17, film fou-flou
Au final, Mickey 17 laisse un goût mitigé. Il existe incontestablement une vision audacieuse et pertinente derrière le film, avec des éléments qui rappellent le génie de Bong Joon-ho – un sens aiguisé de la satire sociale et une esthétique parfois brillante. Mais l’acharnement de la narration, l’absurdité parfois gratuite de certaines scènes, et le manque de cohérence dans l’ensemble du film créent une fracture dans la réception. Mickey 17 est un film fou-flou, un film ambitieux qui ne trouve pas son équilibre. Le spectateur se trouve pris entre une admiration pour la profondeur de la critique sociale et la frustration face à un film qui, parfois, semble se perdre dans sa propre complexité.