Rennes Champs libres. Programme des rencontres Paul Ricœur 2024, l’expérience de l’injustice

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paul ricoeur rennes

Les rencontres Paul Ricœur sont organisées par Les Champs Libres et l’Université de Rennes les 21-22 novembre 2024. Gratuit

Les Rencontres Paul Ricœur mettent la philosophie au cœur de la cité. Organisées tous les deux ans par l’Université de Rennes et Les Champs Libres, elles sont un temps de réflexion pluridisciplinaire autour d’un thème inspiré par l’œuvre du penseur et appliqué aux grands problèmes du monde contemporain.

« Peut-être est-ce par l’expérience de l’injustice que nous entrons dans le problème de la justice. L’indignation est alors, face à ce que nous ressentons comme injuste, la première expression de notre sens de la justice. Mais l’indignation a ses limites.‘‘ – Paul Ricœur

Paul Ricœur (1913-2005) a grandi à Rennes. Il est aujourd’hui un philosophe lu dans le monde entier. Son œuvre associe une investigation de la condition humaine, une exploration des ressources du langage et une interprétation critique des héritages. Le combat pour le dialogue des cultures ne fait qu’un pour lui avec la conviction, maintes fois réaffirmée, que le plus court chemin entre soi et soi passe par l’autre.

« Je crée (…) pour tenter de dire la blessure et la surabondance. Voilà ma quête incessante qui à chaque fois devant la nudité de la page blanche me pousse à respirer plus large. Peindre, c’est habiter cette fragilité, donner ce qui m’échappe, accepter d’être dérouté, parfois dans le plus vulnérable de mon être ; accueillir, éveiller, susciter ». – jeanlucbonduau.com

Jeudi 21 novembre

Le mal d’injustice

14h – Introduction – par Jérôme Porée (philosophe, Université de Rennes).

SUBIR L’INJUSTICE

Vivre pauvre

14h30 – avec Laurence Fontaine (historienne, CNRS) et Élise Huillery (économiste, Université Paris-Dauphine)

L’une est historienne, l’autre économiste. La première a étudié la pauvreté dans l’Europe des Lumières, où elle apparaît à la fois comme une question sociale, un problème moral et un enjeu politique ; elle s’est intéressée autant aux histoires de vie des pauvres qu’aux mesures imaginées à leur endroit par les élites ; elle a montré enfin les similitudes entre certaines de ces mesures et celles qui inspirent aujourd’hui les politiques publiques. La seconde s’est spécialisée dans l’étude de ces politiques, notamment dans le domaine scolaire, où elles appellent cependant une approche critique ; car, si l’école est parfois un moyen d’échapper à la pauvreté, elle est plus souvent ce qui la perpétue ; aussi contribue-t-elle à l’injustice dont sont victimes ceux de ses enfants qui ne trouvent en elle ni la culture ni la confiance qui leur permettraient de transformer leur destin en liberté. Comment sortir de la pauvreté ? Telle sera donc la question qui orientera leur dialogue. Car elles sont convaincues l’une et l’autre que celle-ci n’est pas une fatalité.

Injustices sociales, injustices écologiques

16h30 – avec Philippe Boursier (professeur de sciences économiques et sociales, Rennes)

Dans le monde humain, domination sociale et inégalités écologiques apparaissent partout enchevêtrées. Les groupes sociaux les moins responsables des destructions environnementales sont les plus exposés aux pollutions, à la privation de l’accès aux ressources vitales et à l’exil. Il faut cependant penser aussi les injustices socio- écologiques au-delà de la seule sphère humaine. C’est ce qui rend nécessaire le dialogue entre les sciences sociales et les sciences du vivant. Ce dialogue ne met pas seulement au jour la diversité des formes d’injustice, il promeut encore de nouvelles formes de justice.

L’humiliation, poison de l’injustice

17h30 – avec Olivier Abel (philosophe, Université de Montpellier)

L’humiliation est le cœur sombre de nos sociétés, dont elle aggrave la violence et l’injustice. Nous le voyons dans nos vies ordinaires autant que dans nos institutions communes. D’une part, elle ruine la confiance et l’estime de soi : d’autre part, elle génère le ressentiment et dévaste durablement les circuits de la reconnaissance. ll nous faut, certes, tenter de faire une société plus juste. Mais ne serait-ce pas d’abord faire une société moins humiliante ?

