25 novembre. Les violences faites aux femmes demeurent une urgence publique

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Journée violence femmes

Chaque 25 novembre, la Journée internationale pour l’élimination de la violence à l’égard des femmes rappelle une réalité brutale : en France, les violences de genre demeurent un phénomène massif, systémique et meurtrier. Loin d’être un sujet périphérique, elles constituent un problème de santé publique, de justice et d’égalité qui touche tous les territoires, toutes les générations, tous les milieux sociaux. En Ille-et-Vilaine comme au niveau national, les chiffres démontrent l’ampleur d’une violence encore trop souvent silencieuse.

Une réalité nationale accablante

Les données 2023–2024 publiées par les services de l’État sont sans appel :

  • 1 femme meurt tous les 3 jours sous les coups de son conjoint ou ex-conjoint (118 féminicides en 2023 – Ministère de l’Intérieur).
  • 244 000 femmes sont victimes de violences conjugales chaque année (Enquête CVS, INSEE–ONDRP).
  • 94 000 femmes déclarent avoir subi un viol ou une tentative de viol dans l’année.
  • 70 % des violences ont lieu au domicile, là où les femmes devraient être le plus en sécurité.
  • Moins de 10 % des victimes déposent plainte ; seules 1 à 2 % voient leurs auteurs condamnés en justice (Observatoire national des violences faites aux femmes).

Les violences conjugales demeurent ainsi la première cause de mortalité violente des femmes en France.

En Ille-et-Vilaine : une situation très préoccupante

Le département d’Ille-et-Vilaine n’échappe pas à cette tendance nationale. Au contraire, il est marqué par une augmentation régulière des signalements et du recours aux structures spécialisées, signe d’une violence encore très présente mais aussi d’une meilleure orientation des victimes.

• La Maison des femmes de Rennes : une fréquentation en hausse continue

En 2024, la Maison des femmes de Rennes a accueilli :

  • 2 889 femmes victimes de violences,
  • accompagnées de 432 enfants,
  • soit 3 321 personnes directement soutenues.

Ce chiffre, déjà très élevé, illustre à la fois l’ampleur du phénomène dans l’agglomération rennaise et la nécessité d’un accueil pluridisciplinaire (soins médicaux, juridiques, psychologiques, mise en sécurité, orientation sociale).

• Des enfants eux aussi victimes

Le Département d’Ille-et-Vilaine a reçu, en 2024 :

  • 2 972 informations préoccupantes concernant des mineur·es en danger ou en risque de danger,
  • dont 202 pour motif de “violences conjugales”,
  • soit 6,8 % des signalements.

Ces chiffres rappellent une réalité trop peu nommée : dans les situations de violences conjugales, les enfants sont également victimes, qu’ils subissent directement ou qu’ils soient exposés à un climat de violence. L’Organisation mondiale de la santé classe d’ailleurs l’exposition des mineurs aux violences conjugales comme une maltraitance à part entière.

Comprendre : des violences protéiformes, souvent invisibles

Les violences faites aux femmes ne se résument pas aux coups. Elles relèvent d’un mécanisme d’emprise, inscrit dans des rapports de domination. Elles peuvent être :

  • physiques,
  • psychologiques,
  • verbales,
  • économiques,
  • administratives,
  • sexuelles,
  • numériques (cybercontrôle, harcèlement),
  • ou encore gynécologiques et obstétricales.

La majorité des violences s’exerce dans le huis clos familial ou conjugal, ce qui rend leur détection difficile. D’où l’importance du repérage, de la formation des professionnel·les – et de la société entière.

Une urgence publique et territoriale : agir, prévenir, protéger

La lutte contre les violences faites aux femmes repose sur trois axes indissociables :

1. La prévention

Elle passe par l’éducation à l’égalité, dès l’enfance.
En France, l’Éducation nationale estime que 80 % des filles déclarent avoir subi du harcèlement sexiste au cours de leur scolarité. L’apprentissage du respect et du consentement est un investissement de long terme.

2. La protection et l’accompagnement

L’action des structures territoriales est absolument centrale :

  • Maisons des femmes,
  • centres d’hébergement d’urgence,
  • associations spécialisées,
  • intervenants sociaux en commissariats,
  • référents violences conjugales dans les services publics,
  • téléphones grave danger,
  • ordonnances de protection.

En Ille-et-Vilaine, le renforcement de ces dispositifs a permis d’améliorer l’accueil et la protection, mais les besoins restent immenses, notamment en hébergement.

3. L’action judiciaire

Depuis 2019, les ordonnances de protection peuvent être délivrées en 6 jours, mais leur application demeure inégale. Les associations réclament :

  • plus de bracelets anti-rapprochement,
  • un suivi plus systématique des auteurs,
  • une meilleure coordination entre police, justice, santé et services sociaux.

Un combat collectif : chacun, chacune peut agir

La lutte contre les violences faites aux femmes n’est pas seulement l’affaire des institutions : elle concerne toute la société, car chacun peut être témoin, relais, soutien ou signal.

Numéros d’urgence à rappeler :

  • 17 : Police / Gendarmerie
  • 114 : SMS si la parole est impossible
  • 3919 : numéro national, anonyme et gratuit
  • 116 006 : victimes France
  • Maison des femmes de Rennes : accueil et orientation spécialisée
  • Plateformes de signalement en ligne : arretonslesviolences.gouv.fr

Le 25 novembre n’est pas une commémoration : c’est un appel à l’action

Chaque chiffre présenté ci-dessus représente une vie bouleversée, une histoire brisée, une femme et souvent des enfants en danger. En Ille-et-Vilaine comme dans toute la France, la réponse doit être collective, durable et déterminée. L’élimination des violences faites aux femmes n’est pas un horizon lointain : c’est une urgence publique. C’est un devoir moral, social, républicain.