La création Le Bal Magnétique de Massimo Fusco donnera sa première à la Salle de la Cité de Rennes, les 7 et 8 février 2026, dans le cadre de l’édition 2026 de Waterproof. Dans ce bal participatif et immersif, actuel et inclusif, la compagnie Corps Magnétiques transforme la scène en espace de fête et de communion où se réinventent les danses de couple. Entretien.
Unidivers a rencontré le chorégraphe, danseur et masseur Massimo Fusco durant la résidence de création de la compagnie Corps Magnétiques, du 1er au 5 décembre 2025, au Triangle – Cité de la danse de Rennes. Pendant une semaine, la compagnie a collaboré avec des enfants de l’école Châteaugiron-Landry et leurs familles dans le cadre du projet EAC « Tous·tes danseur·euses » porté par le Triangle, des publics en situation de handicap et un groupe de l’Anvol (organisme de formation à la langue des signes) accompagné par Béatrice Le Cointe-Magny.

Unidivers – Dans sa direction artistique, la compagnie Corps Magnétiques porte une attention particulière à l’immersion et à la participation. Il en était déjà question dans Corps Sonores et Corps Sonores Junior, premier projet de la compagnie présenté pendant l’édition 2025 de Waterproof. D’où vient cet intérêt ?
Massimo Fusco – Tous nos projets sont développés selon l’axe « danse, soin et société », et dans le croisement des arts visuels, sonores et de la danse qui, pour moi, peut réunir tous les arts. Notre premier projet est une expérience sensorielle qui permet d’inclure tous les publics. Le but était de partager un moment entre danse et soin, que l’on soit porteur de handicap ou non. Le Bal Magnétique, lui, propose un accès plus direct aux danses sociales.
Ce spectacle prend racine dans mes souvenirs d’enfance. Mes parents sont professeurs bénévoles de danses de salon depuis plus de trente ans. J’ai été imprégné de cette culture de la danse et des bals populaires dès mon plus jeune âge. J’ai eu envie, pour ce deuxième projet, de rassembler l’immersif et le participatif autour des danses de couple.
Pour répondre à cette envie, le projet est divisé en deux phases : une création chorégraphique et musicale que l’on a appelée « tour de danse ». Le public est installé dans une scénographie imaginée par la designeuse Stéphanie Marin, avec qui j’ai déjà travaillé pour Corps Sonores Junior. Des menhirs sous-tendent des guirlandes lumineuses, dans l’esprit des guinguettes et en écho aux fêtes traditionnelles. Les structures supportent des haut-parleurs et diffusent une musique live jouée et chantée par la compositrice Gérald Kurdian (aka HOT BODIES).
Puis, les interprètes [cinq dans les représentations à Rennes, NDLR] tendent une main au public dans une invitation à entrer dans la danse pour la deuxième partie : « le bal participatif ».

Unidivers – C’est dans cette partie justement que les participants et participantes à la résidence de création du Triangle – des enfants et adultes en situation de handicap notamment – deviennent des complices dans le public.
Massimo Fusco – Exactement. Cette semaine de résidence permet de vérifier si notre matériel chorégraphique existant s’adapte ou se transmet facilement à des personnes en situation de handicap – sourdes ou malentendantes, aveugles ou déficientes visuelles. Pour nous ouvrir à une hospitalité de bal, il faut que nous puissions accueillir toute cette diversité. Avoir ces espaces de co-création à l’intérieur même du processus de création (nous en sommes à la septième semaine de création sur les dix prévues) permet de préparer un bal ouvert à tous et toutes.
« Dans ce partage de la danse, on aimerait communiquer la joie d’être ensemble. »
La danseuse Lola Serrano signe en langue des signes française (LSF), donc tout ce qui sera oralisé pendant le spectacle sera traduit, et des SUBPAC [sacs à dos vibrants, NDLR] seront mis à disposition. Des chaises à danser, des chaises élastiques mises au point avec Stéphanie Marin, permettront aussi d’augmenter les mouvements des personnes en fauteuil roulant ou des personnes âgées en perte d’autonomie. Ce type de dispositif a pu être créé grâce à ces semaines de résidence croisée, notamment celle réalisée en mars 2025 avec l’EHPAD Jeanne Guernion.

Unidivers – Que ce soit dans la scénographie ou dans les dispositifs mis en place, on sent une volonté de développer les sens afin de pallier, peut-être, celui qui peut manquer ou faire défaut.
Massimo Fusco – Tout à fait. Dans cette dynamique d’immersion et de développement des sens, on a travaillé sur la lumière noire, qui permet de faire ressortir les couleurs blanches et fluorescentes. Ainsi, une atmosphère se propage et rappelle les bals plus modernes, avec des danses issues du clubbing ou du waacking pour mélanger les genres de danses sociales. Dans ce cadre-là, on a la chance d’avoir Sung-Chun Tsai, un danseur spécialisé en waacking. On crée un dialogue en mélangeant des figures de danses traditionnelles ou de couple et des figures de waacking.
Unidivers – Le Bal Magnétique fait des allers-retours entre modernité et tradition. L’idée est de développer un folklore contemporain tout en faisant vivre l’ancien, avec notamment l’inspiration à la ballarella, une danse italienne en voie de disparition.
Massimo Fusco – Je ne l’aurais pas mieux dit. L’envie est de réinventer certaines danses sociales et de couple pour créer un véritable folklore contemporain et, ainsi, écrire un bal qui soit actuel, tout en s’appuyant sur des figures du passé.
En termes de musique, Gérald Kurdian a composé une musique électro, mais des sonorités plus traditionnelles – comme l’accordéon, dont les sons évoquent des souvenirs auprès des personnes âgées – sont intégrées afin d’embrasser les différents imaginaires et d’offrir une pluralité d’esthétiques musicalement parlant. En plus, nous avons la chance que Garance Bréhaudat joue de l’accordéon.
On décale aussi la valse puisque nous serons trois au lieu de deux.

