Charly 9, Jean Teulé, Piètre anecdote au sujet d’un roi bouffon

Charles IX fut de tous les rois de France l’un des plus calamiteux. À 22 ans, pour faire plaisir à sa mère, il ordonna le massacre de la Saint Barthélemy qui épouvanta l’Europe entière. Abasourdi par l’énormité de son crime, il sombra dans la folie. Courant le lapin et le cerf dans les salles du Louvre, fabriquant de la fausse monnaie pour remplir les caisses désespérément vides du royaume, il accumula les initiatives désastreuses. Transpirant le sang par tous les pores de son pauvre corps décharné, Charles IX mourut à 23 ans, haï de tous. Pourtant, il avait un bon fond.

Charles IX a donné son accord pour l’abominable Saint Barthélémy, meurtre autorisé des protestants de Paris et du royaume le 2 août 1572, mais c’est à sa mère, Catherine de Médicis, qu’il appelle Mamma et à son jeune frère Henry Duc d’Anjou, sale petit minet aussi méchant que coquet et dévoyé, et à leurs conseiller qu’en revient la responsabilité.

Le jeune roi est en effet bien falot, immature et irresponsable et surtout totalement manipulé par ceux qui l’entourent, et le détestent.

Alors oui, il devient fou. Fou de ne pas avoir su dire non, fou du sang qui entache sa réputation et qui perlera bientôt sur tout son corps malade, fou des cris des suppliciés et mourants qui résonnent dans sa tête… On retiendra de lui l’image d’un roi sanguinaire, alors qu’il est juste frapadingue… Pauvre Charly !

Avec Teulé, on s’attend bien évidemment à entrer de plain-pied dans l’histoire et à en prendre plein la vue, les oreilles et la tête. Car l’auteur, avec sa verve habituelle, ne fait jamais dans la dentelle et revisite l’histoire avec ses mots, sa gouaille, son verbe coloré. Mais, si ses précédents romans étaient à la hauteur (Le magasin des suicides, Je, François Villon, Le Montespan Mangez-le si vous voulez), ce dernier laisse de marbre.

Contrairement à ce qu’il laisse entendre, ce roman n’est pas drôle du tout. Plutôt triste, même, pathétique. Est-ce donc ça, la France ? Et ce roi, girouette débile et grimaçante, dont tous tirent les fils et qui s’embrouille, s’embrouille…

Bien sûr, l’écriture est truculente et les personnages caricaturés avec humour. Mais cette histoire – en partie revisitée et où se mêle le langage fleuri de l’époque et des termes actuels – fatiguera, voire désolera bien des lecteurs. Charly est grotesque et les descriptions parfois outrancières (« la tête dans le pâté », par exemple, quand le jeune roi veut faire l’autruche). Plus écoeurant qu’amusé.

Autre regret : l’auteur s’en tient aux anecdotes, au quotidien du roi (qui est certes fort occupé avec ses chasses, ses lubies, ses terreurs et cris et tous les courtisans qui lui tournent autour) et bien peu à la politique de l’époque, la vie parisienne, les magouilles de Catherine de Médicis (affreuse bonne femme) et l’histoire en général. Teulé est resté dans le factuel, ne décrivant que la décrépitude de Charly, dont on se doute bien qu’elle ne pourra mener qu’à la catastrophe. Au final, ce pauvre roi, on lui pardonnerait presque la Saint Barthélémy, tant on le voit malheureux, paumé, et bien vite mourant…

Charly 9 Jean Teulé, Julliard, mars 2011, 200 p., 20€

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