Vendredi 22 novembre

COMBATTRE L’INJUSTICE

Partir de l’injustice

9h – avec Emmanuel Renault (philosophe, Université Paris- Nanterre)

Pourquoi accorder un privilège à l’expérience de l’injustice dans la réflexion philosophique sur la justice ? Une telle démarche s’expose à deux objections. La première est que toutes les injustices ne s’accompagnent pas d’un sentiment d’injustice, un tel sentiment pouvant d’ailleurs, à l’inverse, être suscité par des actions ou des institutions justes. La seconde est que toute expérience de l’injustice présuppose une certaine conception de la justice. Mais cette expérience nous permet de prendre conscience des limites des définitions généralement admises de la justice et nous invite à les reformuler. C’est le cas de l’expérience de l’injustice au travail, qui pourra être placée pour ce motif au centre de la réflexion.

La victime au cœur de l’injustice

10h – avec Antoine Garapon (magistrat honoraire, président de la Commission Reconnaissance et Réparation)

Les nouvelles formes de justice – restaurative comme transitionnelle – ont cette particularité commune de mettre la victime au centre, et non plus l’accusé comme le fait la justice pénale. Un tel déplacement du centre de gravité de la justice entraîne des conséquences immenses que la pensée de Paul Ricœur nous aide à comprendre… et à approuver.

Réparer les injustices de l’histoire

11h30 – avec Magali Bessone (philosophe, Université Paris 1 Panthéon- Sorbonne)

Les théories de la justice qui ont été au cœur des débats philosophiques à la fin du 20e siècle sont âprement critiquées pour leur caractère abstrait, tellement détaché des conditions réelles de nos sociétés qu’elles apparaissent inutiles, voire contre-productives, pour qui y chercherait une feuille de route afin de lutter contre les inégalités et les effets de domination. Mais la justice réparatrice, qui se préoccupe de répondre aux injustices du passé, notamment du passé colonial et esclavagiste des sociétés libérales contemporaines, répond de manière convaincante aujourd’hui à cette critique.

FACE À L’IRRÉPARABLE

Poétique de l’indignation

14h – avec Gilbert Vincent (philosophe, Université de Strasbourg)

Paul Ricœur a souligné le rôle de l’indignation dans la genèse du sentiment éthique chez le jeune enfant. Mais il a également rappelé que l’indignation a des limites – ainsi lorsque l’indigné s’enferme dans sa plainte ou quand, plus gravement, il s’abandonne à la haine et au ressentiment. Dans un cas, seule l’indignation pour autrui pourrait valoir comme une délivrance. Dans l’autre, le remède se trouve peut-être dans la culture d’un sentiment singulier : l’admiration. En témoignent les écrits de Gabriel Gauny, l’«ouvrier-poète», et Rosa Luxemburg, la grande figure de l’internationalisme, tous deux victimes de l’injustice et du tragique de l’histoire.

L’art peut-il, doit-il réparer ?

15h30 – avec Danièle Cohn (philosophe, Université Paris 1 Panthéon-Sorbonne) et Jacques- Oliver Bégot (philosophe, Université de Rennes)

Créer de nouvelles formes sensibles qui rendent compte de l’irréparable : telle est sans doute la responsabilité qu’impose aux artistes le temps qui est le nôtre, celui de l’« après Auschwitz ». Est-ce à dire que la justesse artistique et l’expérience qu’elle nous ouvre ne sauraient plus désormais être pensées dans l’horizon d’une force réconciliatrice, ou au moins consolatrice ? Pour affronter cette question, il faut revenir sur la pitié, le souffrir ensemble ou la compassion, qui a constitué à la fois un registre central de l’expérience esthétique depuis les Lumières et une réponse cruciale à l’expérience de l’injustice.

Le pas d’Isis

17h30 – Création théâtrale, d’après Le pas d’Isis de Jeanne Benameur.  Mise en scène : Massimo Dean / Création musicale : Laetitia Shériff / Coordination et production : Céline Bouteloup et Fabrice Bouvais / Avec la troupe du Poulpe : Asma H., Emma, Emmanuelle Le Bigot, Jérôme J., Katy B., Marc Sparfel, Marie Saby, Tam-Ara, Myriam / www.kali-co.fr

Dans une longue marche vers un demain, chacun pose un geste qui dit « Je suis là, j’existe ». Ce sont un poing brandi, une paume de main collée à une bouche, deux bras qui enlacent une poitrine… Ils sont là, dans leur présence absolue. Ils montrent que la vie résiste, que l’oppression, la misère et l’injustice ne les empêcheront pas d’avancer, que la douceur peut l’emporter sur la violence du monde.

Informations pratiques

Les Champs Libres

  • 10, cours des Alliés 35000 Rennes
  • Tél. 02 23 40 66 00
  • contact@leschampslibres.fr
  • leschampslibres.fr

Accès

  • Métro stations Gares, Charles de Gaulle Bus arrêts Charles de Gaulle, Gares, Liberté
  • Gares Gare SNCF et gare routière à 100 m
  • Parking Charles de Gaulle

Entrée libre dans la limite des places disponibles

Image d’illustration : Jean-Luc Bonduau.

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