Unidivers – Justement, la danse de couple se fait généralement à deux et est encore souvent considérée comme une danse genrée et hétéronormée, avec l’homme qui dirige et la femme qui suit. Cependant, on sent dans votre création l’envie de casser ces stéréotypes pour s’ouvrir à l’inclusivité.
Massimo Fusco – Oui, car ces danses sociales sont amenées à évoluer, donc Le Bal Magnétique épouse toutes ces évolutions sociétales. Les danses de couple ne sont pas seulement adressées à un cavalier et une cavalière. Il s’agit de prendre plaisir à danser ensemble, c’est surtout cela qui me connecte au plaisir du bal. Cela permet de réveiller le troisième point de notre axe de création : « société ». En embrassant toutes les diversités de la société, on panse aussi notre société dans l’idée de « réparer le monde », comme dirait Léonie Pernet, une chanteuse que j’ai découverte à l’Antipode il y a quelques semaines (rires).
Unidivers – Au final, on parle de la danse comme langage universel…
Massimo Fusco – La danse possède ce pouvoir d’incarnation qui la rend plurielle. Quand elle entre dans les corps, elle fait ressortir cet imaginaire et transmet des états de corps, notamment en se connectant les uns aux autres par le toucher. Nous explorons peu ce sens dans notre société et le bal est un des espaces où il est permis, même si nous poserons la question du consentement dans ce bal participatif.
En tant que danseur, chorégraphe et masseur, ce rapport au toucher m’intéresse beaucoup. Corps Sonores portait sur la danse et le massage afin d’explorer les gestes de danse dans une interaction par le toucher. Les gestes de massage devenaient des gestes de danse et vice-versa.
La ballarella est une des cousines de la pizzica, danse qui aurait des vertus de guérison et qui clôturait Corps Sonores et Corps Sonores Junior. Cette proximité tisse un lien entre les deux projets et nourrit la relation, car ce qui fait sens pour nous, c’est de créer la relation et de faire le lien. C’est d’ailleurs pour cela que les scénographies respectives possèdent des pierres (Corps Sonores) ou des menhirs (Bal Magnétique), comme symboles pour ériger des ponts plutôt que bâtir des murs entre nous.

Infos pratiques :
Une coopération Le Triangle × Les Tombées de la Nuit dans le cadre de Dimanche à Rennes :
Le Bal Magnétique de Massimo Fusco, Compagnie Corps Magnétiques, à la Salle de la Cité de Rennes
Samedi 7 février (20h30) et dimanche 8 février (16h)
Durée 1h15 – à partir de 8 ans
Tarif : en cours de définition
Contact billetterie :
+33 (0)2 99 22 27 27
DJ set de Gérald Kurdian à la suite de la représentation du samedi.
À voir également :
Conférence dansée : Histoires de bals (mercredi 28 janvier)
Projection : Le Grand Bal (dimanche 1er février)
TOURNÉES 2026 :
7 et 8 février 2026 – Premières festival Waterproof / Les Tombées de la Nuit + Triangle, Cité de la danse / Rennes
21 février 2026 – Festival Les Hivernales – CDCN d’Avignon
1er mars 2026 – Théâtre du Sémaphore / Port-de-Bouc
13 et 14 mars 2026 – Festival Pulse / Atelier de Paris – CDCN
21 mars 2026 – Théâtre de Corbeil-Essonnes
27 et 28 mars 2026 – Festival Séquence Danse – Théâtre Louis Aragon / Tremblay-en-France
8 avril 2026 – Festival SPLATCH ! – La Passerelle – Scène nationale de Saint-Brieuc
5 et 6 mai 2026 – Scène 55 / Mougins
19 mai 2026 – Festival Danser partout / Chorège CDCN de Falaise
29 mai 2026 – L’Orange Bleue / Eaubonne
31 mai 2026 – Théâtre de Fontenay-aux-Roses
4 juin 2026 – Opéra de Limoges
14 et 15 juin 2026 – Abbaye de Royaumont / Asnières-sur-Oise
26 et 27 septembre 2026 – Festival CAP Danse / Concarneau
3 octobre 2026 – Espace Germinal / Fosses
17 octobre 2026 – Biennale d’Aix-en-Provence
Octobre 2026 – Tournée Escales Danse en Val-d’Oise
