À Rennes, le Palais Saint-Georges, avec son parc à la française, fait l’objet de toutes les convoitises. Nombre de Rennais souhaitent depuis longtemps le voir ouvert au grand public. Qu’ils se réjouissent : après deux projets avortés – un complexe hôtelier de luxe et un Centre des Congrès – Rennes va enfin se doter d’un zoo !
Alors que la ville de Montfort-sur-Meu a installé dès 2014 une girafe sur les hauteurs de son centre-ville pour le plus grand plaisir des riverains, l’homme d’affaires qatari Méhémet Ali s’apprête à offrir à la Ville de Rennes deux girafes.
Objectif, aux dires de cet original milliardaire pacifiste : « au plus fort de la lutte en France entre deux opinions politiques, la girafe va passer entre les deux camps émerveillés et entraîner dans un cortège innombrable amis et ennemis. Une simple bête permettra un moment de résoudre le plus grand des problèmes et opérer une réconciliation générale. »
Quel lieu semble le plus approprié au sympathique enturbanné pour faire brouter les mammifères tachetés ? Sur une hauteur centrale qui ne tordra pas le cou des curieux. Autrement dit, dans un lieu occupé depuis des lustres par la caserne des sapeurs-pompiers et certains services administratifs de la Ville : le Palais Saint-Georges, avec son parc en dénivelé.
Étant donné que beaucoup de Rennais se plaignent, ongulent et ruminent depuis des années dans l’attente de profiter pleinement de ce bel ensemble, ce nouveau projet promet de les réjouir. Mieux : l’objectif final, selon des sources proches du dossier, consisterait dans l’ouverture d’un zoo public, intérieur et extérieur (parc et palais) dès 2016.
Bien sûr, la décision de donner corps ou non à ce projet vivant est entre les mains des élus de la municipalité et de la métropole. Les gardiens du parc de Rennes accepteront-ils le cadeau de l’Oriental ami des bêtes ? Feront-ils des chatteries comme un chat au pacha ? Ou prendront-ils le risque d’être chameau à son égard et de refroidir les investissements qataris en Bretagne ?
En attendant et précisément, si Henri Michaux mettait du chameau à Honfleur (sous l’effet de la mescaline), notre dessinateur Michel Hefffe met de la girafe au Palais Saint-Georges (sous l’effet des chocolats Dupont). Entre chien et loup, l’artiste nimbe notre belle ville de Rennes d’une lumière camelopardalis…
Tout cela augure d’une année 2016 surréaliste et humoristique à l’image de la présente veine narrative. Et afin de lutter à sa façon contre l’instauration dans le monde d’une nuit noire de 1000 ans, la rédaction d’Unidivers vous adresse ses vœux des calés. Sans nulle rumination, mais avec la hauteur d’un long cours intranquille.
Texte : Nicolas Roberti
Dessin : Michel Heffe