On l’attendait depuis 1976. Le foot féminin fait son retour au Stade Rennais avec la création d’une section féminine. L’ouverture de la catégorie U8 laisse présager un futur radieux pour les juniors avec pourquoi pas dans quelques années une section séniors présente en D1F, la Division 1 Féminine.
1973, Rennes. Yolande Clossais originaire de Bastia, pose ses valises dans la capitale bretonne. La réalité la frappe de plein fouet. Il n’y a pas d’équipe féminine de football au Stade Rennais. Ni une ni deux, elle décide de lancer un appel à joueuses via le journal Ouest-France, qui reçoit 90 réponses. Au final, 22 femmes seront intéressées par la proposition et 16 signeront définitivement pour intégrer cette équipe de néophytes. L’aventure ne durera que trois ans pour les footballeuses, qui devront se défendre bec et ongles pour jouer et obtenir une reconnaissance même minime de leur équipe. Pourtant, cela ne les empêchera pas de disputer le Championnat de l’Ouest ou encore d’affronter Chelsea. Alain Cosnard, latéral rouge et noir et ancien vainqueur de la Coupe de France en 1971, entrainera même l’équipe quelques mois.
Malgré une défense renforcée, l’équipe se heurte à nombre de difficultés : aucune aide de la part de la FFF (Fédération Française de Football), la nécessité d’organiser elles-mêmes les matchs, trouver des amis pour le contrôle des entrées, trouver des arbitres de touche ou encore la prise en charge des boissons. Une gestion complètement autonome de cette section féminine et l’obligation de garder la tête haute malgré les quolibets et railleries des détracteurs toujours présents au premier rang…
« Nous portons les couleurs du Stade rennais, mais c’est tout juste si nous sommes tolérées », Yolande Clossais.
Yolande Clossais dénonçait déjà les abus encourus lors des trois années d’existence de la section féminine. Une époque difficile pour le foot féminin à une époque où la pratique de ce sport par les femmes était déjà nettement sous-évaluée. L’équipe se voyait autoriser l’accès au terrain derrière la Conciergerie pour jouer, à domicile seulement. Même licenciées, les joueuses se voyaient accorder peu d’attention à part la compétence des coachs, mais à quel prix ?
Malgré leur persévérance et leur détermination l’équipe mettra la clé sous la porte en 1976, trois ans après sa création.
Cela n’est pas sans rappeler l’épisode récent du 8 mars 2021, lorsque les joueuses du Cercle Paul Bert de Bréquigny avaient joué, équipées de leurs maillots et leurs chaussures… mais en culottes ! Pas de shorts ou de chaussettes pour les joueuses, la FFF ne les délivrant qu’aux joueurs et pas aux joueuses lors de la Coupe de France. Une manière de rappeler que les inégalités hommes/femmes sont toujours bel et bien présentes dans le milieu du football.
La résurgence de la section féminine au Stade Rennais est donc une bonne nouvelle pour le milieu footballistique. Malheureusement, pas encore d’équipe seniors pour le stade rennais, mais la création d’une catégorie U8 qui, on l’espère, grandira sous les yeux attentifs des entraineurs et encadreurs réquisitionnés pour l’occasion.
« L’objectif c’est d’avancer avec de belles fondations, et commencer tranquillement. On n’a pas encore les infrastructures pour recevoir tout le monde. On a commencé par les plus jeunes, et progressivement on va augmenter les catégories », Michel Morain pour TVR.
Annoncé par Nicolas Holveck, président du Stade Rennais, en juillet 2020, le projet ne datait pourtant pas d’hier. La question avait déjà été évoquée, notamment en 2017 par Olivier Tomine à l’époque directeur du club. Au delà d’un luxe, la création d’une équipe féminine était une nécessité, le Stade Rennais étant un des rares clubs de Ligue 1, aux côtés d’Angers, Nîmes et Monaco, à ne pas posséder d’équipe féminine. De quoi faire rougir les Rouge et Noir.
Le choix a été fait d’une création ex nihilo d’un département féminin catégorie U8 et d’une école de foot, « base de la pyramide » selon Nicolas Holveck, avec pour but de développer cette section au-fur-et-à-mesure. Un démarrage en bas de l’échelle niveau District pour commencer, avec le désir de monter en Régional 2, puis Régional 1, et puis en National jusqu’à atteindre la D2F et même pourquoi pas la D1F.
Des rêves qui vont bercer les prochaines années des joueuses pour l’instant âgées de 5 à 7 ans. La mise en place du projet a débuté avec les détections des filles de catégories U6, U7 et U8 le 9 juin dernier, le seul prérequis étant de ne pas être licenciée dans un autre club. Le but n’est pas de faire de l’ombre aux autres équipes régionales, mais de travailler en collaboration avec elles. Au total, trente filles ont été retenues pour évoluer au cœur de la nouvelle équipe. Elles seront bien entourées malgré leur jeune âge. Le responsable Michel Morin, ancien joueur du Stade Rennais et adjoint de l’Olympique Lyonnais Féminin compte bien se dédier avec passion à cette nouvelle équipe de très jeunes recrues. Les joueuses seront également encadrées par des éducateurs de l’école de foot du club : Matthieu le Brun, Sylvain Létang, Florent Quéméré, Jérémie Saufisseau ou encore par Aurélie Morand, 23 ans, joueuse et éducatrice au CPB, Bréquigny.
La première rentrée officielle de la section féminine du Stade Rennais s’est déroulée samedi 11 septembre au Roazhon Park, avec la présentation de la structure, des encadrants et avec la remise des équipements des jeunes footballeuses, chacune d’entre elles possédant un maillot à son nom. C’est un cap qu’a franchi le Stade Rennais avec dans la foulée le premier entraînement qui a eu lieu mardi 14 septembre en fin d’après-midi, à la Piverdière au SRFC. Initiées par un proche, un parent ou un frère, les filles sélectionnées sont déjà passionnées, amatrices confirmées du ballon rond. Certains parents jouaient au SRFC plus jeunes. Il y a notamment la présence de la fille de Gaëtan Laborde, attaquant au Stade Rennais. De jeunes recrues aux parents très émus, et qui laisse présager un avenir radieux pour le retour de le section féminine du club rennais. Au programme, deux entraînements par semaine et un plateau par mois à disputer avec d’autres clubs régionaux.
« À cet âge là, ça ne sert à rien de parler de performance. L’objectif ça va être de prendre du plaisir. Toutes nos séances vont être orientées autour de ça. Une fille qui prendra du plaisir c’est une fille qui va revenir à l’entraînement et donc qui va progresser », Interview d’Aurélie Morand pour FranceBleu.
Le plaisir et la bonne humeur restent donc le principal mot d’ordre du projet, avec l’espoir d’agrandir la section féminine dans les années à venir. Une évolution à suivre de près pour les prochaines saisons.
