Catherine Hunold à l’opéra de Rennes, un retour sensible et remarqué

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Catherine Hunold était de retour à l’opéra de Rennes avec un programme de musique de chambre où convergent l’intimisme des lieds allemands et la discrète intériorité des mélodies françaises. Le point commun en est l’amour et les sentiments qu’il inspire. Rien de mieux choisi dans ce cas que le recueil de poèmes La bonne chanson (1870) écrit par un Paul Verlaine ébloui de bonheur ou les Wesendonck Lieder, composition marquée par l’amour fou que ressent Richard Wagner pour l’épouse d’un de ses mécènes, la belle Mathilde Wesendonck.

 

Alain Surrans
Alain Surrans, directeur de l’opéra depuis 2005

Le pari n’était pourtant pas gagné d’avance, le public rennais, privé des beautés d’un orchestre symphonique, pouvait ne pas s’enthousiasmer pour cette soirée musicale un peu élitiste et sans doute pressentie comme potentiellement ennuyeuse. Il n’en fut rien ! Le succès de la soirée est lié à plusieurs facteurs aisément identifiables. Le premier fut l’exceptionnelle qualité de l’accompagnement musical proposé par un quatuor Élysée au mieux de sa forme, soutenu au piano par le talentueux Hervé Billaut. S’ils ont offert aux solistes présents un écrin de qualité, leur interprétation du quintette n° 2 pour piano et cordes en ut mineur de Gabriel Fauré fut un instant de pure méditation. La musique s’insinua en nous comme se répand un parfum, elle etait à la fois légère et dense, élégiaque et apollinienne. Alains Surrans, directeur de l’opéra de Rennes écrit dans le livret d’accueil cette phrase qui résume à la perfection notre ressenti, il évoque :

Le même expressionnisme paradoxal, pudique en apparence, mais sous-tendu par la passion, on a le sentiment que la musique respire à pleins poumons et s’exalte de son propre discours.

catherine hunoldOn ne saurait mieux dire ! C’est sur un texte de Charles Cros mis en musique par Ernest Chausson que débute la soirée. Cette chanson perpétuelle (1898) nous invite à retrouver une interprète hautement appréciée à Rennes en la personne de la soprano Catherine Hunold. Elle nous avait laissé un souvenir bouleversant suite à ses interprétations des opéras de Wagner, la Walkyrie en février 2013 et son étincelante Ortrud, dans Lohengrin, en février 2015 : nous la savions une remarquable chanteuse d’opéra, elle nous fait découvrir une nouvelle facette de son indiscutable talent. Offrant de ces pages intimistes une interprétation d’une infinie délicatesse, elle sait museler le puissant instrument qu’est sa voix pour chuchoter à un public en extase les vers simples et naïfs d’amoureux éblouis. Que dire alors des pages exaltées des Wesendonck Lieder ?

catherine hunoldCette enchanteresse nous tire des larmes par la précise beauté de sa diction et la profondeur des sentiments qu’elle exprime avec exactitude, comme si cela était simple.
Difficile transition pour le baryton Jean-Gabriel Saint-Martin au moment d’interpréter La Bonne chanson, mise en musique par Gabriel Fauré. Il est vrai qu’il nous a fallu un peu plus de temps pour adhérer à sa vision personnelle. Le timbre de sa voix, un peu étonnant dans ce registre, semblait manquer de maturité pour ce genre de musique mais au fur et à mesure de son récital, il deviendra de plus en plus convaincant et finira par produire un son qui est en accord avec l’idée que l’on se fait de la musique française de cette époque.
catherine hunoldVous savez tout maintenant de cette soirée tout en nuance. Beaucoup de plaisir, mais un peu d’inquiétude. Inquiétude direz vous, mais… pourquoi ?? Simplement parce que nous sommes bien conscients que Catherine Hunold est en train de prendre son envol et est en passe de devenir une cantatrice de niveau international. Cette réussite que nous lui souhaitons le plus sincèrement du monde la mettra irrémédiablement hors de portée de notre opéra breton. Il nous restera la consolation de nous rappeler que, grâce à Alain Surrans, nous avons eu la chance de vivre l’avènement d’une grande artiste. Dans quelques années, alors qu’elle brillera au Metropolitan Opera House de New York ou au Royal Opéra House londonien, nous dirons d’un air entendu — … Catherine Hunold… oui j’ai pu l’admirer sur scène, à ses débuts. Délicieuse vanité.

Opéra de Rennes, Catherine Hunold, Quatuor Elysée, Mélodie française, 26 avril 2016

CATHERINE HUNOLD SOPRANO
JEAN-GABRIEL SAINT-MARTIN BARYTON
QUATUOR ÉLYSÉE
HERVÉ BILLAUT PIANO

https://www.youtube.com/watch?v=GDyLwKGTfi4

https://www.youtube.com/watch?v=cYGPzelAmm0

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Thierry Martin
thierry.martin [@] unidivers .fr

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